Chapitre 1
Caleb entra dans la hutte, la
trouvant étonnement déserte. Osiaa'iiwakuna était seule, assise sur leur
couche, son hameliriek couvrant ses jambes. Elle brodait tranquillement. Elle
ne remarqua pas sa présence avant qu’il ne l’embrasse doucement. Elle releva la
tête vers lui souriant doucement. Elle repoussa son ouvrage et l’invita à venir
le rejoindre. Il se départie de son manteau et s’installa sur le bord du lit.
-
Comment ça
s’est passé, demanda Osiaa’iiwakuna en s’approchant de lui. As-tu une audience?
-
Demain
matin, lui dit-il en hochant la
tête. Avec tout le monde.
-
Hum,
j’imagine qu’il va tous les faire voter. Il faut que tu sois certain de faire
bonne impression.
-
Tu crois
que je ne vais pas y arriver?
-
Non, je
crois que eux vont avoir une opinion terriblement biaisée à ton sujet… et au
mien aussi.
-
Pourquoi
toi?
-
Tu n’as
peut-être pas remarqué, mais je suis enceinte de huit lune.
-
Oh ça je
le sais.
Il se pencha vers elle et l’embrassa doucement glissant une main sur
son ventre. Elle sourit doucement et l’embrassa à son tour.
-
Il va bien
aujourd’hui?
-
Il était
actif. Ce qui est toujours une bonne nouvelle.
-
As-tu vu
l’eshamane?
-
Pas
encore, elle était partie chercher des herbes. Mais je vais le faire le plus
rapidement possible, ne t’inquiète pas… d’ailleurs… je me demandais… laisse…
-
Tu te
demandais quoi? Il y a un problème?
-
Non, non…
tout vas bien. Simplement…. J’aimerais, si tu es d’accord essayer d’être une eshamane.
Finir mon apprentissage.
Caleb haussa les sourcils. Il lui sourit doucement et l’embrassa à
nouveau. Il ne pouvait croire qu’elle avait eu si peur de lui le lui demander. Elle
haussa les sourcils, attendant une réponse.
-
Tu me
demandes vraiment cela, lui
demanda-t-il en riant doucement. Tu
veux être eshamane depuis toujours.
-
Oui, mais…
tu es mon mari… et je suis censé te demander la permission si…
-
Non.
-
Non?
-
Non, je ne
veux pas que tu me demandes la permission pour cela. Je ne veux pas que tu me
demandes la permission pour faire ce que tu veux.
-
Non mais…
selon les traditions…
-
Je ne
crois pas qu’elles s’appliquent à nous.
Osiaa’iiwakuna soupira doucement et baissa la tête. Elle souriait doucement
réalisa Caleb en prenant place sur le bord du lit. Il l’attira à lui, lui
embrassant les cheveux.
-
Tu ne
regretteras pas, lui demanda-t-il.
-
Regretter
quoi, demanda-t-elle curieuse. D’être eshamane?
-
De rester
avec moi.
-
De quoi tu
parles?
-
De rester
ma femme, d'être avec moi.
Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et
vint l'enlacer, déposant un baiser sur sa nuque. Elle ne voulait pas avoir
cette conversation, elle ne voulait pas y penser.
-
Je t'ai
demandé de m'épouser, lui rappela-t-elle
doucement à l'oreille. J'ai
fait tout ce voyage avec toi, parce que tu as eu un doute… je t'ai suivi ici.
Je t'ai suivi à Ponteforte avant cela. Je t'ai aimé et je t'aime encore. Je ne
suis pas prête de te laisser partir.
-
Je suis
quand même un ereizt….
-
Et je suis
celle qui porte son enfant. Et une fois que le conseil te connaîtra, ils vont
l'accepter, j'en suis sûr.
-
Et sinon?
Si je reste un ereizt?
Osiaa’iiwakuna soupira, se
blottissant un peu plus contre son dos. Elle ne voulait pas y penser. Elle
préférait croire que tout allait bien aller. Caleb lui prit une main et la lui
caressa doucement.
-
Tu sais
que si tu avais voulu…
-
Ne finit
pas cette phrase, le prévint elle.
-
Que si tu
voulais rester à Ponteforte ou ailleurs dans les Plaines, je t'aurais écouté.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas.
Elle lui avait mentionné à plusieurs reprises son inconfort à voyager dans sa
condition. Il l'avait poussé au bord de la crise de nerfs et de l'épuisement.
Elle avait passé des nuits à s'endormir en pleurs à l'idée de poursuivre leur
ascension le lendemain. Elle se souviendrait longtemps de des maux de dos et de
jambes lorsqu'elle se réveillait le matin, pratiquement incapable de se relever
jours après jours. Elle sentait encore les traces de leur dernier
campement.
-
Tu vas
bien, lui demanda-t-il en
constatant son silence. Je ne t'ai
pas vue de la journée.
-
Je me suis
reposée, répondit elle répondit
elle simplement en relevant la tête vers lui. Maintenant que j'ai un lit.
-
Tu es
confortable?
-
Plus que
les dernières lunes.
-
As-tu
besoin de quelque chose?
-
De toi.
Viens.
Elle le tira par les épaules,
l'obligeant à s'allonger près d'elle. Il ne résista guère à cette invitation.
Elle s'allongea contre lui passant une main sur son torse, blottissant sa tête
dans le creux de son épaule. Il était nerveux, elle comprenait mais il n'y
avait rien de plus qu'ils pouvaient faire. Il posa une main sur la sienne, lui
caressant doucement ses doigts, s'arrêtant sur son alliances de temps en temps.
Elle ne réagit pas, prétextant s'être déjà assoupie. Elle ne voulait pas
laisser transparaître sa propre inquiétude. Il s'étira au bout d'un moment et
la recouvrir de sa fourrure d'ourse, s'assurant qu'elle soit bien couverte en
bougeant le moins possible.
Il passa doucement une main
dans ses cheveux, effleurant son oreille et l'embrassa sur le front. Depuis
qu'ils étaient de retour parmi les gens de son peuple, il était bien plus
discret dans ses gestes d'affection, avait-elle remarqué. Elle ne s'en faisait
pas. Il était fort probablement incertain de la réception des autres. Qu'ils
perçoivent cela d'un mauvais œil. Elle comprenait bien, mais en privé, elle
désirait retrouver son amant et l'intimité qu'ils avaient eu à
Ponteforte.
-
Kuna, l'appela-t-il doucement en lui caressant la
joue. Kuna? Je sais que tu ne dors
pas.
-
Quoi?
-
Penses-tu
à ce que tu ferais si ils me refusaient?
-
Ils ne
refuseront pas, soupira Osiaa’iiwakuna
agacée qu’il retourne sur le sujet.
-
Kuna…
-
Je ne sais
pas, avoua-t-elle en relevant la
tête vers lui. Je ne me vois pas
être sans toi, pas avec notre enfant. Je me vois mal prendre un autre
mari… je ne sais pas qui voudrait de moi et de notre enfant… J’imagine que je
pourrais être une eshamane et rester seule…
-
Tu serais
prête à le faire?
-
Non! Je
veux être avec toi! Je serais prête à quitter avec toi, rester ici le temps que
notre enfant vienne au monde, mais ensuite…. Peu importe.
-
Kuna, soupira Caleb en se tournant vers elle. Tu as besoin de ton samaw.
-
Ce n’est
pas mon samaw, pas encore.
-
Tu as
besoin de ta famille.
-
Tu es ma
famille. N’essaie pas de te défiler! Je ne te laisserai pas partir sans moi,
soyons clair. Tu es coincé avec moi! Tu ne te débarrasseras pas de moi aussi
facilement, prince Caleb Louis François
Mirantreux de Pontefort!
Caleb rit et se tourna vers elle.
Il l’embrassa et la serra contre lui, effleurant l’un de ses seins doucement. Enfin
elle le sentait se reprendre. Elle lui retourna ses caresses, passant un bras
autour de son cou. Elle ne voulait pas le laisser s’éloigner. Ni maintenant, ni
jamais. Il l’entraina avec lui, l’embrassant un peu plus descendant une main
sur ses fesses. Elle sourit bêtement, heureuse de cette attention et pressa sa
poitrine contre lui. Elle le désirait depuis des jours.
Il la fit rouler sur le dos, lui
retirant sa robe, dévoilant sa poitrine. Il la lui embrassa avec passion, lui
massant doucement. Elle se défila quelque peu, la fraicheur de la hutte la
faisant frémir, mais il ne s’en fit pas. Il la rapprocha de lui et défit
doucement ses pantalons alors qu’elle lui retirait son chandail. Elle se
dépêcha de lui descendre ses pantalons. Elle n’entendait pas prendre son temps.
Elle ignorait quand son frère et sa belle-sœur allait être de retour. Elle ne
put s’empêcher un léger cri de satisfaction, rejetant la tête en arrière.
Caleb s’amusa de la voir fondre
entre ses main. Il l’embrassa doucement et bougea lentement. Elle lui passa les
bras autour de son coup et l’attira à elle un peu plus. Il y avait si longtemps
qu’il l’avait aimé ainsi. Il l’embrassa doucement un peu plus. Il l’aimait
tant. Elle aussi, il le voyait bien. Elle l’implora de ne pas arrêter,
gémissant doucement en s’accrochant à ses épaules.
-
Ne me laisse pas, lui dit-elle en
se redressant vers lui.
-
Jamais, répondit-il en la ramenant vers
lui.
-
Peu importe ce qui arrive demain, promets….
Hum… Caleb…. promets-le moi. Tu … oh… tu ne me laisseras pas.
Caleb le lui promit et la plaqua
contre lui. Elle le laissa la prendre avec amour. Il la reposa sur la couche
avec délicatesse. Elle lui sourit et l’invita à venir s’allonger près de lui.
Il n’hésita pas et la prit par la taille et la serra contre lui en la couvrant
de son hameliriek. Elle se blottit contre lui, caressant son torse et jouant
dans son poil.
-
Ton frère devrait aller manger plus souvent
chez ses beaux-parents, lui susurra Caleb en l’embrassant.
-
Hum… j’ai surtout hâte que nous ayons notre
propre chez-nous.
-
Je te construirai la plus belle, lui
promit Caleb en la faisant sourire. Solide, chaude, confortable et grande.
-
Je n’ai pas besoin d’une grande.
-
Si tu veux être eshamane, tu vas avoir besoin
d’espace.
-
Commençons par avoir une. Tout simplement.
Caleb lui sourit et la remonta l’hameliriek
un peu plus sur elle. Elle était si belle ainsi, ses longs cheveux se fondant
dans la fourrure, seul son visage doré se découpant sur le noir. Elle ferma les
yeux, profitant de la chaleur et du confort, sa fatigue était de retour. Caleb
la rapprocha de lui, s’assurant qu’elle soit bien couverte de la tête au pied.
Il entendit son beau-frère et Tlig’gohpa
rentrer, mais il resta allongé, prétendant dormir. Il les entendit discuté tout
bas, mais ne prêta pas attention à ce qu’ils disaient. Ils étaient déjà de trop
dans leur petite hutte.
Chapitre 2
Caleb entra sous la grande hutte
en suivant son beau-frère. C’était la première fois qu’il mettait les pieds au
sein du conseil. Il jeta un coup d’œil autour de lui. L’espace était étonnement
vide, à l’exception des fourrures au sol, du feu et de quelques accessoires de
cérémonies. Il en était quelque peu déçu. Cet endroit avait toujours été
mythique pour lui, l’endroit où tous les hommes influents du camp se
réunissaient. Où les décisions les plus importantes étaient prises.
Sur les murs des peintures illustraient des
scènes de chasse et de combats. Une vingtaine panaches d’orignaux sculptés
étaient suspendu du plafond, créant un méandre d’ombres entrelacées au sol par
la lumière qui entrait du plafond. Certainement qu’à la nuit tombée, ils
projetaient d’impressionnantes ombres sur la charpente du plafond grâce au feu
qui crépitait au centre de l’habitation.
Caleb savait qu’à ce moment, il
n’était pas encore membre de leur élite. Il allait devoir passer leur audition.
Il devait leur raconté leur aventure devant Nopokemi’aatna, l’oksitaasamaw du
village. L’annonce de son union à Osiaa’iiwakuna
n’avait pas été bien reçu parmi la vaste majorité des Pawakenakie’ii . Ils le
voyaient toujours comme eirezt, comme l’étranger. Il savait qu’il allait devoir
défendre leur union, il allait devoir expliquer son choix de l’entrainer chez
son propre peuple.
Les hommes prirent places. Nopokemi’aatna
s’assit directement sous le plus gros panache d’orignal, face à la place libre
qui où Caleb fut indiquer de se tenir. Le chef lui fit signe qu’il pouvait
s’assoir lorsque tous eurent fait de même. Il ne s’attendait pas à avoir ce
privilège. Il s’exécuta, et accepta la tasse de thé que son beau-frère lui
offrait. Chacun d’entre-eux devrait boire à même le bol, ce rituel devant ouvrir
leur esprit et consolider leur fraternité.
Le conseil s’ouvrit suivant la
prière traditionnelle, les hommes demandant à la mère de leur offrir clarté et
sagesse dans leur décision. Meiren’aatok jeta une poignée d’herbes dans les
flames, aromatisant l’air de menthe et de romarin. Osiaa’iiwakuna faisait la
même chose après qu’ils se soient disputés ou qu’elle ait fait un cauchemar. Elle
aimait purifier l’air, créer une nouvelle atmosphère.
-
Nous
sommes ici réunis pour discuter de l’arrivée de Osiaa’iiwakuna et de Caleb au
sein de mon samaw, ouvrit Nopokemi’aatna solennellement. Bien que de savoir ma nièce en sécurité et
en bonne santé me réjouisse, je dois admettre que les circonstances et son état
me laisse perplexes. Avant de prendre une décision, je désir entendre la
version des faits de Caleb à ce sujet.
-
Qu’est-ce
qu’il y a à savoir, cracha Makoswii en jeta un regard noir à Caleb. Il l’a mis enceinte et maintenant il veut
nous faire à croire qu’ils sont ensembles.
-
Makoswii!
Assez! Le conseil se doit d’entendre ce qui s’est passé durant leur absence.
-
Pour qu’il
nous raconte l’histoire qu’il l’arrange?
-
Assez!
Caleb?
Caleb soupira lourdement et
entreprit son histoire. Il raconta comment ils étaient loin du village lors de
l’attaque, leur décision d’aller rejoindre un autre samaw, leur errance dans la
forêt, leur arrivée dans les plaines filliandriennes, leur séjour à Pontefort,
leur mariage et finalement leur décision de revenir dans les montagnes. Nopokemi’aatna
avait pris soin de garder tous silencieux, mais son récit avait suffisamment
prit de temps que par trois fois ils avaient dû réalimenter le feu.
-
Et Osiaa’iiwakuna,
demanda Nopokemi’aatna. Comment
a-t-elle vécue son séjour?
-
Je crois
que vous feriez mieux de lui demander en personne, répondit Caleb. Je préfère en cette occasion ne pas parler
en son nom. Je crois, si vous la permettez, qu’elle ferait mieux de répondre
elle-même à cette question.
-
Allez la
chercher.
-
Une femme
n’a pas sa place ici, intervint Meirt.
-
Elle
n’aura pas sa place, elle sera là en guise d’invitée seulement.
Saapamiikt se leva prestement,
décider d’aller chercher sa sœur. Il connaissait une bonne partie de l’histoire
et malheureusement le récit de Caleb ne lui rendait pas justice. Il avait
simplement effleuré la surface de l’histoire, il n’avait pas parlé de
l’incident avec Macihaawew, ni du cavalier noir. Il avait raconté son histoire
avec tant de distance qu’elle semblait fausse, dénuée de sentiment et de vie. Il
voulait que le samaw sache la vérité.
Il trouva rapidement sa sœur, qui fut étonnée
de la requête, mais le suivit rapidement. Il la fit entrée dans la hutte devant
lui et la guida, la main dans le bas de son dos jusqu’à Caleb.
-
Bienvenue Osiaa’iiwakuna,
l’invita Nopokemi’aatna en lui faisant signe d’avancer. Nous avons besoin de clarification sur
l’histoire que Caleb vient de nous raconter.
-
Quel genre
de clarifications, demanda-t-elle poliment en pressant l’une de ses jambe
sur le dos de son mari.
-
Quelles
ont été tes motivations à quitter ton village, demanda une homme qu’elle
n’avait jamais vue.
-
Il n’y
avait plus de village, répondit-elle rapidement en se tournant vers l’homme.
Je vois mal comment j’aurais pu faire
autrement.
-
Caleb ne
t’a pas forcé à quitter? Il ne t’a pas forcé à le suivre?
-
Aucunement,
répliqua-t-elle indignée en jetant un coup d’œil à son frère. Est-ce que vous m’avez fait chercher pour
corroborer ce que Caleb a dit?
-
Nous
voulons simplement être certain que ce qu’il a avancé est la vérité, intervint
l’Oksitaasamaw en levant une main pour l’apaiser.
-
Caleb ne
m’a pas forcé à faire quoi que ce soit contre ma volonté, dit-elle
sèchement. Que ce soit clair. Il ne m’a
jamais empêcher de faire quoi que ce soit, non plus.
-
Peut-être
qu’elle pourrait s’asseoir, intervint Saapamiikt qui était encore debout. Elle est enceinte jusqu’au yeux.
-
Bien sur, accorda
Nopokemi’aatna.
-
Elle en
peut pas s’assoir au sol. Pas dans la…
-
Je sais,
Bennen! Mais on ne va pas laisser une femme enceinte debout.
Caleb la prit par la main et la
fit assoir sur ses jambes. Osiaa’iiwakuna le remercia, lui prenant la main et
la posant sur son ventre. Si les hommes croyait que leur affection était
fausse, elle allait leur prouver le contraire.
-
Pouvons-nous
poursuivre, demanda Nopokemi’aatna à l’adresse de ses confrères.
-
Ce n’est
pas très commun, dit Meiren’aatok en hochant doucement la tête. Mais la situation ne l’est pas non plus.
-
Tu as
volontairement suivi Caleb, Osiaa’iiwakuna, poursuivit Nopokemi’aatna.
-
La journée
de l’attaque, mon père lui avait commandé de rester près de moi, de me protéger
lorsque j’étais aller chercher des herbes pour ma mère. À notre retour, il ne
restait plus rien… à choisir entre rester là
ou quitter pour aller rejoindre un autre samaw. Nous avons essayé de
rejoindre le samaw de Brech… mais visiblement nous nous sommes perdus.
-
Il ne t’a jamais mal traité?
-
Mal
traité? Non… c’est plutôt l’inverse…. J’ai refusé son aide, je l’ai repoussé et
je l’ai utilisé. Mais il ne m’a jamais abandonné. Il a été patient, si ce n’est
plus et a tout fait en son pouvoir pour que je sois en sécurité. Il m’a amené
chez sa famille lorsque nous sommes arrivés dans les plaines, et là-bas m’a
fait passer pour sa femme.
-
Tu étais
jeune.
-
Pas plus
jeune que ma mère lorsqu’elle et mon père se son marié. Et dans notre cas c’était
le seul moyen que nous avions pour rester ensemble. Autrement les gens de son
peuple se serait débarrassé de moi.
-
Pourquoi?
-
Pour les
mêmes raisons que nous avons songé à le faire avec lui.
Un lourd silence s’abattit sur
l’assemblé, seul les crépitements du feu se faisait entendre. Caleb caressa
doucement le ventre de la jeune femme. Elle lui caressa la main en retour. Elle
avait pris le contrôle de toute la conversation. Elle marqua une pause,
l’enfant venant de donné un coup qui la distrait.
-
C’est moi
qui ai proposé à Caleb que notre union soit officielle, poursuivit-elle
assurée. J’ai demandé à Caleb qu’il
m’épouse selon les traditions de son peuple. Notre union fictive était déjà consommée depuis longtemps et le
mensonge commençait à transparaître. Je ne… je ne pouvais pas me permettre
d’avoir un enfant si nous n’étions pas ensemble. Et avec l’absence d’enfants,
même de grossesse… les gens de son peuple commençait à se poser des question.
-
N’as-tu
pas été enceinte…
-
C’est ma
troisième grossesse en ce moment. Toutes de Caleb. J’ai été enceinte peu de
temps avant d’arrivé à Pontefort,
mais je l’ai perdu. J’ai perdu la deuxième il y a environ un an. C’est ce qui a
motivé notre départ, est que nous ne croyons pas que ma fausse couche soit
purement accidentelle. Pour répondre à votre prochaine question. Si Caleb avait
jugé que moi et notre enfant aurions été en sécurité, il ne m’aurait pas fait
gravir les montagnes et descendre dans les gorges dans cet état.
-
Et si ta
sécurité avait été assuré, demanda Nopokemi’aatna.
-
Je ne
serais pas ici en ce moment.
Il eut un second silence, Osiaa’iiwakuna
appréciait ce moment. Elle n’avait pas eu la chance d’exercer son talent de la
sorte à Pontefort, pas avec des phrases complètes à tous de moins.
-
Votre
nièce était tout de même promise à mon fils, revint à la charge Makoswii.
-
C’était
avant l’attaque, rétorqua Nopokemi’aatna.
-
Qu’est-ce
que vous voulez que je lui dise maintenant?
-
Votre
fils, demanda Osiaa’iiwakuna en posant une main sur son ventre.
-
Macihaawew,
oui.
-
Macihaawew,
souffla Osiaa’iiwakuna la voix brisée.
Elle se tourna vers Caleb qui
semblait tout aussi étonné qu’elle. Était-il encore en vie? Avait-il rejoint le
samaw de Nopokemi’aatna? Elle ne l’avait pas vue depuis qu’ils étaient arrivés.
Elle se calla un peu plus contre Caleb qui lui prit l’épaule d’une main. Les
hommes ne manquèrent pas de constater son changement d’attitude. Nopokemi’aatna
se pencha un peu plus en avant, son regard passant de sa nièce à Caleb.
-
Macihaawew
est vivant, demanda Caleb devant le mutisme de sa femme. La dernière fois que nous l’avons vue, il…
il était sérieusement blessé. Et il ne nous a pas quitter dans la meilleur des
circonstances.
-
Mon fils
est arrivé ici blessé en effet, il a parlé d’une attaque.
-
Le cavalier
noir, intervint Caleb. Il nous a pris
en chasse depuis notre départ du village. Nous le sentions dans nos dos.
-
Il n’a pas
parler d’un cavalier, cracha Makoswii en se souvenant de la conversation.
-
Non il n’a
pas parler d’un cavalier, soutint Nopokemi’aatna. Mais plus de…
-
De moi, le
coupa Caleb.
-
Caleb,
lui murmura Osiaa’iiwakuna en tournant la tête vers lui.
-
Du fait
que je l’ai frappé, et que je l’ai emporté en combat contre lui. Il vous a raconté
qu’un eirezt l’avait battu. Certainement pas que je l’ai emporté en bonne et
due forme. Vous a-t-il mentionné pourquoi
nous nous avons eu cette dispute.
-
Mon fils
m’a dit que vous l’avez éloigné de Osiaa’iiwakuna.
-
Vous
a-t-il dit dans quelles circonstances?
-
Il a
essayé de me violer, intervint Osiaa’iiwakuna en plantant son regard dans
celui de Makoswii. Et après ça de
m’utiliser comme bouclier humain pour se protéger du cavalier noir.
-
Quand tu
dis violer, demanda Nopokemi’aatna soudainement inquiet. Qu’est-ce que…
-
Je vois
mal ce que vous avez de la difficulté à comprendre. À partir du moment où
quelqu’un veut en pénétrer une autre sans son consentement… j’appelle ça un
viole. En particulier lorsqu’on me tient par les poignets et que l’on m’empêche
de m’en sauver même si je supplie qu’il cesse.
-
Ce sont de
grave accusations, Osiaa’iiwakuna, soupira son oncle.
-
Ce ne sont
pas des accusations, mon oncle. C’est ce que j’ai vécu. Et si ce n’était pas
pour Caleb, il aurait eu ce qu’il voulait. Vous me demandez pourquoi j’ai accepté
de suivre un eirezt. Pourquoi j’ai choisi de m’unir à lui. Vous avez votre
réponse.
Caleb la blottie un peu plus
contre lui. Elle tremblait. Pas de peur, reconnu-t-il, de colère. Toute la trahison
qu’elle avait ressenti à lorsqu’Macihaawew l’avait coincée sous lui. Il lui
intima doucement que tout allait bien aller. Elle secoua doucement la tête en
se tournant doucement vers lui.
-
Ta
déclaration est vraiment importante, poursuivit Nopokemi’aatna en
soupirant. Lorsque tu es entrée, j’allais
te demandé si tu désirais resté la femme de Caleb. Visiblement ma question est
déplacée et je ne t’humilierais pas en te la posant. Ma recommandation au
conseil est la suivante; reconnaitre votre union comme officielle et l’enfant
légitime de ce fait. Caleb en tant
qu’homme aura un siège au sein de ce conseil, et toi…
-
Je désire
poursuivre mes études pour être eshamane, si vous le permettez, mon oncle.
-
Avec ma
bénédiction, et celle du conseil si le vote est majoritaire.
-
Elle accuse
mon fils de viol et vous voudriez que je vote en leur faveur, tonna Makoswii
en se penchant vers son chef.
-
Le récit
que ma nièce a fait sur les actions de votre fils n’influence en rien le vote
concernant leur intégration ou non au
sein de mon samaw. Ce sera discussion pour une autre fois.
-
Et si je
demande que cette problématique soit régler avant le vote.
-
Nous
devrons passer au vote pour décider si cette problématique doit être résolu
avant ou après.
-
Je demande
le vote.
-
Ceux en
faveur de régler les accusations viol soumises par Osiaa’iiwakuna à l’encontre
de…
-
Macihaawew
n’est pas là, intervint Renvrech. Il
est parti en rotation il ne reviendra pas avant deux jours encore.
-
Macihaawew
ne peut pas voter, il n’est pas marié, rappela Nopokemi’aatna. Ceux en faveur
de de régler les accusations d’Osiaa’iiwakuna en premier?
Près du tier des mains se
levèrent. Insuffisant, mais inquiétant, réalisa Osiaa’iiwakuna. Contre, furent
la moitié des mains, suivit de quelques abstentions. Le vote pour leur
acceptation au sein du samaw procéda, avec une vaste majorité l’emportant. Osiaa’iiwakuna
soupira de soulagement, posant une main sur son ventre. Makoswii jura, mais Meiren’aatok
le rappela à l’ordre,
Osiaa’iiwakuna remercia
humblement l’assemblé, leur promettant de travailler fort et de devenir une
bonne eshamane. Elle ne chercha pas à étirer sa présence au sein du conseil
elle se releva de peine et de misère, aider par son frère. Caleb se leva à son
tour et accompagna sa femme jusqu’à la porte, mais fut rappeler par Nopokemi’aatna,
sa présence désormais de mise au conseil. Osiaa’iiwakuna lui assura qu’elle
l’attendrait avec un souper prêt à son retour. Il lui caressa doucement un
sein, l’embrassant au passage.
Osiaa’iiwakuna rentra à la hutte
de son frère, sa belle-sœur était assise près du feu. Elle cousait tranquillement
et releva la tête en la voyant rentrer. Osiaa’iiwakuna lui raconta rapidement
sa rencontre et la jeune femme soupira de soulagement, l’invitant à venir la
rejoindre. Elle réparait le manteau de son mari, les jambes croisées sous elle.
-
Parlant de
bonne nouvelles, dit Tlig’gohpa doucement. Je crois que la Mère m’accorde sa bénédiction.
-
Vraiment, s’émerveilla
Osiaa’iiwakuna.
-
Je n’en
suis pas certaine encore, mais tout semble indiqué une bonne nouvelle à venir.
-
Ne
t’emballe pas trop, la prévint Osiaa’iiwakuna en posant une main sur la
sienne. J’ai connu beaucoup de déceptions….
-
Ton frère
m’a dit pour ta fausse couche. Dans la maison de pierre.
-
J’en ai eu
deux, lui dit-elle en soupirant. La
première, je venais à peine de découvrir que j’étais enceinte. Nous étions
encore dans les montagnes, perdus sans abris sans rien et… et lorsque nous
sommes arrivées dans les plaines, les
soldats m’ont frappé au ventre et je l’aie perdu. Caleb l’a su à ce moment, je
n’ai jamais eu le temps de lui annoncer.
-
Tu crois
que je devrais attendre?
-
Attend
encore, attend que Atwikan’iinosha puisse faire un examen physique et qu’elle
le confirme.
-
Tu ne peux
pas toi?
-
J’aimerais
mieux que quelqu’un de plus expérimenté le fasse. Il y a longtemps que je ne
l’ai pas fait.
Tlig’gohpa hocha la tête,
reprenant son ouvrage. Osiaa’iiwakuna s’affaira au sien, cousant l’un des
nouveaux oreillers qu’elle fabriquait. Elle avait pris l’habitude à Pontefort
de dormir dans un océan de coussins. Et avec son ventre de plus en plus gros,
elle rêvait d’avoir un coussin pour la supporter. Elle avait été chanceuse dans
les derniers jours de pouvoir amasser une bonne quantité de plumes pour ces
derniers, suffisamment pour deux. Elle eut le temps de refermer le premier
coussin avant de s’affairer au souper.
Caleb revint avec Saapamiikt,
entrant dans la hutte en pestant contre la neige qui avait commencé à tomber
dehors. Caleb vint enlacé sa femme, lui caressant le ventre. Elle lui souhaita
la bienvenue lui offrant de prendre place.
-
Comment
s’est passé la fin du conseil, demanda Osiaa’iiwakuna en passant un bol à
son mari.
-
Bien, répondit
Caleb en la remerciant. J’assume. Je
n’aie pas vraiment de comparatif.
-
Tu es
maintenant un vrai homme, ricana la jeune femme en se tournant vers lui.
-
Je suis
pas mal sur que tu savais ça déjà, répliqua-t-il en désignant son ventre
d’un signe de tête. Mais maintenant, nous
allons pouvoir avoir notre chez-nous.
Osiaa’iiwakuna lui sourit. Maintenant
qu’il savait été accepté au sein du samaw en tant que couple marié, ils
allaient pouvoir habiter leur propre hutte. Osiaa’iiwakuna avait hâte, elle
appréciait l’hébergement que son frère lui avait offert, mais il manquait
d’intimité. Elle ne pouvait pas attendre d’avoir sa propre maison. Elle voulait
s’installer, préparer l’arrivée de son enfant. Elle était nerveuse, et quelque
peu embarrasser d’accoucher dans la hutte de son frère.
-
Crois-tu
être capable de faire ça avant que le bébé arrive, demanda-t-elle.
-
Si j’ai de
l’aide, je crois que nous pourrions avoir quelque chose d’habitable, mais pas à
ce niveau-ci. Nous n’aurons pas beaucoup de confort.
-
Laisse-moi
me charger du confort, répliqua-t-elle en lui caressant la main. J’ai déjà deux coussins de fait pour nous.
-
Il va te
falloir plus que deux coussins.
-
Tu m’as
habitué à ce confort, j’étais très bien avant. Et à la prochaine chasse, si tu
es capable de me ramener une chèvre de montagne?
-
Pourquoi
une chèvre particulièrement?
-
Parce que
je le veux vivante.
-
Tu veux
faire comme mes gens, comprit
Caleb amusé.
-
Peut-être….
-
Les pawakenakie’ii
ne sont pas reconnus pour leur agriculture. Tu en veux une ou plusieurs?
-
Est-ce que
une de chaque serait trop demandé?
-
Où
comptes-tu les mettre? Avec quoi comptes-tu les nourrir?
-
Je
comptais les attacher à un arbre, de un et de deux, avec les déchets de tables.
N’importe quoi que normalement nous jetons… pelure de patates, de carottes,
n’importe quoi. Et pour répondre à ta question si tu pouvais me ramener une
femelle en premier. Idéalement une qui est enceinte, qui mettra bas au
printemps.
-
Tu veux
leur lait.
-
Je veux
leur laine aussi. Maintenant que je sais comment la filer.
-
Tu vas
avoir besoin de plus d’une chèvre pour te faire une robe, ricana Caleb.
-
Mais assez
pour faire une couverture pour notre enfant. Et si je réussie à les garder en
vie… et qu’elle se reproduit, nous n’aurons plus de problèmes….
Caleb sourit et la blottie contre
lui. Il lui promit de trouver une chèvre en question. Il se tourna vers Saapamiikt
qui discutait tout bas également avec sa femme. Leur intimité était déjà
suffisamment limité dans l’habitation que les deux couples avaient pris
l’habitude de discuté à voix basse.
-
Tu es
d’accord toujours que je sois une eshamane, lui demanda Osiaa’iiwakuna
entre deux bouchée.
-
Pourquoi
je ne le serais pas, lui demanda-t-il intrigué.
-
Parce que
ça l’implique beaucoup. Ça l’implique que je sois occupée, souvent absente et
en train d’aider des gens à tout heures…
-
D’avoir
des gens qui vont et viennent constamment, continua-t-il avec un sourire. D’avoir des herbes et des plantes qui pendent
du plafond, d’avoir des pots et des onguents partout.
-
Entre
autre…
-
Kuna, tu
rêves de faire ça depuis longtemps. Je ne vais pas t’en empêcher. Veux-tu autre
chose qu’une chèvre pendant que je vais être partie?
Osiaa’iiwakuna secoua la tête, le
remerciant. Elle avait d’autre projet, mais il n’était pas réalisable à ce
temps-ci de l’année. Elle ne voulait pas se l’avouer, mais elle avait été
impressionnée par les techniques d’agriculture des Filliandriens. Elle admirait
leur capacité de faire pousser ce qu’il voulait lorsqu’ils le désiraient. Elle
rêvait de ne pas avoir à crapahuter pour chacune petites plantes ici et là. Elle
avait conservé des graines de divers légumes et plantes pour replanter, en
espérant qu’ils allaient prendre racines dans le sol des Éternelles.
Osiaa’iiwakuna rendit visite à Atwikan’iinosha
en compagnie de Tlig’gohpa. La jeune femme désirait discuté de sa possible
grossesse le plus tôt possible et la présence de sa belle-sœur la rassurait. Osiaa’iiwakuna
se doutait que Atwikan’iinosha n’allait rien voir, mais elle ne voulait pas
argumenter. L’eshamane avait naturellement été informée du désir de Osiaa’iiwakuna
de devenir eshamane. Elle s’en réjouissait, lui proposant de l’assister durant
son examen de la jeune femme, désirant pouvoir discuter plus longuement avec sa
nouvelle apprentie plus tranquillement par la suite. Cependant comme Osiaa’iiwakuna
l’avait pressentie il était encore trop tôt pour être certain de quoi que ce
soit. Tlig’gohpa soupira, déçue. Elle remercia la eshamane quitta la tête
basse.
-
C’est
toujours une déception lorsqu’il n’y a pas de bonne nouvelle, déclara Atwikan’iinosha
en soupirant doucement.
-
Moins
décevant qu’une mauvaise, rétorqua Osiaa’iiwakuna
en regardant le pan de la porte se refermer. Je lui aie dit hier que c’était trop tôt pour que tu sois capable de le
savoir.
-
Vous êtes
toutes si pressée d’avoir des enfants.
-
La mère
demande que nous le fruit de nos amours. Elle demande que nous suivions ses principes. Nous sommes éduquées
ainsi.
-
Pourquoi
désires-tu être eshamane, demanda doucement Atwikan’iinosha en lui prenant
la main.
-
Ma mère
l’est… l’était… et j’ai toujours aimé la voir travailler. La voir recoudre des
plaies, la voir soignée tous les membres de notre village. J’ai toujours admiré
son travail.
-
Et tu
souhaites poursuivre son travail.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête, une
larme roulant sur sa joue. Elle n’avait jamais exprimé cette pensée à haute
voix. Elle s’ennuyait horriblement de sa mère. Plus elle avançait dans sa
grossesse, plus elle regrettait son absence. Atwikan’iinosha l’enlaça
doucement. Elle lui promit de prendre soin d’elle, commençant à pleurer à son
tour. Elle avait été proche de Rose dans le passée, étudiant toutes deux sous Lily.
Atwikan’iinosha caressa les
cheveux de la jeune femme et essuya sa joue du pouce. Osiaa’iiwakuna renifla et
essuya ses yeux du revers de la main. Elle prit un moment pour reprendre ses
esprits, caressant son ventre la tête basse.
-
Ta mère
serait fière de toi, Osiaa’iiwakuna, lui dit doucement l’eshamane. Oh, je ne voulais pas te faire pleurer
encore.
-
Désolé,
c’est temps-ci… c’est…
-
C’est tout
à fait normale, tu attends un enfant.
-
J’hais que
l’on… que l’on me dise ça…
-
Comme
toute les autres femmes enceintes. Désires-tu que l’on regarde où en sont tes
connaissances aujourd’hui?
-
Vous allez
me poser des questions?
-
Entre
autres… j’ai surtout besoin d’aide pour préparer des tisanes aussi. Nous avons
plusieurs personnes qui ont attrapés froid dans les derniers jours. Si tu te
sens de m’aider aujourd’hui?
-
Avec
plaisir!
Atwikan’iinosha se releva,
resserrant son châle au passage avant d’aller chercher plusieurs herbes qui
pendaient du plafond. Osiaa’iiwakuna sourie doucement, se rappelant la
conversation avec Caleb la veille. Elle récupéra les herbes que lui tendait Atwikan’iinosha.
-
Tu connais
leur nom, demanda cette dernière en récupérant des petits coffrets de bois.
-
Menthe,
verveine, framboisier, genévrier, thym, mélisse et racine de gingembre, énuméra-t-elle
en les montrant l’une à l’une.
-
Que
ferais-tu?
-
Mélisse,
gingembre et thym pour sûr. Je déconseillerais le framboisier aux femmes
enceintes, pas avant les dernières semaines à tous de moins. Si il y a des maux
de gorge, genévrier et menthe, verveine pour aider s’il y a de la température.
Et vous ne m’en avez pas donner, parce que il ne doit pas être mélanger aux
ingrédients secs, mais du miel.
-
Excellent.
Et tu préconises quoi?
-
Une pincée
dans un bol d’eau jusqu’à disparition des symptômes.
-
Quoi
d’autre?
-
Boire
beaucoup d’eau, beaucoup de repos et éviter d’échanger euh… je ne sais pas
comment dire ça… salive et mucus en tout genre.
-
Pas que… de
quoi?
-
Les Filliandriens disent qu’il faut éviter la propagation. Je
ne sais pas si c’est vrai, mais je suis certaine que cela peut aider un
minimum.
-
On ne va
pas isoler nos gens pour couler du nez.
-
Non, ricana
Osiaa’iiwakuna en émiettant de la menthe. Mais
on peut certainement leur demander de ne pas éternuer ou cracher sur les
membres de leur famille.
Atwikan’iinosha hocha de la tête,
l’idée n’était pas si absurde, bien que relativement nouvelle. Elle observa la
jeune fille travailler, ses mains broyant agilement les feuilles de mélisse.
Elle ressemblait tellement à sa mère. Les mêmes taches entourant ses yeux, s’amenuisant
près de son nez. La même façon de froncer les sourcils lorsqu’elle se
concentrait. Elle la vit prendre un
moment, l’enfant en elle s’agitant, poser une main sur ventre en souriant
doucement.
-
Tu sembles
déjà rendue loin dans ta grossesse, même si tu me dis que tu es à trente
semaine.
-
Un peu
plus mais oui, ricana la jeune fille en relevant les yeux vers elle. Caleb est quelque peu… débouté. Il… il ne
sait plus quoi faire de moi.
-
Oh je
doute qu’il s’en plaigne.
-
Non… juste
pour m’agacer.
-
Me
laisserais-tu faire t’examiner?
-
Naturellement,
est-ce que…
-
Je veux
juste m’assurer que tout est correct. Après que nous finissions de faires les
tisanes.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête. Atwikan’iinosha
n’avait pas l’air inquiète, mais tout comme elle semblait trouver son ventre
très développé. Elle était pourtant certaine de la date de conception. Elle
avait prié à la mère et elle connaissait ses cycles. Elle était effrayé quelque
peu, elle voyait mal comment son ventre pouvait bien prendre encore plus
d’expansion.
-
As-tu
appris quelque chose là-bas, demanda Mirabella en brassant le mélange
d’herbes. Font-ils des choses
différemment de nous?
-
Tout, répondit
Osiaa’iiwakuna en riant doucement. Tout…
Ça m’a pris tellement de temps à apprendre à simplement exister. Ils ont
tellement de règles, tellement façon de faire. Juste leurs vêtements, c’était
tellement compliquer pour rien… et leur coiffures… Mère! Désolée!
-
Je ne suis
pas de ces eshamanes qui refusent d’entendre le nom de la Mère en vain.
-
Il ne faut
pas que j’en prenne habitude. Mais tout était tellement horriblement différent.
-
J’ai
entendu dire qu’il vive dans des maison de pierres. Ils vivent sous-terre?
-
Non
aucunement. Ils construisent ces gigantesques bâtiments en entassant des pierres qu’ils coupent en
cubes. Ils les empilent sur un ou deux étages avant d’en faires d’autres en
bois. Le château où la famille à
Caleb vit fait quatre étage de haut! C’est plus haut que certains arbres qu’ils
ont.
-
Comment
arrivent-ils à monter aux étages.
-
Oh… ils
ont des escaliers, c’est comme
petites planches ou des pierres qui permettent de monter aux différents étages.
C’est pratique… Dans notre hutte,
j’aimerais que notre lit à l’étage. Ça prendrait moins de place et je crois… je
crois que ce serait plus chaud.
-
Et ton
enfant? Il ne va pas tomber?
-
C’est pour
ça qu’il faut que je réfléchisse…
-
Et tu
faisais quoi là-bas?
-
Rien… la
plupart du temps, soupira la jeune femme en jetant les derniers morceaux de
gingembre dans le bol de bois. C’était
terriblement ennuyant… Ne le dis pas à Caleb s’il-te-plait! Il le sait déjà,
mais je ne veux pas qu’il l’entende de quelqu’un d’autre. Mais la nourriture
était bonne. Tellement de variété, tellement de chose. Je vais m’en ennuyer…
C’est bien la seule chose.
-
Sa
famille?
-
Sa mère
est adorable, elle m’a tellement aider. Elle m’a appris la langue, elle m’a
appris leur coutumes et à broder… regarde.
Elle lui montra l’oiseau qu’elle avait
brodé sur le bas de sa jupe. Elle était heureuse d’avoir pu ramener du fil et
une aiguille avec elle. Elle n’en avait pas beaucoup, mais elle pourrait au
moins faire quelques points sur la couverture de son enfant. Elle regrettait de
ne pas avoir les même matériaux pour coudre qu’à Pontefort. C’était l’une des
rares choses dont elle s’ennuyait.
-
C’est très
joli, concéda Atwikan’iinosha en caressant les fils du bout des doigts. Dois-je assumée que tu es bonne avec tes
points de sutures?
-
J’ai un
frère, rétorqua la jeune femme. Un
père qui refusait de laisser quiconque défier son autorité et un mari qui aime
prouver qu’il est à la hauteur. Sans me vanter, j’ai eu beaucoup de pratique.
-
J’aimerais
te voir faire la prochaine fois que l’on en a l’occasion, ainsi que les
bandages et l’onguent approprié. Sais-tu comment réparer des fractures?
-
Je l’ai
fait à quelques reprises pour des doigts et un poignet.
-
Comment
gérer une blessure au cou ou au dos?
-
Réduire le
plus possible les mouvements de la personne. La confiner à un repos au lit, à
plat.
-
C’est un
bon début… Accouchement?
-
Quatre
fois, la première fois j’ai assisté ma mère, les autres fois j’ai aidé une sage-femme à Pontefort. Notamment la
femme du frère de Caleb. Je les aie aider avant que nous quittions. Elles ont
été intrigués par mes connaissances.
-
Prends les
pochettes, on va préparer des portions individuelles. Chaque expérience est
importante. En particulier si tu as travaillé avec des gens qui n’avaient pas
ta confiance au premier abord.
Osiaa’iiwakuna ne répondit pas. Atwikan’iinosha
avait raison. Elle termina de répartir la tisane dans les petits sachets et les
referma minutieusement. Elle les remit à l’eshamane qui les rangea dans un sac
pour les distribuer plus tard. Atwikan’iinosha fit signe à la jeune femme de
s’allonger. Elle s’exécuta, remontant sa tunique. Atwikan’iinosha appuya
doucement sur son ventre, palpant et massant doucement. Elle marqua une pose et
retira rapidement ses mains. De la surprise reconnu Osiaa’iiwakuna. Elle se
redressa sur ses coude et dévisagea son ainée.
-
Qu’est-ce
qu’il y a? Qu’est-ce que…
-
Tu… tu en
attends deux, souffla Atwikan’iinosha en tâtant à nouveau. Des wisti’sog.
-
Wisti’sog!
Comment… Es-tu certaine?
-
Oui… oh Osiaa!
C’est merveilleux. Tu peux bien être aussi grosse… deux enfants. Manikaw’opuu est
généreuse avec toi.
-
Je… je ne
peux pas en avoir deux… je ne…
-
Tout va
bien se passer, l’apaisa Atwikan’iinosha en lui caressant les cheveux. Ils ont l’air en bonne santé, très actifs.
Tu es forte. Caleb l’est aussi.
-
Mais… je…
Osiaa’iiwakuna se redressa,
observant son ventre puis Atwikan’iinosha. Deux enfants. Elle peinait encore à
s’imaginer avec un. Elle s’assit avec l’aide de Atwikan’iinosha, replaçant sa
tunique. Elle avait besoin d’un moment pour comprendre l’ampleur de la
situation. Atwikan’iinosha se tourna vers le pot d’argile qui chauffait depuis
un moment, elle versa une tasse d’eau chaude à la jeune femme et y versa un
mélange d’herbes. Elle l’offrit à la jeune femme qui la remercia d’un signe de
tête. Camomille, menthe et genévrier, Atwikan’iinosha désirait la calmer.
-
Ne le dis
pas à Caleb, soupira Osiaa’iiwakuna en relevant les yeux vers elle. Ni à
personne d’autre.
-
Pourquoi
pas? C’est une magnifique nouvelle.
-
Parce que
je veux que ce soit une surprise. Et si quelque chose va mal, je ne veux pas
qu’il soit déçu.
-
Comme tu
veux… D’ici là, je veux que tu te reposes. Tu es enceinte jusqu’au yeux déjà.
Tu es entre de bonnes mains et tu n’as rien à craindre maintenant.
Osiaa’iiwakuna baissa la tête.
Elle n’était pas totalement d’accord. Certes elle était en sécurité dans son
nouveau samaw, avec son oncle en guise de chef, mais Macihaawew rôdait encore
les parages. Elle n’avait pas de maison à elle. Caleb était un nouvel homme au
sein du samaw. Il allait devoir faire exécuter toutes les tâches que les autres
ne désiraient pas faire. Il allait
devoir prendre plus de risque que les autres pour se prouver.
Osiaa’iiwakuna quitta rapidement
par la suite, prétextant de la fatigue. Elle avait surtout besoin d’être seule.
Elle savait que sa belle-soeur allait être sortie et qu’elle aurait la hutte à
elle seule. Elle en avait besoin, elle avait besoin d’avoir un moment pour
elle, pour digérer la nouvelle. Deux enfants. Elle qui avait fait deux fausses
couches. Elle qui n’avait pas été capable de concevoir pendant des mois. Elle
se demandait si elle devait regretter ses offrandes répétées à la Mère ou la
remercier pour cette bénédiction.
Elle se glissa sous le pan de la
porte et alla s’allonger sur son lit. Elle soupira, son souffle saccadé. Elle
se surprenait elle-même d’être si anxieuse. Elle passa ses mains sur son
ventre, tâtant et massant comme elle l’avait appris. Elle avait été si naïve,
si admirative de sa grossesse qu’elle n’avait pas porter attention au signe.
Elle avait été si absorbé par leur fuite, par leur sécurité qu’elle n’avait pas
été alerte à ce qui se passait à l’intérieur d’elle.
Elle tâta le premier bébé, puis
le second qui lui valut un coup de pied. Elle rit doucement, s’excusant de
l’avoir réveillé. Elle continua son observation. Comment avait-elle pu manquer
qu’il s’agissait de deux enfants différents? Elle qui voulait devenir eshamane,
comment avait-elle été si aveugle?
Elle ferma les yeux un instant,
ce n’était pas totalement un mensonge lorsqu’elle avait dit qu’elle était
fatiguée. Elle remonta son hameliriek sur elle, couvrant son ventre. La Mère
avait décider de lui offrir sa bénédiction, elle allait certainement lui offrir
sa protection. Elle caressa le poil de
son hameliriek doucement, suivant la
courbe de son ventre.
Elle se réveilla au contact de
lèvres sur son front. Elle ouvrit les yeux confuse, découvrant Caleb penché
au-dessus d’elle. Elle lui sourit et s’étira, elle ne s’était pas rendu compte
qu’elle s’était endormie. Il l’embrassa doucement, elle lui rendit. Elle était
heureuse de le voir, s’étonnant qu’il soit aussi tard. Elle se redressa sur ses
coudes, découvrant Tlig’gohpa qui avait déjà commencer à cuisiner tranquillement.
Elle n’avait eu aucune idée de sa présence.
-
Bien
dormi, lui demanda Caleb en l’aidant à s’asseoir.
-
Visiblement
oui, répondit-elle. Tlig, tu aurais
dû me réveiller pour que je t’aide.
-
Tu as
besoin de repos, répondit celle-ci en lui faisant signe de la main de ne
pas s’en faire. Je ne fais rien de
compliquer.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas et
se déplaça près du feu. Elle ne voulait pas que la jeune femme fasse tout pour
elle. Déjà qu’elle occupait presque la
moitié de sa maison. Elle n’avait pas besoin d’être un fardeau de plus. Tlig’gohpa
semblait quelque peu triste, gardant la tête basse. Osiaa’iiwakuna se doutait
bien de la raison, elle n’avait pas eu la confirmation tant attendue. Elle lui
prit doucement la main et lui sourit. Le moment viendrait suffisamment
rapidement.
Chapitre 3
Osiaa’iiwakuna accompagna Atwikan’iinosha
dans sa ronde. Elle avait quelques patients à visiter et tenait à ce que la
jeune femme la suive. Cette dernière en était heureuse, elle devait apprendre
les noms, apprendre leurs problèmes et se faire connaître d’eux. Son nom était
sur toutes les lèvres, naturellement. Celle qui était revenue. Celle qui avait
vu les Grandes Plaines. Celle qui avait épouser l’eirezt et qui avait vécus
avec les siens. Celle qui attendait ses jumeaux, bien que seule elle et Atwikan’iinosha
le savait. Elle devait leur montrer qui elle était réellement.
La dernière fois qu’elle avait
fait une tournée, elle était en compagnie de sa mère, la veille de l’attaque.
La raison pour laquelle d’ailleurs elle avait dû aller chercher des herbes le
lendemain. La vieille Amarante ayant besoin de plus de thym et de menthe pour
calmer son mal de gorge. Osiaa’iiwakuna avait toujours douté de la véracité de
son mal de gorge, étant certaine qu’elle désirait une tisane simplement car
elle en appréciait le goût et qu’elle peinait à trouver le thym caché dans les
montagnes.
Elles se glissèrent dans la
première hutte où une vieille dame était étendue dans son lit. Elle était
horriblement maigre réalisa Osiaa’iiwakuna, la peau de sur son visage collant à
son crâne. Ses mains agrippée à son hamelierek étaient pratiquement juste des
os. Elle savait ce qui causait cette situation. Elle savait que la dame
souffrait énormément.
Atwikan’iinosha s’agenouilla près
de la vieille dame, lui prenant une main. Elle lui parla doucement, lentement, prenant
de ses nouvelles et s’assurant qu’elle était confortable. La dame marmonna
quelque chose tout bas, trop bas pour que Osiaa’iiwakuna entende. Atwikan’iinosha
la présenta, faisant signe à Osiaa’iiwakuna d’approcher et de prendre la main
de la dame, nommé Agathe. Osiaa’iiwakuna s’exécuta rapidement, la dame avait
clairement des problèmes de visions.
-
Quelle
jolie jeune fille, dit-elle en lui serrait la main du plus qu’elle le
pouvait. Elle ressemble à sa mère. Et
elle apprends également à être une eshamane.
-
Ma mère, souffla
Osiaa’iiwakuna surprise.
Naturellement qu’Agathe devait
connaître sa mère. Elle était de ce samaw. Elle avait étudier pour être eshamane
avec Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna lui serra la main à son tour, lui assurant
qu’elle ferait tout pour être aussi douée que sa mère. La dame hocha doucement
de la tête. Atwikan’iinosha s’assura de rendre la dame confortable et mis de
l’eau à bouillir. Osiaa’iiwakuna s’assit au sol, ouvrant son sac. Ses soins
n’étaient pas compliqués. Osiaa’iiwakuna avait souvent assisté sa mère avec Amarante.
Elle ce n’était pas une tâche qu’elle aimait particulièrement, mais elle ne
pouvait pas s’y soustraire.
Atwikan’iinosha apporta l’eau
chaude et un linge. Elle s’occupa de laver la dame avec soin. Osiaa’iiwakuna la
regarda faire humblement avant de s’attarder à la tisane que l’eshamane lui
avait demandé de préparer. Elle s’exécuta rapidement, préférant nettement cette
tâche. Elle ne connaissait pas la dame, et déjà qu’elle la voyait nue, elle
n’avait aucunement l’intention d’imposer sa présence à elle encore plus.
Elles quittèrent la hutte
d’Agathe quelques minutes après. Elles avaient d’autres patients à voir. Osiaa’iiwakuna
suivit son ainée à travers le dédale de huttes esquivant les enfants qui
jouaient. Osiaa’iiwakuna sourit doucement lorsque un petit garçon s’enfargea
dans ses propres pieds et s’étala de tout son long. Il se releva sans peine,
continuant sa course vers une fillette quelque peu plus âgée. Cette dernière
était bien plus agile sur ses pieds, sautant au-dessus d’un panier d’osier
comme une simple brindille.
Atwikan’iinosha l’entraina par le
bras loin des deux enfants, vers la hutte la plus isolée près de la forêt. Osiaa’iiwakuna
savait que s’était la hutte de son oncle Normen’itaken’itaken.
-
Mon oncle, demanda Osiaa’iiwakuna en se
tournant vers Atwikan’iinosha.
-
Il s’est brûlé la main hier soir,
répondit-elle en secouant doucement la
tête. Rien d’extraordinaire, mais comme les hommes de ta famille ne sont pas
reconnu pour prendre soin d’eux… J’ai cru bon que nous lui rendions visite.
-
Je ne l’ai pas vue depuis des années, il
n’était pas là au conseil…
-
Oh… Normen’itaken’itaken ne voit plus
l’intérêt d’y aller. La vie politique ne l’a jamais vraiment intéressé en fait
je crois. Lui et Taakligit aiment bien être seuls, tranquilles dans leur coin. Tes
cousins s’occupent de ça maintenant.
-
Je n’ai jamais rencontrer sa femme.
Savent-ils que je suis ici?
-
Je ne sais pas très chère.
Atwikan’iinosha cogna contre le
montant de la porte et entra en s’annonçant, Osiaa’iiwakuna soupira et la
suivit. L’intérieur n’avait rien d’extraordinaire, mais le couple était
visiblement bien installé. Normen’itaken’itaken était assis près du feu,
caressant sa main absentement sa main bandée en regardant sa femme modeler une
assiette en argile. Elle y dessinait de fins motifs floraux avec attention.
-
Comment va la main, Normen’itaken, demanda
Atwikan’iinosha sans même salutation.
-
Si il arrêtait de jouer avec, elle irait
mieux, répondit Taakligit sans lever les yeux de son travail. Qui
est-ce?
-
Osiaa’iiwakuna, répondit la concernée. La
fille de Magwe’ha.
Normen’itaken’itaken tourna la
tête vers elle, incrédule. Il se leva et s’avança vers elle, détaillant son visage
et fit un pas de recul en découvrant son ventre. Elle lui sourit légèrement
posant une main sur son ventre.
-
Osiaa’iiwakuna, s’étonna-t-il en
approchant un peu plus. Je croyais que…
-
C’est une longue histoire, répondit
simplement la jeune femme.
-
Histoire que tu aurais su si tu étais allé au
Conseil il y a quatre jours, dit Atwikan’iinosha en lui faisant signe de
lui montrer sa main. Ta nièce a échappé aux monstres avec l’aide de son
mari.
-
Qui!
-
Caleb, répondit Osiaa’iiwakuna.
-
L’eirezt? L’eirezt d’Ohpanii’toraqm'atname?
-
Oui lui, l’interrompit Osiaa’iiwakuna
agacé qu’il utilise ce terme. Il m’a amené dans son samaw à lui, dans les
plaines. Nous y sommes rester un peu plus de deux ans avant de revenir dans les
montagnes. Le conseil nous a accepté parmi vous il y a quatre jours.
-
Et depuis quand… depuis quand êtes-vous
marié? Maddduch n’aurait jamais…
-
Non, nous nous sommes marié parmi ses gens.
-
Volontairement?
-
C’est assez Normen’itaken’itaken, si tu
voulais savoir l’histoire, tu devais aller au conseil, intervint Atwikan’iinosha
en lui faisant signe de s’asseoir. On est ici pour jeter un coup d’œil à ta
main.
-
Ma nièce est mariée à un eirezt, enceinte et
je dois…
-
Aurais-tu mieux aimé qu’elle épouse Macihaawew,
demanda Taakligit toujours aussi attentive à son art.
Violette observa sa tante. Elle
avait de long cheveux grisonnant lousse. Sa concentration et sa minutie ne
s’altéraient guère lorsqu’elle parlait. Normen’itaken’itaken grogna en prenant
place. Osiaa’iiwakuna ne pouvait qu’apprécier l’interjection de sa tante. De ce
qu’elle avait compris des dernier jours, Macihaawew ne semblait pas
particulièrement apprécié du samaw. Osiaa’iiwakuna comprenait le désarrois de
son oncle, elle le voyait constamment dans les membres du samaw. Ils étaient
tous tout aussi confus de la voir marié à un étranger. Elle savait cependant
que ce moment allait passer, que Caleb allait faire ses preuves. D’autant plus
qu’en tant qu’eshamane, elle allait aider à changer cette perception.
-
Et tu es heureuse d’être sa femme, demanda Normen’itaken’itaken
après un moment de silence.
-
Normen’itaken’itaken, soupira Atwikan’iinosha.
-
C’est une question honnête, se
défendit-il.
-
J’en suis très heureuse, répondit-elle en
observant la brûlure. Comment? Comment as-tu réussi à faire ça?
-
En se mettant la main dans le four sans
protection, répondit Taakligit platement. Pour récupérer la laideur
qu’il avait fait. Je lui ai mis un bandage mais…
-
Tu as bien fait de me demander de passer, intervint
Atwikan’iinosha en se tournant vers sa collègue. Osiaa’iiwakuna, tu sais
quoi faire?
-
Osiaa, s’étonna Normen’itaken’itaken.
-
Ta nièce désire poursuivre dans les pas de ta
sœur. Elle a besoin de se pratiquer.
Normen’itaken’itaken soupira et
tendit la main vers sa nièce. Elle la prit avec délicatesse et observa la
brulure. Elle était sévère à l’intérieur de la paume. Il avait visiblement
attraper le morceau d’argile à main nue. Elle la lâcha et ouvrit son sac,
cherchant à la pommade qu’elle y avait mis plus tôt. La plaie était heureusement
nettoyé en bonne partie. Taakligit l’avait certainement fait sous les
recommandation de Atwikan’iinosha.
-
J’ai peur qu’il y ait de la nécrose qui se
forme, dit Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha. J’appliquerais
de la pommade, mais je suggèrerai de faire des visites quotidienne pour
prévenir.
-
De la quoi, demanda Normen’itaken’itaken.
-
Que la peau qui a été gravement endommagée
devienne noire et meurt, expliqua Osiaa’iiwakuna plus rapidement que l’eshamane
en lui montrant la section a risque. Nous pouvons prévenir son apparition,
mais si cela se produit, nous n’aurons pas le choix de retirer ce qui est mort
afin d’éviter que cela se propage. Tu comprends?
-
Je crois, répondit-il.
-
Je n’aurais pas pu dire mieux, soutint Atwikan’iinosha.
Et oui, je suis d’accord avec toi. Nous allons devoir garde un œil sur cette
main. Je n’aime pas cette partie ici… Tu peux appliquer l’onguent. Tu vas nous
voir souvent au courant des prochains jours… Des conseils pour la suite?
-
Ne pas la mouillée tout d’abord… éviter la
chaleur et éviter tout exercices la stimulant trop. De toutes façons, je me
doute qu’avec la douleur, ce sera facile. Le baume que je suis en train
d’appliquer aidera avec la cicatrisation ainsi qu’avec la douleur, mais il ne
fera pas de miracle. Il faudra être patient.
Elle jeta un coup d’œil à Atwikan’iinosha
qui hocha doucement la tête. Elle n’avait rien à ajouter. La jeune femme
continua avec le bandage, s’assurant que l’homme était confortable avec la
pression. Elle le termina et laissa son ainée l’examiner. Cette dernière n’y
changea rien et remit un sachet de tisane à Taakligit qui lui fit signe de
poser près d’elle, toujours absorbé par son art. Atwikan’iinosha ordonna une
dernière fois à Normen’itaken’itaken de faire attention à sa main en se
relevant, avant d’aider Osiaa’iiwakuna à en faire autant.
-
Osiaa’iiwakuna, l’appela Normen’itaken’itaken
lorsqu’elle s’apprêterait à sortir.
-
Oui?
-
Ta mère serait fière de toi.
Osiaa’iiwakuna hocha doucement de
la tête. Elle ne savait pas quoi réponde. Il l’avait vue à peine quelque
minutes, comment pouvait-il en être aussi certain. Elle suivit Atwikan’iinosha
à l’extérieur, confuse. Elle suivit Atwikan’iinosha pour ses prochaines
visites, mais sa tête n’y était pas. Elle était encore perturbée par sa
rencontre avec son oncle. Atwikan’iinosha sembla comprendre son absence et ne
fit aucun commentaire, la remerciant pour ses services à la fin de la journée,
l’escortant jusqu’à la hutte de Saapamiikt. Osiaa’iiwakuna la remercia, lui
remettant son sac, mais l’eshamane lui proposa de le garder.
Osiaa’iiwakuna rentra en
soupirant, trouvant Tlig’gohpa en plein atelier de couture. Les hommes n’était
pas encore rentré à sa déception. Elle désirait parler à son mari. Elle avait
besoin de son écoute, et de ses conseils. Tlig’gohpa la salua sans relever la
tête, elle était concentrée sur son ouvrage. Elle reprisait le manteau de Saapamiikt.
Ce dernier l’avait déchiré en luttant avec Noreck au découragement de sa femme
qui deux semaines à peine auparavant l’avait réparé.
Osiaa’iiwakuna s’installa en face
d’elle, inspectant le contenue du sac.. Son attention avait entièrement été
diriger sur ce qu’Agathe et Normen’itaken’itaken lui avait dit. Depuis
l’attaque, elle avait souvent penser à sa mère, mais jamais autant que durant
ces derniers jours. Elle était enceinte de deux enfants, sans maison. Les
derniers mois avaient été chaotiques et elle était soulagée qu’ils s’en soient
sortis sains et saufs, qu’ils soient en sécurité avec le samaw, mais elle était
horriblement seule. Elle n’avait pas sa mère pour l’aider, elle n’était pas là
pour la réconforter, pour lui dire à quelle point elle était fière d’elle, pour
lui dire que tout allait bien aller. Elle avait besoin d’entendre ses choses.
Elle avait besoin d’être prises dans ses bras et de se faire réassurer.
Caleb passa sous le pan de la
porte et salua les deux jeunes femmes. Osiaa’iiwakuna releva la tête vers lui, essuyant
sa joue. Elle n’avait pas remarqué qu’elle pleurait jusqu’à ce qu’il entre.
-
Tout va bien, Kuna, lui demanda-t-il en
venant s’agenouiller près d’elle. Kuna, dis-moi.
-
Je m’ennuie…
de ma mère, articula-t-elle difficilement.
-
Oh, s’adoucissa-t-il en la serrant
contre lui.
-
Elle ne sera pas là lorsque les… lorsque je
vais accoucher, explosa-t-elle en sanglots. Qui est-ce qui … qui restera
à mes côtés pour m’aider? Je n’ai pas personne.
-
Tu m’as moi, lui dit-il en essayant de la
calmer.
-
C’est pas pareille! J’ai besoin de quelqu’un
qui a déjà vécu ça . J’ai besoin… j’ai besoin de… de ma mère. Tout le monde ici
n’arrête pas de me dire à quel point je lui ressemble… je ne… je ne sais même
pas… je ne sais même pas si je lui ressemble. Je ne suis même plus… je ne suis
même plus certaine à quoi elle ressemble. Ça fait trois ans, Caleb… trois ans…
Je ne sais même pas si elle est encore en vie! J’ai besoin d’elle.
-
Tu n’as pas besoin d’elle, Kuna, lui
dit-il doucement en lui caressant les cheveux. Tu es forte. Tu es capable de
bien plus que ce que tu penses. Tout vas bien aller.
-
On a pas de maison Caleb, répliqua-t-elle
en se tournant rapidement vers lui. On a rien à nous.
-
Kuna… faut que tu me laisse le temps de nous
construire ça. J’ai commencé à…
-
Je n’ai pas le temps de te laisser le temps.
-
Je te promets. Je vais nous avoir quelque
chose d’habitable… Toi et notre enfant allez être en sécurité.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas,
continuant de pleurer contre le torse de son mari. Il la serra contre lui. Il
comprenait sa détresse, il comprenait son angoisse, mais il ne comprenait pas
pourquoi aujourd’hui tous remontaient à la surface. Il jeta un coup d’œil à Tlig’gohpa
qui avait pris une pause dans son travail. Elle était visiblement intriguée du
débordement d’émotion de sa belle-sœur. Elle repoussa le manteau et se dirigea
vers eux. Elle caressa le dos de Osiaa’iiwakuna doucement en lui affirmant
qu’elle ne serait pas seule.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête
doucement, essuyant ses joues. Elle ne voulait pas que Caleb la relâche, pas
encore. Elle avait besoin d’être dans ses bras encore un moment. Elle le sentit
échangé un regard avec Tlig’gohpa, certainement désireux d’avoir un peu plus
d’information au sujet de cette crise de larmes.
-
Je pensais que tu passais la journée avec Atwikan’iinosha,
lui dit-il en la repoussant doucement. Ça n’a pas bien été?
-
Oui, soupira Osiaa’iiwakuna en essuyant
ses yeux. Enfin… tout le monde… tout le monde dit que je ressemble à ma mère,
mais….
-
Tu lui ressembles. Beaucoup.
-
Mais… mais je ne, marmonna-t-elle en
recommençant à pleurer.
Elle n’était pas capable
d’articuler ses émotions. Elle n’était pas capable d’exprimer que s’être fait
comparer à sa mère toute la journée avait été horriblement difficile. Elle se
contenta de secouer la tête, caressant son ventre au passages. Ses bébés
étaient actifs, elle les sentaient s’agiter en ce moment. Caleb remarqua le
geste et posa également sa main sur son ventre, souriant doucement.
-
Il est bien en forme, dit-il en lui souriant.
-
Toute la journée, répondit-elle avec un léger
soupire. Je ne sais pas pourquoi aujourd’hui… pour me donner encore plus de
peine avec ce que je devais faire.
-
Je suis sur que tu as été très bien, plus
même. Tu es une excellente eshamane.
-
Je ne le suis pas encore…
-
Tu es une excellente apprentie eshamane, se
reprit-il en riant doucement.
Elle hocha de la tête. Il lui
essuya la joue en la faisant sourire doucement. Elle repoussa le sac qui était
encore sur ses genoux, et prit celui de son mari. Il avait trouvé un lapin
qu’il avait déjà dépecé. Elle prit un moment à observer la bête. C’était un bon
lapin adulte, assez gros pour eux quatre pour la soirée. Elle le remercia et
entama le repas. Cela lui donnait une raison de penser à autre chose. Tlig’gohpa
l’aida, préparant des diverses racines et les quelques baies qu’ils leur
restaient.
-
As-tu vu Saapamiikt, demanda Tlig’gohpa à
l’adresse de Caleb.
-
Pas depuis ce matin, répondit celui-ci en
prenant l’outre afin d’aller la remplir. Besoin d’autre chose, que de l’eau?
Et je pense qu’il devait parler à Nopokemi’aatna… mais je ne suis pas certain.
-
Nopokemi’aatna, s’étonna-t-elle. Il ne
m’a pas parler de rien. À moins que ce soit pour la rotation?
Caleb haussa les épaules et se
glissa sous le battant de la porte. Tlig’gohpa se tourna vers sa belle-sœur.
Ses yeux étaient encore rouges et gonflés. La jeune femme hésita à essayer de
la réconforter, elle semblait avoir besoin d’être laissée en paix pour le
moment. Elle l’aida en silence, préférant que Osiaa’iiwakuna amorce la
conversation. Elle n’était pas quelqu’un qui était particulièrement confortable
dans les silences. Elle avait grandi avec trois frères et sœurs, elle aimait
l’activité, le mouvement et bien qu’elle trouvait qu’il manquait d’intimité
avec Saapamiikt depuis leur arrivé, elle aimait le va et vient.
Caleb revint rapidement, trouvant
les jeunes femmes dans le même silence qu’il les avaient laissé. Il passa l’eau
à Tlig’gohpa. Il retourna prendre place près de sa femme en lui imposant sa
présence. Il savait que lorsqu’elle était triste ou anxieuse, elle avait besoin
de le sentir près d’elle. Il lui caressa doucement le dos, la regardant
décortiqué le lapin cru et le mettre à rôtir en morceaux sur la pierre. Elle le
faisait avec tant d’aisance, malgré les années passées à Pontefort.
Saapamiikt revint peu avant le
coucher du soleil, après qu’ils eurent souper. Il s’excusa rapidement auprès de
sa femme, l’embrassant doucement en venant prendre place près du feu. Elle lui
reprocha son retard, lui demandant de l’aviser la prochaine fois et lui força
son assiette entre les mains. Il s’excusa à nouveau, le lui promettant, mais
expliqua rapidement qu’il était allé discuter avec Nopokemi’aatna pour la
vigie.
-
Je lui ai dit que j’étais disponible pour la
prochaine ronde, dit-il en savourant le lapin.
-
La prochaine, demanda Tlig’gohpa
perplexe. Celle qui commence à la pleine lune? Pourquoi?
-
Parce que si je n’y vais pas à celle-ci, ça…
ça va nuire pour la suite des choses, si tu vois ce que je veux dire.
-
Je… quoi? Oh!
Osiaa’iiwakuna n’avait pas manqué
la conversation. Visiblement si Tlig’gohpa sentait de la pression pour produire
un enfant, Saapamiikt n’aidait en rien. Elle se doutait que de la voir dans cet
état ne faisait qu’encourager son désir. Elle jeta un coup d’œil à Caleb qui ne
semblait pas comprendre la discussion, puisqu’il enchaina.
-
Je croyais que je devais faire la prochaine
ronde, intervint-il.
-
De quoi tu devais faire la prochaine ronde, s’étonna
Osiaa’iiwakuna en se tournant vers lui. Je suis enceinte de huit lune et tu
pensais te sauver dans le bois!
-
Je pensais y aller avant que tu accouches
oui. Préfères-tu que je partes lorsque tu auras accouché? Saapamiikt, j’avais
pris l’arrangement avec Nopokemi.
-
Je sais, mais ce ne serait pas ta vigie, dit-il
entre deux bouchées. Celle a Nurzt.
-
Et elles resteraient seules? Kuna a besoin…
-
Ne me prends pas pour excuse!
-
Je ne veux pas que tu restes seule ici avec Macihaawew.
Je n’aie pas confiance en lui. Et je sais que tu veux ta hutte le plus rapidement
possible. Je sais, mais je ne crois pas qu’il y aie un meilleur moment.
-
Et tu penses être revenu pour…
-
Je pense que de toutes façons, je ne serai
pas avec toi à ce moment. Tu vas être avec Atwikan’iinosha et les ainées, elles
vont certainement pouvoir t’épauler le temps que je revienne. Et j’aime mieux
te savoir en sécurité, au chaud.
-
Donc tu es en train de me dire que tu ne construiras
pas notre hutte!
-
Non je suis en train de dire, que même si
elle est construite, elle ne sera pas assez avancée pour avoir un nouveau-né.
J’ai besoin de temps pour faire les choses proprement et tu as besoin de calme
et te préparer la tête reposer et…
-
Je serais plus reposée et calme si j’avais ma
propre maison, répliqua-t-elle sèchement en filliandrien. Je ne veux pas avoir
mon enfant chez mon frère!
-
Et je ne veux pas que l’on se précipite et que
tu gèles ou notre enfant. Et Saapamiikt ne s’en plaint pas…
-
Je m’en plains, riposta-t-elle. Et s’ils ne s’en
plaignent pas, c’est parce que c’est contraire à nos principes. Je suis sa
famille, il ne peut pas me jeter dehors.
-
Kuna, je ne peux pas te faire plaisir et faire
plaisir à ton oncle en même temps en ce moment. Et comme on vient de se faire accepter
au sein de son samaw, je ne pouvais pas dire non à faire une ronde dans les
prochains mois. En échange, il va me trouver de l’aide pour la hutte. Je ne
sais comment faire autrement.
Osiaa’iiwakuna soupira et se
renfrogna. Elle se leva et se dirigea vers leur lit, refusant de poursuivre la
conversation. Elle n’en avait pas la force. Elle avait eu une longue et
difficile journée elle n’avait pas besoin d’ajouter une confrontation avec
Caleb à la liste. Elle entendit Caleb soupirer et les buches bouger. Tlig’gohpa
et Saapamiikt argumentaient toujours à voix basse. Elle sentit Caleb venir
s’installer près d’elle, mais il ne se glissa pas sous l’hameliriek. Il avait pris
l’habitude de faire ainsi lorsqu’ils se disputaient.
Toutefois, maintenant qu’ils
étaient quelque peu éloignés du feu, Osiaa’iiwakuna frissonnait. Même son
hameliriek n’était pas assez chaud en cette nuit froide. Elle était trop fière
cependant pour demander à Caleb de se rapprocher. Ce dernier la sentie grelotter. Il se glissa sous l’épaisse fourrure, la
serrant contre lui. Elle glissa ses doigts entre les siens, ramenant sa main
sur son ventre. Malgré toutes ses angoisses, elle ne pouvait rien demander de
plus de Caleb que d’être près d’elle lorsqu’elle avait froid. Il lui murmura
doucement qu’il l’aimait en filliandrien l’embrassant dans le cou. Osiaa’iiwakuna
n’en doutait pas.
Chapitre 3
Caleb descendit le long de la
corniche, cherchant les traces d’un cerf ou d’une autre proie. Il n’avait pas
été chanceux dans les derniers jours. Toutes les bêtes de la région semblaient
s’être volatilisées. Il se glissa silencieusement entre deux rochers, faisant
attention que son arc ne cogne pas contre eux. L’absence de proie de bonne
dimension commençait à l’inquiété comme il quittait dans quelque jours. Osiaa’iiwakuna
devait pouvoir se sustenter en attendant son retour. Il était d’autant plus
anxieux que Saapamiikt allait également être absent.
Passant près d’un ruisseau, il
s’arrêta boire un instant, savourant l’eau cristalline et fraiche. Elle n’était
pas encore glaciale, l’hiver ne faisait que commencer. Les arbres possédaient
encore quelques feuilles orangées et la neige ne recouvrait pas encore les
conifères. Bientôt, le ruisseau ne serait plus qu’une ligne sinueuse de glace
et la forêt s’endormirait. Les bruissement du vent dans les arbres se tairait
jusqu’au printemps, laissant place à un mutisme impeccable ou à de violentes
rafales au sifflement aigues lors des tempêtes. Les crépitements et clapotis de
la pluie avaient déjà fait place au flocon silencieux, tombant lâchement en
dansant au gré du vent jusqu’au sol.
Il soupira de soulagement
lorsqu’il trouva finalement la piste d’un cerf. Ce n’était pas un gros animal,
de ce qu’il lisait au sol, à peine un an certainement. Il suivit la piste
rapidement. Elle était fraiche, il était passé par là à peine quelques heures
auparavant. Il s’assurait également de prendre des repères visuel, n’était pas
encore accoutumé à cette forêt. La dernière chose qu’il voulait était de se
perdre pour un cerf.
Il trouva finalement la bête qui broutait
tranquillement dans la clairière. Il était jeune comme Caleb avait lu dans ses
traces, mais bien assez gros pour que Osiaa’iiwakuna puisse s’alimenter
convenablement, en plus de Tlig’gohpa au besoin pour la prochaine lune. Il
n’allait pas non plus prendre le risque de le laisser partir, la chance n’était
pas de son côté depuis quelques jours.
Il banda son arc, relâcha et à sa
propre surprise, atteint la bête à travers l’œil. Il n’avait jamais
particulièrement eu un bon visou. La bête s’écroula au sol dans un bruit mat. Morte
sur le coup, sans souffrance, sans même avoir eu le temps d’être surprise. Il
s’en approcha, inspectant sa prise. Osiaa’iiwakuna allait être heureuse. Elle
allait pouvoir avoir l’esprit tranquille et lui aussi. Il ne lui avait jamais
ramener un aussi gros butin, réalisa-t-il. Un cerf avait toujours été considéré
plus inconvénient lors de leur exode.
Il passa le cerf au-dessus de ses
épaules et reprit le chemin du village. Maintenant qu’il n’avait plus besoin de
crapahuter discrètement, il avançait bien plus vite, reprenant ses propres pas
pour revenir. La fine neige lui offrait la meilleure des cartes. Il s’étonna
rapidement de voir à quel point il s’était aventuré loin du village. Le temps
s’était évaporer dans sa traque.
Il regagna finalement le village,
le trajet de retour lui ayant semblé interminable. Il croisa Nopokemi’aatna qui
fut le félicita pour sa proie. Certes
par habitude, n’importe qui d’autre aurait eu les mêmes félicitations, mais
Caleb était heureux d’avoir le même traitement que les autres. Pendant des
années il avait fait de son mieux pour se faire accepter. Comme peu d’entre-eux
l’avaient vue se démener pour comprendre les bases de leur société son
intégration passait mieux au sein du samaw de Nopokemi’aatna.
Il arriva à la hutte et laissa
choir la bête dans un bruit mat au sol. Il appela Osiaa’iiwakuna, mais elle ne
se trouvait pas à l’intérieur. Il soupira, quelque peu déçu de ne pas pouvoir
se vanter quelque peu. Il se doutait qu’elle devait accompagnée Atwikan’iinosha.
Décidé à la trouver, il poussa le cerf à l’intérieur, le mettant à l’abris du vent
et des animaux, ainsi que des autres. Il avait déjà entendu des rumeurs
concernant des vols de butins, bien qu’il ne les croyait pas vraiment. Les pawakenakie’ii
n’avaient pas l’habitude de voler.
Il arpenta les ruelles entre les
huttes, cherchant à entendre sa femme. Il croisa Saapamiikt qui lui indiqua la
hutte de son oncle. Caleb le remercia et s’y rendit. Il attendit patiemment à
l’extérieur, prenant un gorgée d’eau de son outre. Atwikan’iinosha sortie en
premier, le salua. Osiaa’iiwakuna fut surprise de voir son mari de retour de sa
chasse aussi rapidement et l’enlaça, plaquant sa tête contre son torse.
-
J’ai un cerf pour toi, lui annonça-t-il
triomphant.
-
Un cerf, s’étonna-t-elle en se reculant
quelque peu. Tu ne m’as jamais ramener de cerfs. Il est gros?
-
Assez pour que toi et Tlig vous puissiez en
échanger avec d’autres gens pour ce dont tu aurais besoin. Je l’ai laissé à la
hutte.
-
L’as-tu saigné?
-
Naturellement, pourquoi?
-
Hum… j’aurais utilisé son sang, mais ce n’est
pas grave. Une autre fois.
-
Es-tu libre, demanda-t-il en jetant un
coup d’œil à Atwikan’iinosha qui patientait non loin. Est-ce qu’elle encore
à besoin de toi?
-
Pour un moment encore. Je te rejoins ensuite
d’accord?
Caleb l’embrassa doucement. Il la
regarda quitter avec l’eshamane et soupira doucement. À peine étaient-elles hors
de vue que Normen’itaken’itaken se tira de sous le pan de la porte, inspectant
les environs.
-
Elles sont parties, demanda-t-il en se
tournant vers Caleb.
-
Parties vers là-bas, répondit Caleb en
désignant l’endroit où Osiaa’iiwakuna avait disparu d’un signe de tête.
-
Je ne supporte plus de les voir… enfin…
-
Osiaa peut avoir son penchant autoritaire,
confirma Caleb en riant doucement.. Brulure?
-
Hum, grommela l’homme en frottant le
bandage.
-
Nous n’avons pas eu l’occasion de nous
présenter. Caleb.
-
Normen’itaken’itaken. Je suis l’oncle d’Osiaa.
-
Je sais… Elle m’en a glisser mot.
-
La tradition voudrait que je te remercie
d’avoir pris soin d’elle… compte tenu des circonstances…
-
Je comprends que c’est quelque peu…
inattendu.
-
Pour dire le moins. J’imagine que comme mon
frère vous a autorisé à rester, une hutte est dans les plan.
-
Dès mon retour de vigie, assura Caleb en
soupirant légèrement. Nous n’avons pas suffisamment de matériel pour le
moment de toute façon et dans la condition de Osiaa… j’ai jugé mieux qu’elle
soit au chaud et en sécurité pendant mon absence.
-
Une décision raisonnable.
Caleb hocha de la tête. Il ne
savait pas quoi dire, tout n’était que banalités d’usure. Il salua l’homme, ne
désirant pas étirer cette conversation et se dirigea vers le centre du village.
Il n’eut que quelques pas à faire que la voix de Osiaa’iiwakuna lui parvint. Il
ne comprenait pas vraiment ce qu’elle lui disait, mais elle était en colère. Il
pressa le pas. Sa femme n’avait pas l’habitude de lever le ton sauf sous
provocation.
Il les trouva rapidement, Atwikan’iinosha
et Osiaa’iiwakuna en présence d’Macihaawew. Il maintenait Osiaa’iiwakuna par le
bras, l’empêchant de se sauver. Elle lui ordonna de la lâcher, mais in
n’obtempéra pas jusqu’à ce qu’Atwikan’iinosha intervienne. Caleb pressa le pas
et vient le rejoindre, se plaçant entre les deux femmes et l’homme. Ce dernier
le regarda avec dédain, rage. Osiaa’iiwakuna étira son bras vers Caleb et
essaya de le faire reculer. Là n’était pas le moment. Caleb lui jeta un bref
coup d’œil.
-
Va avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en
Filliandrien. Maintenant.
-
Caleb… ne… Attend que les autres arrivent.
-
Kuna, va avec Atwikan’iinosha. Ne t’occupes pas
de moi.
-
Qu’est-ce que tu dis, beugla Macihaawew
encore plus furieux qu’ils discutent sans qu’il comprenne.
Wihkiskwa, appela Atwikan’iinosha en se tournant vers une jeune femme
passant près. Va chercher Nopokemi’aatna et les autres. Vite. Maintenant!
-
Atwikan’iinosha, vas-y, lui dit Osiaa’iiwakuna.
Tu sais toujours où tout le monde est. Va les chercher!
-
Hors de question, je reste avec vous. Recule.
-
Écoute, Atwikan’iinosha!
-
Caleb, l’implora Osiaa’iiwakuna en
essayant de se rapprocher de lui malgré la main de l’eshamane sur son bras.
-
Reste avec Atwikan’iinosha, rugit-il sévèrement
sans se retourner. Recule!
Osiaa’iiwakuna figea un instant,
il n’avait jamais été aussi sèche avec elle. Atwikan’iinosha la tira par le
bras documents, la faisant reculer avec elle. Macihaawew fit un pas vers elle,
mais Caleb se plaça instantanément sur son chemin. Il n’allait pas le laisser
la toucher. Macihaawew grogna et essaya de frapper Caleb qui esquiva
habilement. Atwikan’iinosha fit reculer Osiaa’iiwakuna un peu plus. La
situation était explosive et la jeune femme beaucoup trop enceinte pour être
coincée entre deux lutteurs.
Osiaa’iiwakuna se tourna vers son
ainée. Elle était inquiète. Caleb n’avait pas lutté depuis des mois, sauf avec
son frère et il s’agissait plus de passes d’échauffement. À Pontefort, il avait
beau avoir entrainé des soldats, ils étaient loin de la forme que les hommes du
samaw avaient. Macihaawew n’avait jamais particulièrement été rapide et agile,
mais il était massif, beaucoup plus imposant que lui. Elle craignait ce que le
moindre coup de poing, le moindre placage pouvait causer chez Caleb.
Nopokemi’aatna arriva rapidement
en compagnie de Meiren’aatok et de Makoswii. Osiaa’iiwakuna laissa échappée un
soupire anxieux. Makoswii était visiblement également hors de ses gonds. Nopokemi’aatna
vint près de Osiaa’iiwakuna la faisant reculer un peu plus. Elle obtempéra, ne
voulant pas que son inquiétude transparaisse. Elle ne devait pas leur donner
raison de penser qu’elle croyait que Caleb était plus faible que Macihaawew.
Pas après qu’ils aient tous deux affirmé qu’il l’avait emporter sur lui.
-
Tu l’as mis enceinte, eirezt, lança Macihaawew
à Caleb. Salopard, elle n’était pas à toi.
-
Elle n’était pas à toi non plus, rétorqua
Caleb.
-
Tu l’as volée!
-
Volée! Elle n’est pas un objet, gros con. Je
ne l’ai pas enlevé non plus.
-
Elle n’est pas tienne!
Macihaawew s’élança, mais Caleb
fut plus rapide esquivant le coup et lui en assainissant un en retour qui
fendit l’arcade sourcilière. Les
premières gouttes de sang se rependirent sur la neige fraiche. Osiaa’iiwakuna
soupira de soulagement. C’était un bon présage. Macihaawew grogna et se
retourna vivement, portant une main à son visage. Il essuya son sourcil
visiblement surpris qu’il saignait de la sorte.
Il contrattaqua rapidement, mais
Caleb le prit d’avance et le plaqua vivement au sol. Il lui assena deux coup de
poing et le relâcha. Il n’allait pas être accusé de triche, il allait le battre
en bonne et due forme. Il allait prouver qu’il était digne de sa femme. Il jeta
un bref coup d’œil à celle-ci qui hocha doucement de la tête en signe
d’encouragement. Macihaawew fonça vers lui sans grande surprise. Caleb
l’enfargea et il s’allongea de tout son long au sol dans un rire étouffé de la
foule qui s’était assemblée.
Osiaa’iiwakuna ne riait pas.
L’attention de la foule n’allait qu’accentué la colère d’Macihaawew. Elle
l’avait déjà vue agir ainsi, foncé aveuglement sur son adversaire, donner des
coups dans le vent. Elle avait vue également comment son adversaire avait fini.
Il avait l’air fou au départ, mais rapidement sa fureur devenait une boule de
puissance et de rage. Elle espérait simplement que Caleb se souvenait comme Devorch
avait fini.
Caleb le plaqua vivement au sol à
nouveau. Il recula rapidement. Il avait de la chance pour le moment. Macihaawew
avait déjà deux profondes coupures aux arcades sourcilières et une lèvre
fendue, mais il ne démordrait pas pour aussi peu. Comme de fait, il s’élança
vers Caleb qui ne réussit pas éviter, recevant le poing de son adversaire dans
les côtes. Le coup était bien plus puissant qu’il l’avait anticipé, lui coupant
le souffle et le faisant chanceler. Il n’avait pas reçu une telle décharge
depuis plus de deux ans. Sa surprise le ralenti, offrant la chance à Macihaawew
de frapper à nouveau, cette fois à la tête.
Osiaa’iiwakuna retint un
gémissement. Elle n’aimait pas la situation. Elle n’avait jamais eu à endurer
cette situation encore. À Pontefort, il était de loin le meilleur. Il avait battu
son frère déjà, mais il était grandement affaibli lors de leur match. En ce
moment, Macihaawew était au maximum de sa force et au maximum de sa rage. Caleb
n’avait plus l’habitude d’esquiver les coups, ni le réflexe de croire qu’ils pouvaient
lui être dommageable. Il réussit à esquiver le coup suivant, assène un en
retour qui fit chanceler Macihaawew. Caleb recula rapidement, préférant mettre
un peu plus de distance entre lui et son adversaire. Macihaawew se retint de
charger un moment, crachant du sang au sol.
Osiaa’iiwakuna était heureuse que
Caleb ne soit pas dans le même état. Elle était anxieuse tout de même. Le
moindre faux pas, la moindre inattention et il pourrait se retrouver au sol. Macihaawew
n’était pas un lutteur aussi galant que Caleb, il n’hésiterait pas à frapper
encore et encore. À de nombreuse reprises, les ainées avaient dû intervenir
pour le séparer de son opposant.
Caleb fut le premier des deux à
s’élancer. Il feinta habilement, portant son adversaire à esquiver vers la
gauche. Profitant de son débalancement, Caleb le frappa vivement au visage, le
projetant au sol pour la troisième fois. Il fut cependant entrainer dans la
chute, Macihaawew s’étant accroché à son manteau. Il roula habilement loin de son
adversaire et se releva d’un bond. Il préférait être sur ses pieds où il était
plus rapide et plus agile.
Toutefois, le pawakenakie’ii
l’enfargea le fit tombé violement sur le dos, lui coupant le souffle. Il essaya
de rouler à nouveau loin de son opposant, mais ce dernier gagna sur lui, lui
assena trois coup à la tête. Caleb vit des étoiles. Il parvint cependant à
éviter le quatrième, repoussant Macihaawew au sol. Il prit le dessus, laissant
tomber ses gants blancs. Il plaqua vivement son adversaire, un craquement sec
lui faisant comprendre qu’il lui avait brisé quelque chose.
Il le frappa, encore et encore, le maintenant
sous lui du mieux qu’il le pouvait. Il cessa lorsqu’il vit Macihaawew avoir de
la difficulté à garder contact avec la réalité. Il se releva essuya son arcade sourcilière
du revers de la main.
Macihaawew peinait à se
redresser, si bien que Nopokemi’aatna s’interposa, faisant reculer Caleb. Ce
dernier jeta un coup d’œil à Osiaa’iiwakuna. Elle était soulagée. Elle se
rapprocha de son mari, mais il lui fit signe d’attendre. Il ne voulait pas
qu’elle s’approche de Macihaawew, pas encore. Nopokemi’aatna fit s’agenouiller Macihaawew
comme le voulait la tradition et proclama Caleb vainqueur sous les
applaudissements et les encouragements de bedeaux.
Caleb laissa échapper un soupir
de soulagement et se rapprocha de sa femme qui s’élança vers lui. Elle ne
pouvait plus contenir ses émotions et maintenir un semblant de décontraction.
Elle se lova dans ses bras, retenant ses larmes de peine et de misère. Elle
avait eu si peur. Caleb l’embrassa doucement, tâchant de ne pas répandre son
sang sur elle. Elle lui effleura l’entre-jambe, lui murmurant à quel point elle
était fière de lui. Il lui retourna l’affection, conscient qu’ils étaient épié
de tous. Osiaa’iiwakuna lui sourit.
Toutefois, Caleb la poussa
vivement loin de lui. Elle heurta le sol avec force, sa respiration coupée.
Sous le choc, elle porta instinctivement une main à son ventre. Sa confusion
était totale. Elle entendit Atwikan’iinosha lancer des ordres, Nopokemi’aatna
en faire autant, mais elle ne comprenait pas ce qu’ils disaient. Elle entendait
la commotion autour d’elle, mais sa tête tournait. Elle avait dû la heurter au
sol. Elle tâcha de se relever, mais une douleur intense transperça son poignet
gauche. Elle vit Taakligit arrivée en courant vers elle. Sa
tante s’agenouilla au sol et l’aida à se redresser.
-
Osiaa, demanda-t-elle doucement en
l’aidant à s’asseoir. Tu vas bien?
-
Je crois, répondit-elle en portant à
nouveau une main sur son ventre. Caleb? Il… Je ne…
Elle se tourna vers lui. Son cœur
arrêta de battre un moment. Seul le manche du poignard dépassait du cou de son
mari retenu au sol par Nopokemi’aatna et Meiren’aatok. Toute la douleur et
toute la confusion s’évaporèrent de la
conscience de la jeune femme qui se précipita vers son mari. Elle s’agenouilla
près de lui, appliquant ses mains autour de la plaie et supplia sa tante
d’aller lui chercher sa trousse qu’elle avait laissé au sol quelque mètres plus
loin.
-
Kuna, réussit Caleb à articuler essayant de se
libérer de l’emprise de Meiren’aatok.
-
Ne bouge pas, lui ordonna-t-elle entre deux
sanglots. Ne bouge surtout pas!
-
Kuna, je…
-
Tu me diras plus tard, refusa-t-elle d’entendre.
Il perdait beaucoup trop de sang.
La lame avait dû endommager la carotide. Taakligit posa son sac près d’elle. Osiaa’iiwakuna
lui demanda de prendre le relais le temps qu’elle trouve ce dont elle avait
besoin. Elle devait faire en sorte qu’ils le déplacent à leur couche. Elle ne
pouvait cautériser la plaie ainsi à l’extérieur. Elle n’avait rien en fer à
proximité. Le couteau de chasse de Caleb était avec le cerf. Elle pansa rapidement
la plaie, la dague toujours en place et la sécurisa.
Chapitre 4
Osiaa’iiwakuna ignora son oncle.
Assise sur sa couche près de son mari, elle se contentait de coudre
tranquillement. Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’attaque de Macihaawew
contre elle. Quatre jours sans que Caleb n’ouvre les yeux. Il reposait
paisiblement, son souffle calme et le teint blême. Osiaa’iiwakuna n’avait pas
besoin d’entendre les rumeurs. Elle savait très bien que pour les Pawakenakie’ii
, un homme qui ne reprenait pas conscience après deux jours était considéré
mort. Or elle avait vécu dans les plaines. Elle avait entendu les histoires
de ces hommes qui revenait à la vie
après des mois de sommeil.
Nopokemi’aatna soupira, peu
impressionné par le mutisme de la jeune femme. Il lui conseilla de réfléchir durant
la nuit, lui assurant que peu importe sa décision il lui garantirait sa
protection à elle et à son enfant. Osiaa’iiwakuna resta impassible encore une
fois. Nopokemi’aatna quitta en la laissant seule avec ses pensées et son mari
inerte.
Elle n’avait pas besoin de
réfléchir. Caleb allait se réveiller, elle le savait. Il avait simplement
besoin de d’un peu plus de temps. Elle le sentait au plus profond d’elle-même. Il
ne l’avait pas poussé à traverser les vallées et les montagnes pour mourir
quelques semaines plus tard. Il était plus fort que ça. Il l’avait toujours
protégé, c’était maintenant à son tour. Elle ne laisserait aucun homme
l’approcher. Il n’irait pas rejoindre la lune et les étoiles aussi longtemps qu’elle
pourrait veiller sur lui.
Délaissant son ouvrage un moment,
elle se pencha sur lui. Elle lui caressa doucement les cheveux et déposa un
baiser sur ses lèvres. Elle avait fait un travail remarquable pour le soigner.
Elle avait réussi à impressionnée Atwikan’iinosha en recousant la carotide
rapidement avec du fil de miel et en cautérisant la plaie. Elle était fière du
travail qu’elle avait fait. Elle l’embrassa à nouveau, lui murmurant qu’elle ne
laisserait personne lui faire du mal et les séparer. Elle était persuadée qu’il
pouvait l’entendre. Elle croyait également qu’il était bien plus fort et
résilient que ses compatriotes. Elle se redressa péniblement, posant une main
sur son ventre. Atwikan’iinosha n’avait rien dit à Nopokemi’aatna à propos des jumeaux
réalisa-t-elle. Elle en était soulagée. Son oncle avait beau lui promettre que
des hommes forts et vaillants dans son samaw ne serait pas repoussé par une
veuve et son enfant, des jumeaux étaient une autre histoire. Elle savait que
certains hommes avaient un grand cœur, mais elle soupira et se rendit compte
qu’elle n’en avait jamais connu. Autant dans les plaines que dans les
montagnes, elle avait vu des hommes prendre des veuve et leur enfant sous leur
ailes. Cependant elle avait toujours trouvé que l’enfant du premier mariage
était délaissé au profit de la progéniture actuelle.
Elle ne voulait pas que ces
enfants subissent le même sort. Heureusement, en tant qu’eshamane, même
apprentie, elle avait moyen d’obtenir de la nourriture en échange de ses
services. Elle serait respectée, ses enfants également. Si elles étaient des
filles, elles suivraient possiblement ses traces. si la Mère lui offraient des
garçons, Saapamiikt et Nopokemi’aatna en feraient des hommes forts et elle
s’assurerait de bien les éduquer. Mais tout cela n’était que pure spéculation,
Caleb s’éveillerait bientôt.
Elle reprit sa couture en
soupirant doucement. Le cerf que Caleb lui avait trouvé avait été suffisamment
gros pour que sa peau lui soit utile. Elle avait pu confectionner un porte-bébé
suffisamment grand pour ses deux à venir. Elle sourit en voyant les points
qu’elle avait fait un peu plus tôt. Jamais n’avait-elle été aussi appliquée.
Elle allait broder les symboles de la Mère dessus. Elle les connaissaient bien,
sa propre couverture enfant en était couvert. Sa propre mère n’aurait jamais
accepté que ses enfants dorment dans sans protection. Elle avait encore les
fils de couleurs vives de Pontefort qui allait rendre les autres mères
jalouses.
Elle perdit le fil du temps et
s’étonna de voir Tlig’gohpa revenir, les cheveux couvert de neige. Certainement
cette dernière avait due s’accumulée sur la hutte, la coupant des bruits
extérieurs. Elle n’en s’en plaignait pas. Elle ne voulait pas voir personne. Tlig’gohpa
resta silencieuse. Depuis que Caleb était sans connaissance, elle était
distante. Elle n’était pas à l’aise avec les malades, ce n’était pas la
première fois qu’elle la agir de la sorte. Elle comprenait également sa
réticence. Elle n’avait pas besoin de plus d’explication.
Elles mangèrent en silence, près
du feu et se séparèrent aussi tôt. Osiaa’iiwakuna retourna s’allonger près de
Caleb. Elle lui prit la main, la posant sur son ventre distendu. Elle était certaine
qu’il pouvait sentir et entendre ce qui se passait autour d’elle. Il ne restait
que quelque jours, moins d’une lune. Ses enfants étaient actifs, bougeant sans
cesse. Elle se demandait comment elle allait bien pouvoir dormir, mais la
fatigue eu raison d’elle.
Elle s’éveilla lorsque les
branches déchargèrent une bonne quantité de neige sur le côté de la hutte. Il y
avait longtemps qu’elle avait entendu se bruit mat et étouffée. Elle se blottie
un peu plus contre Caleb. Il était bien plus chaud que la première nuit, sans
être fièvreux. Il reprenait des forces. Elle lui caressa doucement le torse,
s’endormant paisiblement.
Nopokemi’aatna revint la voir
chaque jour, insistant qu’elle considère son offre, mais chaque fois, elle
l’ignora. Elle avait déjà suffisamment à penser sans spéculer sur cette
proposition. Comme tous les jours, Nopokemi’aatna soupira et sortit. Cette journée-là
cependant, il recueillit l’aide de Atwikan’iinosha.
-
Osiaa, dit doucement Nopokemi’aatna en
tâchant de la faire lever les yeux de sa couture. Tu sais que je ne veux pas
que tu sentes avoir de la pression, mais…
-
Mais c’est raté, rétorqua la jeune femme
sans lever les yeux vers. Et si tu crois que d’avoir Atwikan’iinosha à tes
côtés va changer quelque choses…
-
Osiaa, il faut que tu penses raisonnablement,
intervint Atwikan’iinosha en venant s’asseoir près d’elle. Ça fait huit jours… Il n’est toujours pas
revenu à lui…
-
Et tant qu’il respirera je resterai à ses
côtés, riposta Osiaa’iiwakuna en la regardant sévèrement. Je lui ai
promis. À lui, devant son dieu, devant sa famille et à la Mère.
Atwikan’iinosha eut de la
difficulté à soutenir son regard. La jeune femme ressemblait tellement à sa
mère, tellement à sa grand-mère. Elle soupira et baissa des yeux en premier.
-
Je ne vais pas l’abandonner, poursuivit
la jeune femme avec fermeté. Et je ne vais pas commencer à penser à me
remarier, surtout pas en ce moment. Je sais que je l’ai bien soigné. Je sais
qu’il va se réveiller. Il a juste besoin de temps. Je le connais. Vous ignorez
à quel point il est fort.
-
On veut juste que tu considères. Je sais que
c’est un moment difficile pour toi.
-
Difficile n’est pas le mot que j’utiliserais.
Caleb m’a ramener dans les montagnes pour que je sois en sécurité. Rien de cela
ne serait arriver si nous étions restés. Je n’aurais jamais dû… J’ai gravi ces
montagnes et gorges pour revenir ici. Tout cela parce que Caleb pensait que
j’allais être plus en sécurité parmi vous… Je suis enceinte de huit lunes, sans
maison, je vis dans le rangement de mon frère. Je ne comprends pas pourquoi je
dois subir tout cela. Rien de tout ce qui se passe ici ne fait de sens pour
moi. Macihaawew a essayé de tuer mon mari après avoir perdu son combat en bonne
et due forme. Et maintenant, vous êtes là, en train de me dire à chaque jour de
tout laisser tomber. Non! On dirait presque que vous avez orchestrer toute
l’histoire. Je ne vais pas abandonner Caleb. Ne revenez plus jamais me voir
pour me dire cela. Jamais! Je vous pris de sortir maintenant.
Osiaa’iiwakuna retourna à sa
couture, résigner à ignorer la présence des deux autres. Atwikan’iinosha
soupira et posa une main sur le biceps de Nopokemi’aatna, lui suggérant
d’obtempérer. Elle se souciait de la santé de la jeune femme. Elle n’était pas
sorti depuis des jours. L’eshamane avait encore quelque peu de difficulté à
concevoir le lien qui unissaient les deux jeunes gens, mais préférait ne pas le
tester à l’instant. Nopokemi’aatna grogna quelque peu, mais accepta la requête
de Atwikan’iinosha. Désormais seule avec Osiaa’iiwakuna, elle espérait pouvoir
avoir une discussion plus censé.
-
Osiaa’iiwakuna, soupira-t-elle en
s’approchant et en s’agenouillant devant elle. Je sais que c’est difficile
en ce moment. Je comprends que tu l’aimes. Je le vois très bien. Cependant, Nopokemi’aatna
a raison. Tu as besoin de…
-
Non. Je n’ai pas besoin d’un autre homme. Si
je ne peux pas…. Si… si Caleb meure. Je ne veux pas… je ne peux…
Elle s’arrêta un moment, toutes
les émotions qu’elle avait retenues devant Nopokemi’aatna ressortant. Elle
repoussa son ouvrage et se cacha le visage dans ses mains. Atwikan’iinosha la
prit contre elle. Elle était bien consciente que la jeune femme n’avait
pratiquement plus de famille. Elle n’avait pas besoin de perdre son amant.
-
Il ne sait pas, réussit-elle à articuler
en reniflant péniblement. Pour les jumeaux, personne ne sait, personne ne
sait! Ils ne comprennent pas. J’ai besoin de Caleb. J’ai besoin de lui.
-
Je sais, ma belle. Je comprends, mais il faut
aussi que tu sois consciente qu’il est grièvement blessé. Tu as fait des miracles,
mais parfois on ne peut pas faire plus. La Mère a ses…
-
La Mère ne peut pas me le retirer maintenant.
Pas avec tout ce que l’on a traverser ensemble. Il a dit que nous serions plus
en sécurité ici en quittant Pontefort! Et là… je ne comprend même pas comment
c’est arrivé, comment ça l’a pu arriver. Nous étions censé avoir un moment de répit
et que j’aille mon enfant… mes enfants! … que je les ailles tranquillement.
Mais là…
-
Je comprends, et tu as fait de ton mieux, il
ne peut pas rester comme ça pour toujours.
-
Je ne vais pas…
-
Non, non… et personne ne le ferras.
Simplement, pense à tes enfants. Ils auront besoin d’une famille.
-
Ils auront besoin de leur père.
Atwikan’iinosha soupira
doucement. Elle ne savait pas quoi dire. Elle resta à ses côtés un moment, lui
brossant doucement les cheveux des doigts. Elle resta encore un moment avec la
jeune femme, la consolant doucement. Elle ne lui parla plus de mariage et de
future. Osiaa’iiwakuna était tout aussi bornée et têtue que son père. Elle
aurait aimé lui faire entendre raison, mais ne voulait pas créer plus de
détresse encore. Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos et de se sentir en
sécurité. Elle quitta au coucher du soleil, lorsque Tlig’gohpa revint.
Atwikan’iinosha lui demanda de
garder un œil sur la future mère, craignant sa détresse pouvant déclencher ses
contractions plus tôt que prévue. La jeune femme le lui promit, et la remercia.
Tlig’gohpa était soulagé d’avoir pu passer la journée à l’extérieur, l’ambiance
n’étant guère légère sous la hutte. Elle vint prendre place près du feu,
observant Osiaa’iiwakuna manger son bol de soupe absentement. Elle hésita un
moment à tenter d’entrer en conversation, mais se résigna. Elle n’avait rien a
dire. Rien à dire qui méritait de détourner Osiaa’iiwakuna de ses pensées.
Cette dernière se hissa vers sa
couche une fois son bol terminer. Elle se blottie contre son mari, lui repoussant
l’une de ses mèches blondes. Elle aurait aimé qu’il se réveille là, qu’il ouvre
les yeux. Leur bleu lui maquait terriblement. Elle lui caressa doucement une
joue, il reprennait des couleurs. Les autres ne le voyaient pas. Il était déjà
bien pâle contrairement au pawakenakie’ii, mais elle le voyait. Il cicatrisait
bien. La plaie était pratiquement entièrement refermée. La cautérisation avait
grandement aidé. Elle était heureuse d’avoir pu voir un homme le faire à
Pontefort. Elle se doutait qu’elle ne l’avait pas entièrement fait de de la
bonne façon comme la plaie était encore ouverte par endroit contrairement à ce
qu’elle avait vue. Néanmoins, sans cela Caleb ne serait pas étendu à ses côtés.
Chapitre 5
Osiaa’iiwakuna appliqua
délicatement l’onguent, s’assurant de bien le faire pénétrer dans la peau.
Caleb restait immobile. Elle l’autorisait à sortir pour la première fois depuis
que Macihaawew l’avait laissé pour mort. Il n’allait pas rejeter son affection
et ses attentions. Elle termina son pensement et l’embrassa doucement, faisant
doucement rire son mari. Elle n’avait jamais été aussi protective.
-
Embrasses-tu toujours tes patients, lui dit-il
en lui effleurant l’un de ses seins.
-
Tu vas être prudent, se contenta-t-elle de
répondre sans prêter oreille à sa blague. Tu n’es pas encore au sommet de ta
forme.
-
Promis, soupira-t-il. C’est seulement discuter
avec le conseil. Je ne vais pas là pour affronter qui que ce soit.
-
Tu vas perdre de toute façon.
-
Merci du vote de confiance, s’indigna-t-il.
-
Il ne s’agit pas de ma confiance en toi,
soupira-t-elle avant de continuer en tlisu’pawakenakie. Je connais ces
hommes. Ils n’hésiteront pas à remettre en doute tes capacités si tu leur
laisse voir la moindre faille. Il faut que tu es l’air en pleine possession de
te moyens. S’il y en a un qui doute, promet lui un match à la prochaine lune.
Prends-moi comme excuse s’il le faut. Dis-leur que… que tu préfères attendre la
venue de ton enfant… attendre ton retour de vigie. Expliques-leur que tu as des
obligations à honorer d’abord.
-
Kuna, je ne suis pas celui qui est dans le
tort.
-
Non, mais tu es celui qui a passer une
demi-lune sans-connaissance et qui a frôler la mort. Tu sais très bien qu’ils ne verront pas cela d’un bon œil et tu sais
que… tu es… tu seras toujours un eirezt pour beaucoup d’entre eux.
-
Je vais être correct. Ne t’en fais pas.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, l’aidant
tant bien que mal à se relever. Il la serra doucement contre lui, lui
embrassant les cheveux. Elle l’embrassa doucement à son tour et le poussa
doucement vers la porte. Elle souhaitait seulement qu’il ait raison, que tout
se passe bien. Elle l’accompagne jusqu’à la grande place. Elle n’aimait pas
qu’il aille au conseil dans cet état. Elle les aurait fait patienter encore
deux ou trois jours de plus, seulement pour qu’il reprenne un peu plus de
couleurs. Elle soupira en le voyant disparaitre sous la tenture et préféra
occuper son esprit en se dirigeant vers la résidence de Atwikan’iinosha. Là au
moins, elle aurait suffisamment à faire pour ne pas y penser.
Caleb ne fut pas surpris de
trouver Meiren’aatok et Nopokemi’aatna déjà présent à l’intérieur de de la
hutte. Les deux hommes semblaient en grand débat et s’interrompirent en le
voyant entrer. Nopokemi’aatna fit signe à Caleb de prendre place et il
obtempéra, non sans crainte de ne pas pouvoir se relever. Il avait jouer le jeu
devant Osiaa’iiwakuna, mais devait garder le masque. Elle avait raison, mais il
ne pouvait pas repousser sa présence au conseil plus longtemps. Il devait à tous
de moins être capable d’écouter.
-
Elle te laisse sortir, s’étonna Meiren’aatok
en lui offrant un bol de cidre. Je croyais qu’elle allait te garder à
l’intérieur pour toujours.
-
Ta femme est la plus bornée et la plus féroce
qui m’aie été donner de voir, soupira Nopokemi’aatna. J’ai rarement vue
une femme aussi… aussi méfiante…
-
Méfiante! Elle aurait été une ourse que nous
serions mort.
-
Je ne peux pas la blâmer, continua Nopokemi’aatna
sans prêter attention à l’intervention de Meiren’aatok. Cependant, elle
aurait pu se montrer quelque peu plus réceptive. Nous ne voulions que son bien,
tu comprends. Nous tous heureux de te voir sur tes deux pieds, mais il fallait
tout de même que nous pensions au pire. Osiaa’iiwakuna est encore très jeune et
a un brillant avenir. Elle est la fille d’un grand homme. Quoi qu’il en soit,
comme je le disais, nous sommes tous heureux que tu sois de retour. Et s’il
était possible à l’avenir que Osiaa’iiwakuna soit plus…
-
Docile, termina Caleb agacé. Non, je
ne pense pas malheureusement. Vous m’excuserez, mais je ne compte pas reprocher
à ma femme un comportement dont je n’ai ni eu conscience. Vous l’avez dit vous-même.
Kuna est la fille de Madduch qui n’était pas réputé pour avoir un charactère
docile. Si elle a cru bon de vous tenir tête, et d’être comme vous le dites
féroce, j’assume qu’elle avait ses raisons.
-
Dans mon samaw, poursuivit Nopokemi’aatna
en perdant sa bonne humeur. Je veux que les femmes suivent les enseignements
et les vertus de la mère.
-
Protéger sa famille en est un, répliqua
Caleb. Tout comme penser et soigner les blessé.
-
Elle doit se montrer obéissante envers les
ainés et les hommes de sa famille. Elle leur doit le respect. Je vous aie
accueillit ici par respect pour ma sort. Vous faites partie de mon samaw uniquement parce qu’elle est ma nièce. Tu lui
rappelleras que c’est un privilège révocable si elle ne fait pas preuve de
respect.
Caleb garda le silence. Il
n’avait pas eu connaissance d’une quelconque altercation entre Osiaa’iiwakuna
et l’un des ainés, encore moins avec Nopokemi’aatna. Il se contenta d’hocher la
tête. Il savait qu’elle avait tendance à montrer des dents rapidement
lorsqu’elle se sentait menacée. Mais que Nopokemi’aatna y ait vue une insulte
il en fallait beaucoup.
-
De plus, poursuivit le chef en passant
une main sur son visage. Aviez-vous penser à la suite?
-
La suite?
-
S’il advenait qu’il t’arrive quoi que ce
soit.
-
Est-ce une mise en garde?
-
Ne t’y met pas également, le prévint Nopokemi’aatna.
Je n’ai prononcé aucune menace, inutile de te mettre sur tes gardes.
-
Veuillez m’excuser, mais avec ce qui nous aie
arriver dans les derniers mois, je crois justifié que ma femme et moi-même
soyons méfiants.
-
Personne au sein de mon samaw ne vous veut du
mal…
-
Vraiment! J’aurais juré autrement! Je croyais
que c’était pour cette raison que je devais rencontrer le conseil aujourd’hui.
Pour discuter de ce qui s’est passé avec Macihaawew et non pour transmettre des
reproche à ma femme.
-
Dès que les autres arrivent, nous en
discuterons. Je le dis maintenant pour que mes paroles soient franches. Je vous
aie offert à toi et à Osiaa’iiwakuna la protection de mon samaw qui… qui n’a
pas été comme je m’y attendais. Cette situation n’aurait jamais dû se produire
et elle me met en colère. Contre Macihaawew en grande partie, contre son père
qui a manqué à son éducation, mais également malgré tout contre toi et ta femme.
Vous m’avez fait voir que j’étais insouciant. D’autres m’avaient déjà
mentionner la volatilité de son tempérament, mais je l’avais balayé de la main.
Tout comme je n’aie pas chercher à approfondir les accusations d’Osiaa’iiwakuna.
-
Possiblement l’une des raisons de sa
méfiance, mentionna rapidement Caleb.
-
Quoi qu’il en soit, dès que les autres seront
là, nous n’aurons d’autre choix que de prendre un décision.
-
Osiaa a déjà pris la sienne, et moi aussi.
Nous ne resterons pas si Eirnorch reste impuni. Elle veut partir s’il est pour
rester.
-
Elle est en sécurité ici, peu importe si…
-
Elle n’en a pas l’impression. Et pour ma
part, je préfère la savoir heureuse et tranquille, mon enfant en sécurité.
Nopokemi’aatna voulut répondre,
mais des hommes entrèrent discutant de leur voix forte et se chamaillant pour
prendre place. L’ambiance sous les bois d’orignaux venait de changer
drastiquement. Caleb reprit du cidre jetant un coup d’œil à Meiren’aatok. Il
était étrangement silencieux depuis le début. Son habituel sarcasme mit en veilleuse.
Nopokemi’aatna appela les hommes au calme, tâchant de se souvenir combien
d’entre eux étaient absents et qui revenaient d’un long séjour.
-
Messieurs, s’il-vous-plait, que nous n’y passions
pas la nuit, commença-t-il en tapant le sol d’une main pour avoir leur
attention. Nous sommes en séance. Ce n’est pas par plaisir que je désirais
que nous nous rencontrions…
-
On sait tous pourquoi nous sommes ici, intervint
Rarez. On a tous vu ou su ce qui s’est passé. Il est chanceux qui est encore
en vie.
Il y eu un murmure d’approbation
et plusieurs hommes tapèrent le sol d’une main en signe de solidarité. Caleb en
était soulagé. Il constata alors que Makoswii n’était pas présent non plus. Il
ne s’en étonna pas.
-
Si ça l’avait été moi, poursuivit Torez. Je
ne me serait jamais relever. Ma femme m’aurait laissé là. Elle n’arrive même
pas à réparer mon manteau.
-
Et moi dont, je suis sûr qu’elle m’aurait
achever, enchaina Soreich.
-
Messieurs, avant que les dames ne vous
entendent…
-
Oh allé, Nopokemi, le garçon était en train
de se vider de son sang et le revoila revenu des morts. Laisse-nous célébrer un
peu.
-
D’autant plus que j’ai entendu dire qu’elle
t’a envoyé promener, lança Viderez. Toi, le si pondéré Nopokemi’aatna.
-
Ma nièce m’a fait savoir son mécontentement.
-
C’est sûr que se faire dire que son mari ne
se réveillera pas, ce n’est pas ce qu’une femme enceinte veut entendre, lâcha
Meiren’aatok entrainé par les autres.
-
Merci, Meiren’aatok, soupira Nopokemi’aatna.
Je n’ai pas besoin de tes commentaires. Nous ne sommes pas ici pour commenter
de la discussion que j’ai eu avec ma nièce.
Nous devons prendre une décision concernant Macihaawew.
-
Je ne vois pas ce qu’il y a discuter, s’impatienta
Viderez. La plupart d’entre nous étions présents.
-
Et pour ma part, je ne doute pas de ce qui
s’est passé, ajouta Torez. Je refuse que mes filles s’approchent de lui.
Pas depuis les histoires avec Saa’itsi.
-
Qui est Saa’itsi, demanda Caleb.
Il eut un moment de silence. Un
malaise s’installa dans la hutte. Caleb haussa les sourcils, il attendait une
réponse. Il ne les pressa pas. Torez baissa la tête un moment, jouant avec
l’ourlet de sa veste. Meiren’aatok se gratta l’arrière de la tête, se tournant
vers Nopokemi’aatna. Ce dernier soupira lourdement.
-
J’aurais préféré ne pas aborder le sujet,
dit-il finalement. Ce qui lui est arrivée n’est pas … n’est pas clair.
-
Ce l’est pour moi, lâcha sèchement Mortak’aatinen
en tapant le sol du plat de la main. Il a tué ma fille.
Caleb se retint d’exprimer son
étonnement. Il n’était pas étonné de l’accusation, mais bien plus qu’il ne l’aie
jamais entendu. Certainement Nopokemi’aatna avait demandé à son clan de garder
l’affaire sous silence. Il comprenait maintenant pourquoi l’homme avait été
silencieux durant toutes les assemblées. Il était désillusionné, son chef
l’avait laissé tomber. Il s’étonna même de le voir y assister encore.
-
Nous n’avons pas de preuve que c’est lui qui,
commença Nopokemi’aatna calmement.
-
Qu’il l’aie poussé ou qu’elle se soit lancée
en bas ça ne change rien! Si nous l’avions écouter elle serait encore en vie!
-
On ne peut pas changer ce qui est arriver,
Mortak’aatinen, tâcha de le calmer Nopokemi’aatna. Je ne peux pas te rendre
ta fille.
-
Tu peux le faire payer! J’accuse Macihaawew
d’avoir tué ma fille depuis des mois et rien! Ta nièce l’accuse d’avoir voulu
la violer, même pas de l’avoir fait et soudainement tu ne remets rien en doute.
-
C’est parce que ta fille a été trop naïve
pour le suivre, lâcha Torez.
-
Ma fille avait douze printemps! Bien sûr
qu’elle était naïve! Elle a vue la chance d’être dans une bonne famille et de
pouvoir avoir mieux que ce que j’ai pu offrir à sa mère.
-
Mortak’aatinen ne confond…
-
Je ne confond rien du tout! Combien de fois je l’ai entendu le vanter à sa
mère. Lui dire à quel point elle était chanceuse qu’il lui prête attention.
Attention mon cul!
-
Mortak’aatinen, intervint Nopokemi’aatna
un peu plus fort. Je comprends que tes blessures ne soient pas encore
cicatrisées. Saa’itsi était une magnifique jeune fille et nous regrettons tous…
-
Ne termine pas cette phrase, le prévint
le père endeuillé. Ce ne sont que des belles paroles. Si tu le croyais
vraiment, il y a longtemps qu’il ne serait plus là.
Il y eu un nouveau murmure
d’approbation et une salve de tapes au sol. Caleb se retint d’y participer. Il
ne connaissait pas assez l’histoire pour pouvoir avoir une opinion. Il jeta un
coup d’œil à Nopokemi’aatna. Il n’était pas dans une bonne position. Son
autorité et sa capacité à prendre des décisions étaient ternis. Il était remis
en question par des hommes de son âge et plus vieux. Nopokemi’aatna soupira et
leva une main tâchant d’apaiser l’assemblée.
-
Makoswii n’est pas présent comme vous pouvez
le constater. J’ai jugé que sa présence l’hors du décès d’Saa’itsi avait été
néfaste à notre prise de décision. Je ne crois pas qu’un père puisse
arbitrairement punir son fils dans des situations comme celles-ci. Pour le
moment, Macihaawew est en garde à vue dans ma hutte par mon fils et mon frère.
Je vous demande ce que vous désirez faire à la lumière des derniers jours.
-
La même chose qu’il a fait à ma fille et qu’il
a bien failli faire à Caleb, dit Mortak’aatinen d’un ton blaisé.
-
On était pas un feu en en allumant un
deuxième, soupira Nopokemi’aatna.
-
Du temps de ton grand-père, on l’aurait frit,
intervint le vieux Seren.
-
Trevez n’a jamais été un excellent chef non
plus, lui rappela lentement le vieux Kavez.
-
Je suis d’accord avec Mortak’aatinen,
soutint Torez. Si ça n’avait pas été de Osiaa’iiwakuna, Caleb ne serait plus
là.
-
Reste qu’il n’est pas mort, dit Broen. Je
suis désolé, mais on ne châtie pas sur des suppositions.
-
Qu’est-ce que tu proposes?
-
Œil pour oil, dent pour dent.
-
Et comment on applique ça, rit doucement Meiren’aatok.
On le laisse pour mort et on voit si quelqu’un vient à sa rescousse. C’est
pas comme s’il lui avait coupé une main ou casser les dents.
-
Il m’en a cassé une, mentionna Caleb.
-
Et toi, que propose tu, lui demanda Nopokemi’aatna.
Tu es bien silencieux.
-
Je suis silencieux parce que je ne crois pas
que ce soit à moi de choisir. Vous avez dit tantôt qu’un père ne peut pas juger
son fils. Je ne crois pas qu’une victime puisse juger son assaillant. D’où je
viens, pour le peu que je sache, Macihaawew aurait été jeté dans une cage,
condamné à y passer le restant de ses jours. Je sais aussi que s’il avait été trouvé
coupable de meurtre, on l’aurait pendu. Ce n’est pas une belle mort, ce n’est
pas une mort que personne ne devrait voir.
-
Et donc?
-
Je ne peux pas me prononcer. Je sais
cependant ce que ma femme veut. Elle aurait eu à vivre avec les conséquences
plus que n’importe qui ici. Elle le veut loin, très loin. Elle ne veut plus
jamais poser les yeux sur lui.
-
L’exile, soupira Mortak’aatinen. Et
s’il revient?
-
Pendez-le, brulez-le, faites ce que vous
voulez avec lui.
Un léger sourire passa sur le
visage de Mortak’aatinen. Caleb comprenait bien pourquoi. Avec l’hiver qui
s’annonçait rude, sans soutient et isolé, Macihaawew n’aurait que peu de chance
de survivre seul. L’idée de l’exile sembla faire son chemin au sein de du
groupe, déclenchant une suite de conversation agité jusqu’à ce que Meiren’aatok
parle.
-
Et s’il trouve un autre samaw. On fait juste
se débarrasser d’un problème et le transféré à d’autres.
-
Marquons-le, dit simplement Caleb en
pensant au tatouage des prisonniers à Pontefort. Laissons-lui une marque qui
indiquera aux autres qu’il n’est pas digne de confiance.
Il y eu une nouvelle salve
d’approbation puis une série de débat sur la dite marque. Caleb priait qu’ils
finissent leur argumentation rapidement. Il était épuisé, bien plus qu’il ne
l’avait cru. Osiaa’iiwakuna avait eu raison, il n’était pas encore suffisamment
remis pour se permettre de rester éveillé des heures. Il cligna des yeux à
plusieurs reprises tâchant d’en faire partir la fatigue, mais rien n’y fit. Heureusement
pour lui, Nopokemi’aatna n’avait pas l’intention d’étirer le conseil. Il
remercia les hommes, leur assurant qu’Macihaawew allait quitté d’ici deux
jours, le temps qu’il mette Makoswii au courant. Il soupira en se relevant,
leur demanda que jusque-là ils gardent le silence.
Caleb hocha de la tête et
patienta que la plupart des autres aient quitté avant d’essayer de se relever.
Il réussit à se mettre debout et vacilla. On vint à son secours, l’agrippant
par le bras. Mortak’aatinen le retenait fermement, lui laissant un moment pour
retrouver son équilibre.
-
Merci, lui dit Caleb en se stabilisant. Je
me suis relevé un peu trop vite.
-
Tu es chanceux de pouvoir respirer, lui
dit Mortak’aatinen en le relâchant lentement.
-
Ce qu’on me dit, répondit-il en
s’aventurant à faire un pas en avant. Je suis désolé pour votre fille.
-
Pourquoi? Tu ne l’a pas connu.
-
Non, mais… c’est ce que l’on dit d’où je
viens.
Mortak’aatinen hocha de la tête
et quitta sans rien ajouter. Caleb le suivit à l’extérieur. L’air frais lui fit
du bien. Il appréciait le silence renouveler. Il en avait assez d’entendre
parler de Macihaawew. Il se dirigea vers la hutte et s’étendit dans le lit. Osiaa’iiwakuna
à sa grande déception n’était pas là, certainement encore avec Atwikan’iinosha.
Il soupira ne sachant guère où elle avait ranger sa tisane. Sa blessure était
douloureuse, il aurait aimé pouvoir l’endormir. Le pan de la porte s’ouvrit et Tlig’gohpa
entra. Caleb ne put contenir sa déception.
-
Je ne suis pas celle que tu voulais, constata
la jeune femme. Tu sais pour Macihaawew?
-
Sais quoi?
-
Ils veulent le bannir.
-
Une chance que Nopokemi nous a demandé de
garder cela secret, maugréa Caleb.
-
C’est Makoswii. Il est en train de… défier son
Oksitaasamaw. Personne ne peut défier leur chef de clan ainsi. Il faut que tu y
ailles!
-
Je ne suis pas en mesure d’aller nul part en
ce moment. Et Nopokemi’aatna a assez de renfort sans que je fasse acte de
présence.
-
Il l’accuse de favoritisme parce que… parce
que Osiaa est sa nièce. Mais ça ne fait pas de sens… parce que ce n’est pas le
seul…
-
Saa’itsi.
-
Oui!
-
Tu sais ce qui s’est passé avec elle?
Tlig’gohpa resta muette. Elle
baissa les yeux et déposa son panier remplis de pommes lentement. Elle
cherchait à éviter la conversation. Elle soupira lentement, triant
machinalement les fruits, avant de proposer d’aller chercher Osiaa’iiwakuna
avec un sourire forcé. Caleb soupira à son tour. Naturellement, pensa-t-il.
Jamais elle n’allait parler d’une telle chose. Ce n’était pas une conversation
qu’une jeune femme devait avoir selon leur enseignement.
Il s’allongea sur son lit et
massa délicatement son cou. Il ignorait s’il faisait plus de tort que de bien, en
ce moment, mais cela lui faisait du bien. Osiaa’iiwakuna allait certainement
lui reprocher d’y avoir toucher, mais il ne pouvait s’en empêcher.
Osiaa’iiwakuna entra rapidement,
se précipitant vers lui. Il lui prit la main et la lui embrassa. Elle se défit
de son emprise et lui posa une main sur le front, puis observa son pansement.
-
Comment te sens-tu, lui demanda-t-elle
inquiète. Tu sembles un peu pâle. As-tu mal? Es-tu fatigué? As-tu été
capable d’assister à tout le conseil?
-
J’ai assisté à tout le conseil, lui
répondit-il calmement. Mais je suis épuisé. Je ne suis même pas sûr que je
peux me lever.
-
Je t’avais dit de prendre soin de ne pas en
faire trop. Tu ne sors pas de ce lit jusqu’à nouvel ordre, c’est compris?
-
En ce moment il n’y a aucune chance que je le
quitte. Qu’est-ce que tu as dit à Nopokemi’aatna.
-
Qu’est-ce que je lui ai dit quand?
-
Quand il est passé il y a quelques jours.
-
T’a-t-il dit ce qu’il m’a dit,
répliqua-t-elle sur la défensive. T’a-t-il dit qu’il m’a conseiller de te…
de te laisser descendre la pente et de considérer mes options. À plusieurs
reprises d’ailleurs… Comme si j’allais te laisser mourir devant mes yeux. Tu es
le père de mon enfant! Je suis enceinte de trente-six semaines et il pense que
je vais considérer changer d’époux.
-
Kuna, lui dit doucement Caleb en tâchant
de la calmer. Je ne vais pas te chicaner pour m’avoir défendu. Et
certainement pas pour vouloir me garder près de toi. Mais visiblement tu as laissé
une impression, parce que les autres en parlent également.
Osiaa’iiwakuna releva les yeux et
le regarda. Elle était incrédule. Elle ne se souvenait pas d’avoir été
insolente, ni d’avoir été si vocale que les autres hommes au sein du samaw ait
su ses propos. Certainement pas au point que Nopokemi’aatna sente le besoin
d’en toucher mots à son mari. Elle se tourna vers son sac et en tira une
collection d’herbes, préférant ne pas poursuivre la conversation. Caleb avait
besoin d’un onguent pour aider sa plaie et elle préférait régler la situation
rapidement.
Elle mélangea la substance en un
pâte nauséabonde qui répugna Caleb lorsqu’elle le lui appliqua en grande
quantité. La substance brûla un moment, générant une chaleur étrange, mais Osiaa’iiwakuna
lui assura que tout était normal et en terminant un nouveau bandage. Elle
l’embrassa doucement, pressant son corps contre le sien. Il lui caressa
doucement le ventre, tâchant de sentir son enfant à l’intérieur. Elle lui prit
la main et la glissa quelque peu plus bas pour lui faire sentir la tête. Il
sourit bêtement et tâta délicatement.
-
Il ne reste plus beaucoup de temps, dit-il
relevant les yeux.
-
Environs une demi-lune, répondit-elle. Et
par chance, je n’aurais pas besoin de te couver en plus de lui.
-
Hum… tout dépends de toi, répliqua-t-il
narquoisement. Et de tes talents d’eshamane.
-
Mes talents sont ceux qui t’ont gardé en vie,
très cher. Tu es très mal placé pour les critiquer. Et tu ne m’as toujours pas
parler de ce le conseil a décider de faire avec Macihaawew.
-
Oh… aux dernières nouvelles, Makoswii a décidé
de défier ton oncle. Il n’a pas apprécié que nous décidions d’exiler son fils.
-
L’exile? Il a voulu te tuer, et ils veulent
seulement qu’il aille prendre une marche! Je ne comprends pas la logique... Et
si Makoswii décide de confronter mon oncle, s’il gagne, qu’est-ce qu’il arrive
de nous. Je me peux pas rester ici si c’est Makoswii le chef, Caleb. C’est
beaucoup trop dangereux pour moi, pour…
-
Kuna, du calme, croit moi, je ne vais pas te
laisser rester ici non plus si le vent ne tourne pas en notre faveur. Et oui
l’exile a été voté. Même par Mortak’aatinen.
-
Personne ne veut me dire ce qui s’est passé
avec Saa’itsi, soupira Osiaa’iiwakuna en se blottissant un peu plus contre
lui.
-
À moi non plus.
Osiaa’iiwakuna soupira et
s’allongea péniblement. Il n’y avait plus de position confortable. Elle avait
réussi a garder le secret des jumeaux jusqu’à présent, mais si son ventre
continuait à prendre de l’expansion, elle était certaine qu’il allait exploser.
Caleb la rapprocha de lui et la serra contre son torse, grognant quelque peu
lorsqu’elle s’appuya contre sa côte fêler. Elle s’excusa platement et s’endormi
presque aussi tôt.
Osiaa’iiwakuna suivit Caleb avec
réticence jusqu’à l’orée du village. Une bonne partie du samaw y était déjà
assemblé. Un léger murmure parcourait la foule. Un tel châtiment n’était pas
courant. Les regards allaient et venaient entre le couple et Macihaawew. Caleb
ne leur porta attention. Il avait toujours été le centre d’attention parmi les
pawakenakie’ii. Il approcha Osiaa’iiwakuna de lui. Il préférait qu’elle reste
prêt de lui au cas où Makoswii tenterait quoi que ce soit contre elle. Ils se
rapprochèrent de Nopokemi’aatna, qui les salua d’un signe de tête.
Au loin, Macihaawew appela Osiaa’iiwakuna
et la supplia de les faire reconsidérer, mais elle l’ignora. Elle n’allait
certainement pas lui prêter attention. Elle passa un bras un bras sous celui de
Caleb et se rapprocha un peu plus. Elle n’avait pas confiance en les liens qui
le retenait. Les pawenakie’ii n’avaient pas l’habitude de restreindre un autre
homme. Osiaa’iiwakuna fut heureuse de l’arrivé de son oncle Normen’itaken. Si
Macihaawew tentait quoique ce soit, elle était protégé de tous côté.
Elle jeta un regard sévère au
détenu. Elle n’aimait pas particulièrement qu’il y ait une sorte de cérémonie
pour son exile. Il ne méritait pas une telle célébration. Il aurait dû
disparaitre en silence, ni vue ni connu, oublié. Caleb la serra un peu plus
contre lui, s’assurant que de Macihaawew voit bien leur proximité. Il avait eu
raison de son élitisme et de ses menaces. Il était l’ereizt qui avait réussi à
détrôner le fils de Makoswii, le peiti fils de Toren’itakii. Macihaawew grimaça
en le voyant si près d’elle. Il regarda Nopokemi’aatna qui ne bougea point. L’oksitaasamaw
ignora la proximité des jeunes gens ce qui enragea encore plus le futur
expatrié.
-
Et eux, lui cria-t-il. Tu laisses ta
nièce être avec…
-
Ma nièce n’est d’aucun de tes problèmes, répliqua
vivement Nopokemi’aatna. Tu en as déjà fait assez pour elle.
Macihaawew grogna et se tourna
vers le reste du samaw qui arrivait peu à peu. Meiren’aatok vint rejoindre
Nopokemi’aatna, lui expliquant rapidement la problématique avec Makoswii. Ce
dernier avait dû être mis à l’écart. Il n’aurait pas la chance de dire aurevoir
à son fils. Son insolence et sa désobéissance ayant forcé Nopokemi’aatna dans
ses derniers retranchements.
Osiaa’iiwakuna ignorait combien
de temps encore ils devrait attendre pour que la cérémonie ne commence, mais
elle sentait tous les regards sur elle. Elle n’avait rien à cacher. Macihaawew
avait cherché à la violer, l’avait mise en danger et l’avait blessée. Elle
avait fait des chauchemars concernant l’Isttsikakkssin pendant des mois et
sursautait encore lorsqu’un bruit se faisait entendre derrière elle en pleine
forêt. Elle avait trouvé un sens de sécurité et de confort auprès de Caleb.
Leur premiers ébats avaient été très pragmatique, mais elle ne regrettait rien.
Elle avait été la plus grande manipulatrice dans leur relation.
Son mari resserra son étreinte
sur elle. Il la sentait nerveuse. Il l’était aussi. Avec un peu de chance,
Macihaawew aurait la dignité d’accepter son châtiment, mais il en doutait. Il
n’allait certainement pas quitter tranquillement. Caleb commençait à se
demander s’il n’était pas mieux de raccompagné Osiaa’iiwakuna jusqu’à la hutte.
Il ne voulait pas qu’elle se retrouve à nouveau entre lui et Macihaawew.
-
On serait mieux de rentrer, lui
murmurra-t-il tout bas.
-
Quoi? Non je reste, protesta-t-elle sans
surprise.
-
Il faut qu’elle reste, intervint
Normen’itaken. Elle aurait été veuve et elle l’accuse de viol. Et tu dois
rester également, sans elle tu serais mort. Vous avez demandé l’exile, vous
devez assisté la sentence.
-
J’ai demandé qu’il soit puni, Osiaa voulait
l’exile.
-
Il ne méritait pas de Tii’pawarisswew, marmonna
Osiaa’iiwakunaen posant une main sur son ventre. Il ne mérite pas d’être
honoré de la sorte, et nous n’aurions eu d’autre choix, si nous avions fait
autrement.
Caleb n’Avait jamais réfléchit à
cela. Naturellement les autres avaient été hésitant. Il dévisagea un moment sa
femme qui le lui retourna. Elle haussa un sourcil et reporta son attention sur
l’agitation devant elle. Macihaawew insultait tous ceux qui passait devant lui.
Il martelait et répétait encore et encore qu’il était dans ses droits, que tous
allaient vite se rendre compte que Caleb allait leur porter malheur qui il le
lui avait. Il insistait qu’Osiaa’iiwakuna était à présent maudite pour avoir
partager la couche avec un éreizt. La jeune femme retint un hoquet de mépris
lorsqu’il déclara que l’enfant allait être un démon.
Elle n’y croyait pas. Ses enfants
allaient être spéciaux, uniques, mais pas maudits. Caleb lui caressa doucement
le flanc alors que toutes les têtes se tournèrent vers eux. Osiaa’iiwakuna les
défia du regard. Elle n’allait pas laisser Macihaawew installer la peur et le
doute dans son clan. Elle se défit de l’emprise de son mari et s’avança vers
l’exilé. Caleb voulut la retenir, mais Normen’itaken lui fit signe d’attendre.
Ils y avaient suffisamment de témoins, mais églament Nopokemi’aatna qui
s’approcha avec elle.
-
C’est toi qui m’a maudit, Macihaawew,
dit-elle lentement et fort pour que tous l’entende. C’est ti qui a trahi ton
clan. Tu aurais dû me protéger, tu aurais dû faire en sorte que je sois en
sécurité et au contraire. Tu as essayer de me violer, tu as failli me faire
tuer, et tu m’as blessé. Je porte et porterai toujours la cicatrice pour me
rappeler ta trahison. Tu as essayé de tuer mon époux, tu l’as lâchement attaqué
et blessé avec une arme comme un animal. Tu as déshonoré ce samaw, la Mère et
toi-même.
-
Sale conne, rugit Macihaawew. Tu n’est
qu’une..
-
Assez, rugit à son tour Nopokami’aatna. Macihaawew,
à compter d’aujourd’hui tu es banni de ce clan, banni à jamais. Tu ne pourras
plus remettre les pieds dans ce samaw, ni rôder dans la région. Si tu es aperçu
dans les environs, tu seras chassé tel un animal. Ton nom sera effacé de notre
mémoire et maudit à jamais. Tu seras marqué par le renard, le fourbe et le
menteur. De cet façon, tous sauront que qui tu es réellement.
Macihaawew protesta, tâchant de
se défaire de ses liens. Osiaa’iiwakuna recula de quelques pas, laissant les
hommes intervenir. Atwikan’iinosha vient la rejoindre et la prit par les
épaules. Elle comprennait le besoin de la jeune femme d’assister de près au
bannissement. Cependant, elle l’implora de retourner auprès de Caleb et
Normen’itaken. Osiaa’iiwakuna voulut protester, mais le regard sévère de son
ainée la ravisa.
Macihaawew était hors de lui. Non
seulement Osiaa’iiwakuna l’avait insulté et humilié devant tout le samaw, mais
en plus elle se faisait renvoyer dans les bras de l’ereizt. Il avait les veines
du cou qui avait doublées de volumes tant il essayait dese défaire de ses
liens. Mortak’aatinen, Meiren’aatok, Nopokemi’aatna et son fils se tenaient
près à intervenir s’il s’évadait.
Caleb qui n’avait pas encore vu
le cousin de sa femme fut impressionné par Makto’iikanen. Il était de loin le
plus grand et le plus massif des pawenakie’ii qu’il avait vu de sa vie. Il
était visiblement plus jeune que lui, mais déjà il le dépassait aisément d’une
tête. Il était d’autant plus certain que le jeune homme pouvait soulever un
orignal à lui seul. Macihaawew n’avait aucune chance de s’enfuir avec le
colosse qui le hardait. Makto’iikanen pourrait simplement le prendre par la
peau du cou et le clouer au sol.
Les hommes se rapprochèrent du
forcené. Nopokemi’aatna sortit un couteau à la lame en os cérémoniel de son
manteau. Il força la tête de Macihaawew vers l’arrière et y tailla le symbole
du renard sur son front. Tous les autres clans allait ainsi savoir qu’ils ne
pouvaient lui faire confiance. La scène n’était pas pour les faibles de coeur.
Son sang lui coulait jusqu’au sol, tachant la neige de rouge. Sa chaire à vif
fut ensuite couverte d’un poudre concoctée par Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna
savait qu’elle était une décoction anti-coagulante. Elle allait garder la plaie
ouverte durant des jours. Il allait être dans d’attroce souffrance tout ce
temps pour finir avec une horrible cicatrice.
Les
hommes relâchèrent Macihaawew qui tomba au sol en portant ses mains à son front
dans un cri de rage. Instinctivement, Osiaa’iiwakuna se rapprocha de Caleb, se
faufilant entre lui et son oncle. Elle savait qu’aucun des deux n’était en
mesure de se battre avec Macihaawew, mais avec un peu de chance, son colosse de
cousin pourrait le retenir d’une main. Le parjure se releva péniblement jurant
et maudissant ses bourreaux. Il recula
d’un pas, aveuglé par le sang qui lui coulait dans les yeux. Il voulut
s’approcher, mais Makto’iikanen le repoussa d’une main, le jetant au sang au
sol sans effort. Il avait eu comme ordre de ne pas le laisser s’approcher, ni
des membres du clan et encore moins de sa cousine.
Macihaawew se releva péniblement
en colère. Il ne pouvait croire qu’il se faisait rejeté de la sorte. Il était
l’un des meilleurs chasseurs et l’un des guerriers les plus habiles. Il était
exilé pour avoir voulu se débarrasser d’un étranger, un paria. Makto’itaken le
pressa vers la forêt, le menaçant de lui fracasser le crâne. Caleb n’avait
aucunement de difficulté à le croire. Ses mains étaient de la gigantesques. Dès
que l’exilé faisait un pas de l’avant, il le repoussait vivement, le faisant
tomber à plusieurs reprises.
Macihaawew continua ses
protestations et ses maudissements. Osiaa’iiwakuna
en eu assez, ils étaient maintenant rendu à la limite de la forêt et
Makto’itaken n’allait certainement pas le laisser revenir. Elle fit signe à
Caleb et s’Excusa auprès de son oncle. Ce dernier cependant les suivit, ainsi
qu’une bonne partie du samaw. L’humiliation était à son comble, tous tournaient
le dos à l’exilé. Bientôt, ses cris ne seraient plus qu’un bruit distant. Le
clan allait tranquillement reprendre ses occupations habituels.
Ils furent rapidement rejoints
par Tokaa’natorii, la femme de Nopokemii’aatna, qui les invita à venir souper.
Osiaa’iiwakuna accepta avec plaisir. Elle n’avait jamais eu l’occasion de faire
connaissance. Elle ne savait que les potins partagées entre Atwikan’iinosha et
Taakglit à son égard. Les propos n’étaient pas particulièrmeent joyeux et
élogieux, elle était curieuse de découvrir pourquoi. Elle savait que
Tokaa’natorii était la deuxième épouse de Nopokemi’aatna, mais elle se doutait
qu’il y avait plus à l’histoire. Elle lui assura qu’ils y seraient au coucher
du soleil, la remerciant de l’invitation.
Osiaa’iiwakuna avait besoin de
repos. Elle avait passé la matinée debout et en était épuisée. Si elle devait
passer la soirée chez son oncle, elle devait faire une sieste. Caleb aussi
avait besoin de se reposer, il ne voulait pas l’admettre, mais elle le savait.
Il s’était bien remis de ses blessures, mais il avait encore besoin de refaire
son sang. D’autant plus elle ne voulait pas qu’il s’épuise pour rien, il devait
construire leur hutte. Normalement il aurait participé plus activement au
bannissement , mais Nopokemi’aatna lui avait demandé de restger en retrait. Il
avait préféré qu’il ne soit pas directement impliqué et Caleb n’avait pas
protester. Il ne se sentait pas en état de lutter contre lui encore.
Se glissant sous la hutte,
Osiaa’iiwakuna s’élança vers le lit, se roulant en boule. Elle caressa son
ventre. Pour la première fois depuis longtemps il lui semblait qu’un poids
venait d’être lever de ses épaules. Caleb s’allongea près d’elle l’embrassant
dans le cou.
-
Heureuse, demanda-t-il tout bas.
-
Soulagée, répondit-elle en soupirant Enfin…
-
Il a eu ce qu’il méritait, lui assura Caleb.
-
Non… mais mieux vaut ainsi. Au moins il ne sera
plus proche. Tu ne sais pas à quel point ça me rendait anxieuse avec les.. le
bébé. Là au moins…
-
Au moins maintenant s’il apparait j’ai le droit
de le tuer à vue.
Osiaa’iiwakuna se tournas vers
lui. C’était la première fois qu’elle l’entendait parler de la sorte. Elle
était quelque peu déstabilisée. Elle aurait normalement aimé qu’il soit si
assuré, mais soudainement elle était perturbée. Il lui caressa doucement la
joue, repoussant l’une de ses tresses vers l’arrière. Elle baissa les yeux et
se laissa blottir contre lui. Elle réalisa qu’elle ne l’avait jamais entendu
parler de la sorte. Jamais avec une telle sévérité.
Soudainement elle était partagée
entre un sentiment de sécurité et une étrange peur envers lui. Elle qui l’avait
toujours poussé à être plus affirmé, maintenant elle était en était perplexe.
Il lui caressa doucement les cheveux et lui embrassa le front.
-
Ça va, demanda-t-il en la sentant rigide.
-
Oui c’est juste… tu compte vraiment le tuer
s’il revient?
-
Comme n’importe qui d’autre dans le samaw,
assura-t-il en la serrant contre lui. Il ne peut pas remettre les pieds au
village.
-
Mais tu as… tu… laisse faire.
-
Kuna?
-
C’est que… tu parles de tuer quelqu’un.
-
Qui a lui même essayer de me tuer et qui a
faillit te tuer aussi, dois-je te rappeler.
-
Mais… la Mère n’aime pas… je suis confuse… et
pas juste à propos de toi. Tout l’aspect de le tuer s’il revient. Je n’aime pas.
Et je sais. Je sais qu’il a faillit te tuer… que si ce n’était pas de moi tu
serais mort. Je sais ce qu’il m’a fait… mais je ne peux pas m’imaginer que tu
le tues.
-
Kuna, tu sais que je ne dis pas ça par
plaisir. Simplement, ça serait un soulagement…
-
Un soulagement, s’exclama Osiaa’iiwakuna
en se redressant sur un coude. Caleb?
-
Tu sais ce que je veux dire… Kuna je veux
simplement être sûr que vous êtes en sécurité, toi et notre enfant.
-
En perpétrant l’irréparable?
-
Je ne suis pas un enfant de la Mère, Kuna.
-
Et si elle décide de se venger sur moi?
-
Endors-toi mon amour. Il n’y a rien de cela
qui se passe aujourd’hui. Je ne veux pas le tuer, et je ne veux pas que tu
t’inquiètes pour ça. Tu as eu raison de demander son bannissement et je suis le
premier à être heureux qu’il n’aie pas de Tii’pawarisawew. Je te promets que je
ne vais pas le pourchasser.
Osiaa’iiwakuna se laissa retomber
avec un long soupire. Elle n’allait pas arriver à exprimer son malaise. Elle
n’arriverait même pas à se l’expliquer. Caleb la blottie contre lui, lui
caressant doucement le dos et l’embrassa doucement. Elle avait besoin de cette
affection. Mpeme si elle n’était pas d’accord avec ses propos. Elle passa une
main sur son ventre. Ses jumeaux étaient actifs. Elle allait avoir du mal à
trouver le sommeil.
Comme de fait, elle eut à peine
l’impression de tomber endormi qu’elle
fut éveiller par Atwikan’iinosha qui l’appelait doucement. Elle se redressa s’extirpant
des bras de Caleb qui dormait à poing fermé.
-
Que se passe-t-il, demanda-t-elle
confuse. Une urgence?
-
Vient avec moi, lui dit-elle simplement
en lui faisant signe de la suivre. Allez!
-
Maintenant? Je faisais une sieste. C’est pas important?
Je dois aller souper chez Nopokemi’aatna… j’ai besoin de me reposer.
-
Viens avec moi, allez. Justement avant que tu
ailles chez ton oncle. Prend ton hameleriek.
Osiaa’iiwakuna grogna et
s’extirpa du lit. Elle ne pouvait croire que la journée où elle avait
réellement besoin de se reposer, elle devait suivre Atwikan’iinosha. Elle
s’enveloppa dans son hameleriek et recouvrit Caleb qui dormait toujours. Elle
suivit sa mentore à l’extérieure s’étonnant de trouver Makto’itaken qui
patientait.
-
Que faisons-nous, demanda la jeune femme.
-
Nous allons faire le dernier rituel avant la
naissance. Nous allons à la source sacrée.
-
La quoi? Et Makto, il vient avec nous?
-
Je ne veux pas prendre le risque que
Macihaawew nous surprenne. Taakglit, Tlig’gohpa et Normen y sont déjà.
-
Je ne suis pas certaine de comprendre, dit
Osiaa’iiwakuna en la suivant lentement. Caleb?
-
Il n’a pas à venir, c’est uniquement pour
toi. Il peut rester. Nous allons être en sécurité avec Makto et Normen.
-
Et on doit faire ça aujourd’hui.
-
Tu est sur le point d’accoucher, nous n’avons
pas le luxe d’attendre encore longtemps. Ne t’inquiète pas, ce sera uniquement
moi et ta tante. Les hommes resteront à distance d’ouie.
-
Caleb n’aimera pas que je sois partie me
promener dans les bois.
-
Laisse-moi m’occuper de lui.
Osiaa’iiwakuna soupira. Elle
n’avait visiblement pas le choix. Atwikan’iinosha l’entrainait par le poignet,
gentiment, mais décidé à ne pas la laisser s’évader. Elle soupira se
légèrement, espérant pouvoir se reposer par après. Elle aurait préféré être
avertie de leur petite escapade.
-
Où allons-nous, demanda-t-elle après un
long moment en s’enfonçant dans la forêt.
Je ne devrais pas être ici. Atwik… il faut que je rentre. Caleb ne
sait pas où je suis… Il va paniquer s’il se réveille et que je ne suis pas là.
-
On est presque rendu, Osiaa, la rassura
l’eshamane. Tu n’as rien à craindre. Makto est ici.
-
Sans offense… je préférerais être à la
maison, au milieu du atnameh. Macihaawew a été exilé ce matin, il est encore
dans les environs.
-
Arrête un peu, nous y sommes. Et c’est
important que nous faisions ce rituel. Makto, tu nous attends ici?
Le colosse hocha de la tête. Il
s’assit sur un tronc, leur rappelant de l’appeler si un problème survenait.
Atwikan’iinosha passa un bras sous celui d’Osiaa’iiwakuna et l’entraina sous un
tunnel de branches tressée. La jeune femme admira les vignes, le tunnel devait
être magnifique en été. Il déboucha sur une petite clairière où un étant était
entourée de saules pleureurs. Malgré l’hiver, leurs feuilles étaient encore
vertes. Assise près de l’étang, Taakglit allumaient des bâtons fumigène, alors
que Tlig’gohpa les secouait doucement dans l’air faisant flotter une fine brume
d’épinette, de sauge et de rose dans toute la clairière.
-
Où est Normen, demanda Atwikan’iinosha en
s’approchant.
-
Un peu plus loin par là-bas, désigna
Taakglit en éteignant son charbon dans l’eau. On est tranquille jusqu’à ce
que je l’appele. Osiaa tu es prête?
-
Je ne sais même pas ce que je fais ici, avoue
la jeune femme curieuse en s’approchant du bassin. L’eau est chaude? Comment?
-
C’est la source sacrée, expliqua
Atwikan’iinosha en caressant l’eau de la main. Son eau est pure et donne la
vie.
-
Je dois en boire, devina Osiaa’iiwakuna
en s’assoyant sur un rocher.
-
Oh non très chère. Tu dois t’y baigner.
-
On se gèle!
-
L’eau est bonne et tu vas voir, lui assura
Taakglit. Tiens bois ça.
-
C’est quoi?
-
Tu ne nous fait aucunement confiance, ricana
sa tante. C’est le rituel. Les femmes de ta famille et l’eshamane pour bénir
ton accouchement.
-
Et Tokka’naati, demanda Osiaa’iiwakuna. Elle
ne devrait pas être ici.
-
Elle a suffisamment à faire de son côté, pesta
Atwikan’iinosha en s’agenouillant près d’elle et ouvrant son sac.
Osiaa’iiwakuna ne releva pas la
remarque. Elle n’avait jamais entendu l’eshamane prester de la sorte.
L’eshamane sortit plusieurs accessoire et contennant de sa besace, les plaçant
avec soin sur une peau de loup au sol. Osiaa’iiwakuna était curieuse, elle
n’avait jamais entendu parler du rituel que les deux femmes tenaient à lui
faire suivre. Taakglit s’approcha d’elle et commença à défaire sa coiffure,
dénouant ses tresses avec soins. Comprennant qu’elle ne s’y soustrairait pas
elle l’aida.
-
Déshabille-toi, Osiaa, lui demanda
l’eshamane une fois ses cheveux défait.
-
Quoi?
-
Déshabille-toi. Allez, tu étais tant pressée
de retourner dans ton lit.
-
On est en plein milieu de l’hiver… je ne vais
pas aller dans l’eau.
-
Osiaa, regarde autour de toi. Tout est vert
ici. Tu as remarqué que ce n’est pas aussi froid ici. Tu entre dans l’eau, nous
faisons le rituel. Tu en sors, je donne les teintures et sérums. Tu te
rhabilles et tu retournes te coucher. Avec le rituel on est certaines que ton
accouchement se passera bien. Tlig’gohpa va t’aider à entrer dans l’eau. Allez.
Osiaa’iiwakuna soupira et retira
son hameleriek, puis ses vêtements. Elle frissonna quelque peu, mais concéda
que Atwikan’iinosha avait raison, l’air était relativement chaud hormis le
vent. Tlig’gohpa s’approcha et l’aida à descendre dans l’étang. L’eau était
agréablement tiède et le fond couvert d’algue douce, mais qui le rendait
glissant. Tlig’gopah l’aida à s’assoir sur un pierre plate au fond, l’eau la
couvrant jusqu’aux épaules. La jeune femme retourna prendre un bol de bois
sculpté que lui tendait Atwilan’iinosha.
-
Que la Manikaw’opii t’accompagne dans tes
souffrances, chantonna doucement l’eshamane. Qu’elle t’accorde son aide
lorsque tu mettra au monde l’un des ses enfants. Que l’eau de cette source
purifie ton corps.
Tlig’gopha versa doucement de
l’eau sur la tête de la future mère la faisant frissonner. Elle reprit
l’opération à deux reprises avant que Atwikan’iinosha ne reprenne.
-
Qu’avec cette eau, ton corps soit purifier.
Qu’il soit prêt à accueillir ton enfant et que Manikaw’opii te prête son
courage. Que l’eau de cette source enlève toutes perversions et malédictions.
Tlig’gopah reversa de l’eau sur
la tête d’Osiaa’iiwakuna par trois fois. Cette dernière comprenait maintenant
pourquoi l’eshamane avait attendu aussi longtemps pour faire le rituel. Elle avait attendu que Macihaawew soit exilé.
Elle aurait dû refaire le rituel autrement. Osiaa’iiwakuna repoussa l’eau qui
lui coulait dans les yeux. Elle jeta un coup d’œil à sa tante et
Atwikan’iinosha qui s’étaient installées au sol près de l’étang. Elle y avait
étendu une grande fourrure blanche. Tlig’gohpa l’aida à se relever et à sortir
de l’eau, s’assurant qu’elle ne glisse pas sur les algues. Osiaa’iiwakuna prit
place sur la fourrure, s’étonnant de sa douceur. Maintenant hors de l’eau, elle
grelotait. Taakglit la couvrit d’une serviette en peau de cerf et essorra
doucement ses cheveux. Atwikan’iinosha s’approcha avec un premier bol rempli
d’une substance graisseuse.
-
C’est une crème purifiante, lui
mentionna-t-elle en en appliquant sur le ventre d’Osiaa’iiwakuna et de passer
le bol aux autres dames. Et bénéfique pour toi. Je vais t’en laisser et il
faudra que tu t’en recouvre chaque soir avant l’accouchement. Caleb pourra
t’aider, Tlig aussi. Nous commençons un rituel important pour toi, pour que tu
te prépares physiquement et mentalement à ton accouchement. Après la crème,
nous prenons cette teinture. Lavande, camomille et framboisier pour apaiser
l’esprit. À partir d’aujourd’hui, tu devras avoir l’esprit en paix. Plus de
soucis ni de tracas. Ce sera au femmes de ta famille de s’occuper de tes
tracas. Taakglit et Tlig’gohpa seront là pour toi, et ce jusqu’à la fin du
deuxième lune.
-
Du deuxième lune.
-
Lorsque ton enfant aura deux lunes. Jusque-là,
elles seront toujours près de toi. Tu auras toute l’Aide don’t tu auras besoin
et la mienne. Taakglit a accepté d’être ta mère spirituelle.
-
Mais… je
ne… je ne t’ai jamais demandé, s’étonna Osiaa’iiwakuna confuse en se
tournant vers sa tante. Tu n’as pas à…
-
Tu n’as pas à me le demander, ma belle,
lui assura Taakglit en lui caressant le visage. Je me suis proposée. Tu es
revenue parmi nous alors que nous te croyions disparue comme ta mère. J’étais
très proche d’elle lorsque nous étions enfant. Il me fait plaisir d’être ta
manikawsikwis.
Osiaa’iiwakuna baissa la tête,
tâchant de cacher ses larmes. Elle était émue. Elle n’aurait jamais cru être
aussi admise au sein de sa famille, pas avec Caleb. Taakglit la serra doucement
contre elle, essayant doucement une larme de son pouce. Elle était heureuse de
la réaction de nièce.
-
Itksa’ohta, sanglota Osiaa’iiwakuna se
défaisant de son emprise. Je ne sais… Je ne sais pas quoi dire.
-
Tu n’as rien à dire, ma belle.
-
Et tu n’es pas seule, lui assura
Tlig’gohpa. Je ne te laisserai pas partir de chez moi tant et aussi
longtemps avec la construction de ta hutte. Caleb a bien à faire.
Osiaa’iiwakuna rit doucement et
essuya ses yeux du revers de la main. Taakglit repoussa une mèche de cheveux et
leur fit signe de reporter son attention sur l’eshamane. Celle-ci attendit
patiemment que ses sanglots se calme avant de poursuivre. Cette dernière avait
un nouveau bol entre ses mains rempli d’une substance rougeâtre. Elle patienta
un moment que la jeune femme cesse de sangloter avant de poursuivre.
-
Ceci est une teinture qui restera un bon moment
visible, au moins une bonne semaine. Et si tu n’as pas accoucher avant qu’il
disparaisse, nous allons te les refaire.
Elle commença à tracer les
symboles de maternité et de protection sur le ventre de la future mère en un
motif symétrique. Osiaa’iiwakuna les connaissait bien, ceux de l’ourse et de la
louve, force et famille. Les pawakenakie’ii affichaient toujours avec fierté
leur ventre distendu ni leur poitrine. Elle avait rapidement appris qu’à Pontefort
qu’ils étaient bien plus pudique, homme comme femme. Elle n’avait jamais
personnellement compris pourquoi, mais n’avait pas chercher à comprendre.
-
Avec ses sigles tu aurais les esprits de
l’Ourse et de la Louve qui veilleront sur toi et on enfant, poursuivit
Atwikan’iinosha en terminant sur son ventre et poursuivant sur sa poitrine.
La salamandre est un esprit spécial pour toi. Tu nous es est revenu comme une
salamandre au printemps. Elle veillera sur ta santé.
Atwikan’iinosha glissa ses doigts
sur les seins d’Osiaa’iiwakuna en y traçant d’autres motifs dédiés à sa
prospérité et à ce qu’elle produise du lait en abondance pour ses enfants.
Osiaa’iiwakuna la regarda s’exécuter avec attention. Dans quelques années ce
serait elle qui dessinerait ces motifs sur les futures femmes mères.
Arrivée
Osiaa’iiwakuna posa une main sur son ventre et s’arrêta de
marcher. La jeune femme souffla, sa douleur s’était arrêter. Elle releva la
tête vers Atwikan’iinosha qui s’était également arrêter, patientant doucement.
-
Le moment approche, dit-elle doucement. Besoin
d’un instant?
-
Non ça va c’est passé, assura la future
mère en reprenant son souffle.
-
Première fois?
-
Deux ou troisième, depuis deux jours
environs…
-
Rien d’alarmant encore alors, viens, le plus
vite nous sommes là, le plus tôt tu peux t’asseoir.
Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et
la suivit. Elle était heureuse cependant que leur journée soit majoritairement
consacré à la préparation d’onguent et de bandage. Les longues nuits d’hiver
arrivaient à grand pas, l’heure des cueillettes était passée. Leur réserve
devraient tenir jusqu’au printemps.
Osiaa’iiwakuna se réfugia sous la hutte avec soulagement. Le
vent était horriblement froid à l’extérieur. Elle s’empressa d’allumer le feu,
frissonnant vivement. Atwik’iinosha lui fit signe de s’asseoir et qu’elle
allait prendre soin du reste. Osiaa’iiwakuna retira son manteau, mais s’enroula
dans une grosse fourrure épaisse. Elle regrettait d’avoir laissé son hamereliek
derrière.
-
Sait-tu comment faire des anmotikaw'wektimakii,
demanda Atwikan’iinosha en suspendant un chaudron au-dessus du feu.
-
Des fils de miel, s’étonna Osiaa’iiwakuna
en relevant rapidement la tête vers elle. Non… ma mère a toujours dit que
j’étais trop jeune…
-
Hum… je pense que ce n’est plus le cas maintenant.
Veux-tu apprendre?
-
Certainement!
L’ainée rit doucement à l’enthousiasme de la jeune femme.
Elle lui remit trois gros pot de miel cristalisé, lui demandant de le faire
fondre. Osiaa’iiwakuna s’empressa d’exécuter. Elle était enchanté de se faire
initier à cet art. Atwikan’iinosha retira son manteau, l’accrochant sur son
crochet habituel et fouilla parmis les herbes séchées afin d’en tirer les
feuilles de sauge.
-
Connais-tu la base? Ou ta mère t’a-t-elle
complètement garder dans l’ignorance.
-
Je sais que c’est du miel et de la sauge,
mais comment tisser le fil… ça je l’ignore.
-
C’est assez la base. Je vais m’occuper de
moudre la sauge, occupe-toi de brasser le miel, assure-toi qu’il ne brule pas.
Il faut qu’il redeviennent liquide sans plus. Une bonne partie du secret réside
dans l’âge du miel. Il faut que le miel est d’abord cristallisé. En le
réchauffant il change de consistance et devient plus élastique… Ne le fait pas bouillir! Dans aucun cas.
C’est particulièrement important. S’il bouille, nous devront recommencer à zero
et nous n’avons pas beaucoup de miel cet année.
-
J’y ferais gare, assura Osiaa’iiwakuna. Et
lorsqu’il est fondu je fais quoi.
-
Tu le brasse constamment. Et on y ajoutera la
farine de sauge.
-
C’est tout?
-
C’est l’étape facile.
Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. E
Chapitre 1
Caleb entra dans la hutte, la
trouvant étonnement déserte. Osiaa’iiwakuna était seule, assise sur leur
couche, son hameliriek couvrant ses jambes. Elle brodait tranquillement. Elle
ne remarqua pas sa présence avant qu’il ne l’embrasse doucement. Elle releva la
tête vers lui souriant doucement. Elle repoussa son ouvrage et l’invita à venir
le rejoindre. Il se départie de son manteau et s’installa sur le bord du lit.
-
Comment ça
s’est passé, demanda Osiaa’iiwakuna en s’approchant de lui. As-tu une audience?
-
Demain
matin, lui dit-il en hochant la
tête. Avec tout le monde.
-
Hum,
j’imagine qu’il va tous les faire voter. Il faut que tu sois certain de faire
bonne impression.
-
Tu crois
que je ne vais pas y arriver?
-
Non, je
crois que eux vont avoir une opinion terriblement biaisée à ton sujet… et au
mien aussi.
-
Pourquoi
toi?
-
Tu n’as
peut-être pas remarqué, mais je suis enceinte de huit lune.
-
Oh ça je
le sais.
Il se pencha vers elle et l’embrassa doucement glissant une main sur
son ventre. Elle sourit doucement et l’embrassa à son tour.
-
Il va bien
aujourd’hui?
-
Il était
actif. Ce qui est toujours une bonne nouvelle.
-
As-tu vu
l’eshamane?
-
Pas
encore, elle était partie chercher des herbes. Mais je vais le faire le plus
rapidement possible, ne t’inquiète pas… d’ailleurs… je me demandais… laisse…
-
Tu te
demandais quoi? Il y a un problème?
-
Non, non…
tout vas bien. Simplement…. J’aimerais, si tu es d’accord essayer d’être une eshamane.
Finir mon apprentissage.
Caleb haussa les sourcils. Il lui sourit doucement et l’embrassa à
nouveau. Il ne pouvait croire qu’elle avait eu si peur de lui le lui demander. Elle
haussa les sourcils, attendant une réponse.
-
Tu me
demandes vraiment cela, lui
demanda-t-il en riant doucement. Tu
veux être eshamane depuis toujours.
-
Oui, mais…
tu es mon mari… et je suis censé te demander la permission si…
-
Non.
-
Non?
-
Non, je ne
veux pas que tu me demandes la permission pour cela. Je ne veux pas que tu me
demandes la permission pour faire ce que tu veux.
-
Non mais…
selon les traditions…
-
Je ne
crois pas qu’elles s’appliquent à nous.
Osiaa’iiwakuna soupira doucement et baissa la tête. Elle souriait doucement
réalisa Caleb en prenant place sur le bord du lit. Il l’attira à lui, lui
embrassant les cheveux.
-
Tu ne
regretteras pas, lui demanda-t-il.
-
Regretter
quoi, demanda-t-elle curieuse. D’être eshamane?
-
De rester
avec moi.
-
De quoi tu
parles?
-
De rester
ma femme, d'être avec moi.
Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et
vint l'enlacer, déposant un baiser sur sa nuque. Elle ne voulait pas avoir
cette conversation, elle ne voulait pas y penser.
-
Je t'ai
demandé de m'épouser, lui rappela-t-elle
doucement à l'oreille. J'ai
fait tout ce voyage avec toi, parce que tu as eu un doute… je t'ai suivi ici.
Je t'ai suivi à Ponteforte avant cela. Je t'ai aimé et je t'aime encore. Je ne
suis pas prête de te laisser partir.
-
Je suis
quand même un ereizt….
-
Et je suis
celle qui porte son enfant. Et une fois que le conseil te connaîtra, ils vont
l'accepter, j'en suis sûr.
-
Et sinon?
Si je reste un ereizt?
Osiaa’iiwakuna soupira, se
blottissant un peu plus contre son dos. Elle ne voulait pas y penser. Elle
préférait croire que tout allait bien aller. Caleb lui prit une main et la lui
caressa doucement.
-
Tu sais
que si tu avais voulu…
-
Ne finit
pas cette phrase, le prévint elle.
-
Que si tu
voulais rester à Ponteforte ou ailleurs dans les Plaines, je t'aurais écouté.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas.
Elle lui avait mentionné à plusieurs reprises son inconfort à voyager dans sa
condition. Il l'avait poussé au bord de la crise de nerfs et de l'épuisement.
Elle avait passé des nuits à s'endormir en pleurs à l'idée de poursuivre leur
ascension le lendemain. Elle se souviendrait longtemps de des maux de dos et de
jambes lorsqu'elle se réveillait le matin, pratiquement incapable de se relever
jours après jours. Elle sentait encore les traces de leur dernier
campement.
-
Tu vas
bien, lui demanda-t-il en
constatant son silence. Je ne t'ai
pas vue de la journée.
-
Je me suis
reposée, répondit elle répondit
elle simplement en relevant la tête vers lui. Maintenant que j'ai un lit.
-
Tu es
confortable?
-
Plus que
les dernières lunes.
-
As-tu
besoin de quelque chose?
-
De toi.
Viens.
Elle le tira par les épaules,
l'obligeant à s'allonger près d'elle. Il ne résista guère à cette invitation.
Elle s'allongea contre lui passant une main sur son torse, blottissant sa tête
dans le creux de son épaule. Il était nerveux, elle comprenait mais il n'y
avait rien de plus qu'ils pouvaient faire. Il posa une main sur la sienne, lui
caressant doucement ses doigts, s'arrêtant sur son alliances de temps en temps.
Elle ne réagit pas, prétextant s'être déjà assoupie. Elle ne voulait pas
laisser transparaître sa propre inquiétude. Il s'étira au bout d'un moment et
la recouvrir de sa fourrure d'ourse, s'assurant qu'elle soit bien couverte en
bougeant le moins possible.
Il passa doucement une main
dans ses cheveux, effleurant son oreille et l'embrassa sur le front. Depuis
qu'ils étaient de retour parmi les gens de son peuple, il était bien plus
discret dans ses gestes d'affection, avait-elle remarqué. Elle ne s'en faisait
pas. Il était fort probablement incertain de la réception des autres. Qu'ils
perçoivent cela d'un mauvais œil. Elle comprenait bien, mais en privé, elle
désirait retrouver son amant et l'intimité qu'ils avaient eu à
Ponteforte.
-
Kuna, l'appela-t-il doucement en lui caressant la
joue. Kuna? Je sais que tu ne dors
pas.
-
Quoi?
-
Penses-tu
à ce que tu ferais si ils me refusaient?
-
Ils ne
refuseront pas, soupira Osiaa’iiwakuna
agacée qu’il retourne sur le sujet.
-
Kuna…
-
Je ne sais
pas, avoua-t-elle en relevant la
tête vers lui. Je ne me vois pas
être sans toi, pas avec notre enfant. Je me vois mal prendre un autre
mari… je ne sais pas qui voudrait de moi et de notre enfant… J’imagine que je
pourrais être une eshamane et rester seule…
-
Tu serais
prête à le faire?
-
Non! Je
veux être avec toi! Je serais prête à quitter avec toi, rester ici le temps que
notre enfant vienne au monde, mais ensuite…. Peu importe.
-
Kuna, soupira Caleb en se tournant vers elle. Tu as besoin de ton samaw.
-
Ce n’est
pas mon samaw, pas encore.
-
Tu as
besoin de ta famille.
-
Tu es ma
famille. N’essaie pas de te défiler! Je ne te laisserai pas partir sans moi,
soyons clair. Tu es coincé avec moi! Tu ne te débarrasseras pas de moi aussi
facilement, prince Caleb Louis François
Mirantreux de Pontefort!
Caleb rit et se tourna vers elle.
Il l’embrassa et la serra contre lui, effleurant l’un de ses seins doucement. Enfin
elle le sentait se reprendre. Elle lui retourna ses caresses, passant un bras
autour de son cou. Elle ne voulait pas le laisser s’éloigner. Ni maintenant, ni
jamais. Il l’entraina avec lui, l’embrassant un peu plus descendant une main
sur ses fesses. Elle sourit bêtement, heureuse de cette attention et pressa sa
poitrine contre lui. Elle le désirait depuis des jours.
Il la fit rouler sur le dos, lui
retirant sa robe, dévoilant sa poitrine. Il la lui embrassa avec passion, lui
massant doucement. Elle se défila quelque peu, la fraicheur de la hutte la
faisant frémir, mais il ne s’en fit pas. Il la rapprocha de lui et défit
doucement ses pantalons alors qu’elle lui retirait son chandail. Elle se
dépêcha de lui descendre ses pantalons. Elle n’entendait pas prendre son temps.
Elle ignorait quand son frère et sa belle-sœur allait être de retour. Elle ne
put s’empêcher un léger cri de satisfaction, rejetant la tête en arrière.
Caleb s’amusa de la voir fondre
entre ses main. Il l’embrassa doucement et bougea lentement. Elle lui passa les
bras autour de son coup et l’attira à elle un peu plus. Il y avait si longtemps
qu’il l’avait aimé ainsi. Il l’embrassa doucement un peu plus. Il l’aimait
tant. Elle aussi, il le voyait bien. Elle l’implora de ne pas arrêter,
gémissant doucement en s’accrochant à ses épaules.
-
Ne me laisse pas, lui dit-elle en
se redressant vers lui.
-
Jamais, répondit-il en la ramenant vers
lui.
-
Peu importe ce qui arrive demain, promets….
Hum… Caleb…. promets-le moi. Tu … oh… tu ne me laisseras pas.
Caleb le lui promit et la plaqua
contre lui. Elle le laissa la prendre avec amour. Il la reposa sur la couche
avec délicatesse. Elle lui sourit et l’invita à venir s’allonger près de lui.
Il n’hésita pas et la prit par la taille et la serra contre lui en la couvrant
de son hameliriek. Elle se blottit contre lui, caressant son torse et jouant
dans son poil.
-
Ton frère devrait aller manger plus souvent
chez ses beaux-parents, lui susurra Caleb en l’embrassant.
-
Hum… j’ai surtout hâte que nous ayons notre
propre chez-nous.
-
Je te construirai la plus belle, lui
promit Caleb en la faisant sourire. Solide, chaude, confortable et grande.
-
Je n’ai pas besoin d’une grande.
-
Si tu veux être eshamane, tu vas avoir besoin
d’espace.
-
Commençons par avoir une. Tout simplement.
Caleb lui sourit et la remonta l’hameliriek
un peu plus sur elle. Elle était si belle ainsi, ses longs cheveux se fondant
dans la fourrure, seul son visage doré se découpant sur le noir. Elle ferma les
yeux, profitant de la chaleur et du confort, sa fatigue était de retour. Caleb
la rapprocha de lui, s’assurant qu’elle soit bien couverte de la tête au pied.
Il entendit son beau-frère et Tlig’gohpa
rentrer, mais il resta allongé, prétendant dormir. Il les entendit discuté tout
bas, mais ne prêta pas attention à ce qu’ils disaient. Ils étaient déjà de trop
dans leur petite hutte.
Chapitre 2
Caleb entra sous la grande hutte
en suivant son beau-frère. C’était la première fois qu’il mettait les pieds au
sein du conseil. Il jeta un coup d’œil autour de lui. L’espace était étonnement
vide, à l’exception des fourrures au sol, du feu et de quelques accessoires de
cérémonies. Il en était quelque peu déçu. Cet endroit avait toujours été
mythique pour lui, l’endroit où tous les hommes influents du camp se
réunissaient. Où les décisions les plus importantes étaient prises.
Sur les murs des peintures illustraient des
scènes de chasse et de combats. Une vingtaine panaches d’orignaux sculptés
étaient suspendu du plafond, créant un méandre d’ombres entrelacées au sol par
la lumière qui entrait du plafond. Certainement qu’à la nuit tombée, ils
projetaient d’impressionnantes ombres sur la charpente du plafond grâce au feu
qui crépitait au centre de l’habitation.
Caleb savait qu’à ce moment, il
n’était pas encore membre de leur élite. Il allait devoir passer leur audition.
Il devait leur raconté leur aventure devant Nopokemi’aatna, l’oksitaasamaw du
village. L’annonce de son union à Osiaa’iiwakuna
n’avait pas été bien reçu parmi la vaste majorité des Pawakenakie’ii . Ils le
voyaient toujours comme eirezt, comme l’étranger. Il savait qu’il allait devoir
défendre leur union, il allait devoir expliquer son choix de l’entrainer chez
son propre peuple.
Les hommes prirent places. Nopokemi’aatna
s’assit directement sous le plus gros panache d’orignal, face à la place libre
qui où Caleb fut indiquer de se tenir. Le chef lui fit signe qu’il pouvait
s’assoir lorsque tous eurent fait de même. Il ne s’attendait pas à avoir ce
privilège. Il s’exécuta, et accepta la tasse de thé que son beau-frère lui
offrait. Chacun d’entre-eux devrait boire à même le bol, ce rituel devant ouvrir
leur esprit et consolider leur fraternité.
Le conseil s’ouvrit suivant la
prière traditionnelle, les hommes demandant à la mère de leur offrir clarté et
sagesse dans leur décision. Meiren’aatok jeta une poignée d’herbes dans les
flames, aromatisant l’air de menthe et de romarin. Osiaa’iiwakuna faisait la
même chose après qu’ils se soient disputés ou qu’elle ait fait un cauchemar. Elle
aimait purifier l’air, créer une nouvelle atmosphère.
-
Nous
sommes ici réunis pour discuter de l’arrivée de Osiaa’iiwakuna et de Caleb au
sein de mon samaw, ouvrit Nopokemi’aatna solennellement. Bien que de savoir ma nièce en sécurité et
en bonne santé me réjouisse, je dois admettre que les circonstances et son état
me laisse perplexes. Avant de prendre une décision, je désir entendre la
version des faits de Caleb à ce sujet.
-
Qu’est-ce
qu’il y a à savoir, cracha Makoswii en jeta un regard noir à Caleb. Il l’a mis enceinte et maintenant il veut
nous faire à croire qu’ils sont ensembles.
-
Makoswii!
Assez! Le conseil se doit d’entendre ce qui s’est passé durant leur absence.
-
Pour qu’il
nous raconte l’histoire qu’il l’arrange?
-
Assez!
Caleb?
Caleb soupira lourdement et
entreprit son histoire. Il raconta comment ils étaient loin du village lors de
l’attaque, leur décision d’aller rejoindre un autre samaw, leur errance dans la
forêt, leur arrivée dans les plaines filliandriennes, leur séjour à Pontefort,
leur mariage et finalement leur décision de revenir dans les montagnes. Nopokemi’aatna
avait pris soin de garder tous silencieux, mais son récit avait suffisamment
prit de temps que par trois fois ils avaient dû réalimenter le feu.
-
Et Osiaa’iiwakuna,
demanda Nopokemi’aatna. Comment
a-t-elle vécue son séjour?
-
Je crois
que vous feriez mieux de lui demander en personne, répondit Caleb. Je préfère en cette occasion ne pas parler
en son nom. Je crois, si vous la permettez, qu’elle ferait mieux de répondre
elle-même à cette question.
-
Allez la
chercher.
-
Une femme
n’a pas sa place ici, intervint Meirt.
-
Elle
n’aura pas sa place, elle sera là en guise d’invitée seulement.
Saapamiikt se leva prestement,
décider d’aller chercher sa sœur. Il connaissait une bonne partie de l’histoire
et malheureusement le récit de Caleb ne lui rendait pas justice. Il avait
simplement effleuré la surface de l’histoire, il n’avait pas parlé de
l’incident avec Macihaawew, ni du cavalier noir. Il avait raconté son histoire
avec tant de distance qu’elle semblait fausse, dénuée de sentiment et de vie. Il
voulait que le samaw sache la vérité.
Il trouva rapidement sa sœur, qui fut étonnée
de la requête, mais le suivit rapidement. Il la fit entrée dans la hutte devant
lui et la guida, la main dans le bas de son dos jusqu’à Caleb.
-
Bienvenue Osiaa’iiwakuna,
l’invita Nopokemi’aatna en lui faisant signe d’avancer. Nous avons besoin de clarification sur
l’histoire que Caleb vient de nous raconter.
-
Quel genre
de clarifications, demanda-t-elle poliment en pressant l’une de ses jambe
sur le dos de son mari.
-
Quelles
ont été tes motivations à quitter ton village, demanda une homme qu’elle
n’avait jamais vue.
-
Il n’y
avait plus de village, répondit-elle rapidement en se tournant vers l’homme.
Je vois mal comment j’aurais pu faire
autrement.
-
Caleb ne
t’a pas forcé à quitter? Il ne t’a pas forcé à le suivre?
-
Aucunement,
répliqua-t-elle indignée en jetant un coup d’œil à son frère. Est-ce que vous m’avez fait chercher pour
corroborer ce que Caleb a dit?
-
Nous
voulons simplement être certain que ce qu’il a avancé est la vérité, intervint
l’Oksitaasamaw en levant une main pour l’apaiser.
-
Caleb ne
m’a pas forcé à faire quoi que ce soit contre ma volonté, dit-elle
sèchement. Que ce soit clair. Il ne m’a
jamais empêcher de faire quoi que ce soit, non plus.
-
Peut-être
qu’elle pourrait s’asseoir, intervint Saapamiikt qui était encore debout. Elle est enceinte jusqu’au yeux.
-
Bien sur, accorda
Nopokemi’aatna.
-
Elle en
peut pas s’assoir au sol. Pas dans la…
-
Je sais,
Bennen! Mais on ne va pas laisser une femme enceinte debout.
Caleb la prit par la main et la
fit assoir sur ses jambes. Osiaa’iiwakuna le remercia, lui prenant la main et
la posant sur son ventre. Si les hommes croyait que leur affection était
fausse, elle allait leur prouver le contraire.
-
Pouvons-nous
poursuivre, demanda Nopokemi’aatna à l’adresse de ses confrères.
-
Ce n’est
pas très commun, dit Meiren’aatok en hochant doucement la tête. Mais la situation ne l’est pas non plus.
-
Tu as
volontairement suivi Caleb, Osiaa’iiwakuna, poursuivit Nopokemi’aatna.
-
La journée
de l’attaque, mon père lui avait commandé de rester près de moi, de me protéger
lorsque j’étais aller chercher des herbes pour ma mère. À notre retour, il ne
restait plus rien… à choisir entre rester là
ou quitter pour aller rejoindre un autre samaw. Nous avons essayé de
rejoindre le samaw de Brech… mais visiblement nous nous sommes perdus.
-
Il ne t’a jamais mal traité?
-
Mal
traité? Non… c’est plutôt l’inverse…. J’ai refusé son aide, je l’ai repoussé et
je l’ai utilisé. Mais il ne m’a jamais abandonné. Il a été patient, si ce n’est
plus et a tout fait en son pouvoir pour que je sois en sécurité. Il m’a amené
chez sa famille lorsque nous sommes arrivés dans les plaines, et là-bas m’a
fait passer pour sa femme.
-
Tu étais
jeune.
-
Pas plus
jeune que ma mère lorsqu’elle et mon père se son marié. Et dans notre cas c’était
le seul moyen que nous avions pour rester ensemble. Autrement les gens de son
peuple se serait débarrassé de moi.
-
Pourquoi?
-
Pour les
mêmes raisons que nous avons songé à le faire avec lui.
Un lourd silence s’abattit sur
l’assemblé, seul les crépitements du feu se faisait entendre. Caleb caressa
doucement le ventre de la jeune femme. Elle lui caressa la main en retour. Elle
avait pris le contrôle de toute la conversation. Elle marqua une pause,
l’enfant venant de donné un coup qui la distrait.
-
C’est moi
qui ai proposé à Caleb que notre union soit officielle, poursuivit-elle
assurée. J’ai demandé à Caleb qu’il
m’épouse selon les traditions de son peuple. Notre union fictive était déjà consommée depuis longtemps et le
mensonge commençait à transparaître. Je ne… je ne pouvais pas me permettre
d’avoir un enfant si nous n’étions pas ensemble. Et avec l’absence d’enfants,
même de grossesse… les gens de son peuple commençait à se poser des question.
-
N’as-tu
pas été enceinte…
-
C’est ma
troisième grossesse en ce moment. Toutes de Caleb. J’ai été enceinte peu de
temps avant d’arrivé à Pontefort,
mais je l’ai perdu. J’ai perdu la deuxième il y a environ un an. C’est ce qui a
motivé notre départ, est que nous ne croyons pas que ma fausse couche soit
purement accidentelle. Pour répondre à votre prochaine question. Si Caleb avait
jugé que moi et notre enfant aurions été en sécurité, il ne m’aurait pas fait
gravir les montagnes et descendre dans les gorges dans cet état.
-
Et si ta
sécurité avait été assuré, demanda Nopokemi’aatna.
-
Je ne
serais pas ici en ce moment.
Il eut un second silence, Osiaa’iiwakuna
appréciait ce moment. Elle n’avait pas eu la chance d’exercer son talent de la
sorte à Pontefort, pas avec des phrases complètes à tous de moins.
-
Votre
nièce était tout de même promise à mon fils, revint à la charge Makoswii.
-
C’était
avant l’attaque, rétorqua Nopokemi’aatna.
-
Qu’est-ce
que vous voulez que je lui dise maintenant?
-
Votre
fils, demanda Osiaa’iiwakuna en posant une main sur son ventre.
-
Macihaawew,
oui.
-
Macihaawew,
souffla Osiaa’iiwakuna la voix brisée.
Elle se tourna vers Caleb qui
semblait tout aussi étonné qu’elle. Était-il encore en vie? Avait-il rejoint le
samaw de Nopokemi’aatna? Elle ne l’avait pas vue depuis qu’ils étaient arrivés.
Elle se calla un peu plus contre Caleb qui lui prit l’épaule d’une main. Les
hommes ne manquèrent pas de constater son changement d’attitude. Nopokemi’aatna
se pencha un peu plus en avant, son regard passant de sa nièce à Caleb.
-
Macihaawew
est vivant, demanda Caleb devant le mutisme de sa femme. La dernière fois que nous l’avons vue, il…
il était sérieusement blessé. Et il ne nous a pas quitter dans la meilleur des
circonstances.
-
Mon fils
est arrivé ici blessé en effet, il a parlé d’une attaque.
-
Le cavalier
noir, intervint Caleb. Il nous a pris
en chasse depuis notre départ du village. Nous le sentions dans nos dos.
-
Il n’a pas
parler d’un cavalier, cracha Makoswii en se souvenant de la conversation.
-
Non il n’a
pas parler d’un cavalier, soutint Nopokemi’aatna. Mais plus de…
-
De moi, le
coupa Caleb.
-
Caleb,
lui murmura Osiaa’iiwakuna en tournant la tête vers lui.
-
Du fait
que je l’ai frappé, et que je l’ai emporté en combat contre lui. Il vous a raconté
qu’un eirezt l’avait battu. Certainement pas que je l’ai emporté en bonne et
due forme. Vous a-t-il mentionné pourquoi
nous nous avons eu cette dispute.
-
Mon fils
m’a dit que vous l’avez éloigné de Osiaa’iiwakuna.
-
Vous
a-t-il dit dans quelles circonstances?
-
Il a
essayé de me violer, intervint Osiaa’iiwakuna en plantant son regard dans
celui de Makoswii. Et après ça de
m’utiliser comme bouclier humain pour se protéger du cavalier noir.
-
Quand tu
dis violer, demanda Nopokemi’aatna soudainement inquiet. Qu’est-ce que…
-
Je vois
mal ce que vous avez de la difficulté à comprendre. À partir du moment où
quelqu’un veut en pénétrer une autre sans son consentement… j’appelle ça un
viole. En particulier lorsqu’on me tient par les poignets et que l’on m’empêche
de m’en sauver même si je supplie qu’il cesse.
-
Ce sont de
grave accusations, Osiaa’iiwakuna, soupira son oncle.
-
Ce ne sont
pas des accusations, mon oncle. C’est ce que j’ai vécu. Et si ce n’était pas
pour Caleb, il aurait eu ce qu’il voulait. Vous me demandez pourquoi j’ai accepté
de suivre un eirezt. Pourquoi j’ai choisi de m’unir à lui. Vous avez votre
réponse.
Caleb la blottie un peu plus
contre lui. Elle tremblait. Pas de peur, reconnu-t-il, de colère. Toute la trahison
qu’elle avait ressenti à lorsqu’Macihaawew l’avait coincée sous lui. Il lui
intima doucement que tout allait bien aller. Elle secoua doucement la tête en
se tournant doucement vers lui.
-
Ta
déclaration est vraiment importante, poursuivit Nopokemi’aatna en
soupirant. Lorsque tu es entrée, j’allais
te demandé si tu désirais resté la femme de Caleb. Visiblement ma question est
déplacée et je ne t’humilierais pas en te la posant. Ma recommandation au
conseil est la suivante; reconnaitre votre union comme officielle et l’enfant
légitime de ce fait. Caleb en tant
qu’homme aura un siège au sein de ce conseil, et toi…
-
Je désire
poursuivre mes études pour être eshamane, si vous le permettez, mon oncle.
-
Avec ma
bénédiction, et celle du conseil si le vote est majoritaire.
-
Elle accuse
mon fils de viol et vous voudriez que je vote en leur faveur, tonna Makoswii
en se penchant vers son chef.
-
Le récit
que ma nièce a fait sur les actions de votre fils n’influence en rien le vote
concernant leur intégration ou non au
sein de mon samaw. Ce sera discussion pour une autre fois.
-
Et si je
demande que cette problématique soit régler avant le vote.
-
Nous
devrons passer au vote pour décider si cette problématique doit être résolu
avant ou après.
-
Je demande
le vote.
-
Ceux en
faveur de régler les accusations viol soumises par Osiaa’iiwakuna à l’encontre
de…
-
Macihaawew
n’est pas là, intervint Renvrech. Il
est parti en rotation il ne reviendra pas avant deux jours encore.
-
Macihaawew
ne peut pas voter, il n’est pas marié, rappela Nopokemi’aatna. Ceux en faveur
de de régler les accusations d’Osiaa’iiwakuna en premier?
Près du tier des mains se
levèrent. Insuffisant, mais inquiétant, réalisa Osiaa’iiwakuna. Contre, furent
la moitié des mains, suivit de quelques abstentions. Le vote pour leur
acceptation au sein du samaw procéda, avec une vaste majorité l’emportant. Osiaa’iiwakuna
soupira de soulagement, posant une main sur son ventre. Makoswii jura, mais Meiren’aatok
le rappela à l’ordre,
Osiaa’iiwakuna remercia
humblement l’assemblé, leur promettant de travailler fort et de devenir une
bonne eshamane. Elle ne chercha pas à étirer sa présence au sein du conseil
elle se releva de peine et de misère, aider par son frère. Caleb se leva à son
tour et accompagna sa femme jusqu’à la porte, mais fut rappeler par Nopokemi’aatna,
sa présence désormais de mise au conseil. Osiaa’iiwakuna lui assura qu’elle
l’attendrait avec un souper prêt à son retour. Il lui caressa doucement un
sein, l’embrassant au passage.
Osiaa’iiwakuna rentra à la hutte
de son frère, sa belle-sœur était assise près du feu. Elle cousait tranquillement
et releva la tête en la voyant rentrer. Osiaa’iiwakuna lui raconta rapidement
sa rencontre et la jeune femme soupira de soulagement, l’invitant à venir la
rejoindre. Elle réparait le manteau de son mari, les jambes croisées sous elle.
-
Parlant de
bonne nouvelles, dit Tlig’gohpa doucement. Je crois que la Mère m’accorde sa bénédiction.
-
Vraiment, s’émerveilla
Osiaa’iiwakuna.
-
Je n’en
suis pas certaine encore, mais tout semble indiqué une bonne nouvelle à venir.
-
Ne
t’emballe pas trop, la prévint Osiaa’iiwakuna en posant une main sur la
sienne. J’ai connu beaucoup de déceptions….
-
Ton frère
m’a dit pour ta fausse couche. Dans la maison de pierre.
-
J’en ai eu
deux, lui dit-elle en soupirant. La
première, je venais à peine de découvrir que j’étais enceinte. Nous étions
encore dans les montagnes, perdus sans abris sans rien et… et lorsque nous
sommes arrivées dans les plaines, les
soldats m’ont frappé au ventre et je l’aie perdu. Caleb l’a su à ce moment, je
n’ai jamais eu le temps de lui annoncer.
-
Tu crois
que je devrais attendre?
-
Attend
encore, attend que Atwikan’iinosha puisse faire un examen physique et qu’elle
le confirme.
-
Tu ne peux
pas toi?
-
J’aimerais
mieux que quelqu’un de plus expérimenté le fasse. Il y a longtemps que je ne
l’ai pas fait.
Tlig’gohpa hocha la tête,
reprenant son ouvrage. Osiaa’iiwakuna s’affaira au sien, cousant l’un des
nouveaux oreillers qu’elle fabriquait. Elle avait pris l’habitude à Pontefort
de dormir dans un océan de coussins. Et avec son ventre de plus en plus gros,
elle rêvait d’avoir un coussin pour la supporter. Elle avait été chanceuse dans
les derniers jours de pouvoir amasser une bonne quantité de plumes pour ces
derniers, suffisamment pour deux. Elle eut le temps de refermer le premier
coussin avant de s’affairer au souper.
Caleb revint avec Saapamiikt,
entrant dans la hutte en pestant contre la neige qui avait commencé à tomber
dehors. Caleb vint enlacé sa femme, lui caressant le ventre. Elle lui souhaita
la bienvenue lui offrant de prendre place.
-
Comment
s’est passé la fin du conseil, demanda Osiaa’iiwakuna en passant un bol à
son mari.
-
Bien, répondit
Caleb en la remerciant. J’assume. Je
n’aie pas vraiment de comparatif.
-
Tu es
maintenant un vrai homme, ricana la jeune femme en se tournant vers lui.
-
Je suis
pas mal sur que tu savais ça déjà, répliqua-t-il en désignant son ventre
d’un signe de tête. Mais maintenant, nous
allons pouvoir avoir notre chez-nous.
Osiaa’iiwakuna lui sourit. Maintenant
qu’il savait été accepté au sein du samaw en tant que couple marié, ils
allaient pouvoir habiter leur propre hutte. Osiaa’iiwakuna avait hâte, elle
appréciait l’hébergement que son frère lui avait offert, mais il manquait
d’intimité. Elle ne pouvait pas attendre d’avoir sa propre maison. Elle voulait
s’installer, préparer l’arrivée de son enfant. Elle était nerveuse, et quelque
peu embarrasser d’accoucher dans la hutte de son frère.
-
Crois-tu
être capable de faire ça avant que le bébé arrive, demanda-t-elle.
-
Si j’ai de
l’aide, je crois que nous pourrions avoir quelque chose d’habitable, mais pas à
ce niveau-ci. Nous n’aurons pas beaucoup de confort.
-
Laisse-moi
me charger du confort, répliqua-t-elle en lui caressant la main. J’ai déjà deux coussins de fait pour nous.
-
Il va te
falloir plus que deux coussins.
-
Tu m’as
habitué à ce confort, j’étais très bien avant. Et à la prochaine chasse, si tu
es capable de me ramener une chèvre de montagne?
-
Pourquoi
une chèvre particulièrement?
-
Parce que
je le veux vivante.
-
Tu veux
faire comme mes gens, comprit
Caleb amusé.
-
Peut-être….
-
Les pawakenakie’ii
ne sont pas reconnus pour leur agriculture. Tu en veux une ou plusieurs?
-
Est-ce que
une de chaque serait trop demandé?
-
Où
comptes-tu les mettre? Avec quoi comptes-tu les nourrir?
-
Je
comptais les attacher à un arbre, de un et de deux, avec les déchets de tables.
N’importe quoi que normalement nous jetons… pelure de patates, de carottes,
n’importe quoi. Et pour répondre à ta question si tu pouvais me ramener une
femelle en premier. Idéalement une qui est enceinte, qui mettra bas au
printemps.
-
Tu veux
leur lait.
-
Je veux
leur laine aussi. Maintenant que je sais comment la filer.
-
Tu vas
avoir besoin de plus d’une chèvre pour te faire une robe, ricana Caleb.
-
Mais assez
pour faire une couverture pour notre enfant. Et si je réussie à les garder en
vie… et qu’elle se reproduit, nous n’aurons plus de problèmes….
Caleb sourit et la blottie contre
lui. Il lui promit de trouver une chèvre en question. Il se tourna vers Saapamiikt
qui discutait tout bas également avec sa femme. Leur intimité était déjà
suffisamment limité dans l’habitation que les deux couples avaient pris
l’habitude de discuté à voix basse.
-
Tu es
d’accord toujours que je sois une eshamane, lui demanda Osiaa’iiwakuna
entre deux bouchée.
-
Pourquoi
je ne le serais pas, lui demanda-t-il intrigué.
-
Parce que
ça l’implique beaucoup. Ça l’implique que je sois occupée, souvent absente et
en train d’aider des gens à tout heures…
-
D’avoir
des gens qui vont et viennent constamment, continua-t-il avec un sourire. D’avoir des herbes et des plantes qui pendent
du plafond, d’avoir des pots et des onguents partout.
-
Entre
autre…
-
Kuna, tu
rêves de faire ça depuis longtemps. Je ne vais pas t’en empêcher. Veux-tu autre
chose qu’une chèvre pendant que je vais être partie?
Osiaa’iiwakuna secoua la tête, le
remerciant. Elle avait d’autre projet, mais il n’était pas réalisable à ce
temps-ci de l’année. Elle ne voulait pas se l’avouer, mais elle avait été
impressionnée par les techniques d’agriculture des Filliandriens. Elle admirait
leur capacité de faire pousser ce qu’il voulait lorsqu’ils le désiraient. Elle
rêvait de ne pas avoir à crapahuter pour chacune petites plantes ici et là. Elle
avait conservé des graines de divers légumes et plantes pour replanter, en
espérant qu’ils allaient prendre racines dans le sol des Éternelles.
Osiaa’iiwakuna rendit visite à Atwikan’iinosha
en compagnie de Tlig’gohpa. La jeune femme désirait discuté de sa possible
grossesse le plus tôt possible et la présence de sa belle-sœur la rassurait. Osiaa’iiwakuna
se doutait que Atwikan’iinosha n’allait rien voir, mais elle ne voulait pas
argumenter. L’eshamane avait naturellement été informée du désir de Osiaa’iiwakuna
de devenir eshamane. Elle s’en réjouissait, lui proposant de l’assister durant
son examen de la jeune femme, désirant pouvoir discuter plus longuement avec sa
nouvelle apprentie plus tranquillement par la suite. Cependant comme Osiaa’iiwakuna
l’avait pressentie il était encore trop tôt pour être certain de quoi que ce
soit. Tlig’gohpa soupira, déçue. Elle remercia la eshamane quitta la tête
basse.
-
C’est
toujours une déception lorsqu’il n’y a pas de bonne nouvelle, déclara Atwikan’iinosha
en soupirant doucement.
-
Moins
décevant qu’une mauvaise, rétorqua Osiaa’iiwakuna
en regardant le pan de la porte se refermer. Je lui aie dit hier que c’était trop tôt pour que tu sois capable de le
savoir.
-
Vous êtes
toutes si pressée d’avoir des enfants.
-
La mère
demande que nous le fruit de nos amours. Elle demande que nous suivions ses principes. Nous sommes éduquées
ainsi.
-
Pourquoi
désires-tu être eshamane, demanda doucement Atwikan’iinosha en lui prenant
la main.
-
Ma mère
l’est… l’était… et j’ai toujours aimé la voir travailler. La voir recoudre des
plaies, la voir soignée tous les membres de notre village. J’ai toujours admiré
son travail.
-
Et tu
souhaites poursuivre son travail.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête, une
larme roulant sur sa joue. Elle n’avait jamais exprimé cette pensée à haute
voix. Elle s’ennuyait horriblement de sa mère. Plus elle avançait dans sa
grossesse, plus elle regrettait son absence. Atwikan’iinosha l’enlaça
doucement. Elle lui promit de prendre soin d’elle, commençant à pleurer à son
tour. Elle avait été proche de Rose dans le passée, étudiant toutes deux sous Lily.
Atwikan’iinosha caressa les
cheveux de la jeune femme et essuya sa joue du pouce. Osiaa’iiwakuna renifla et
essuya ses yeux du revers de la main. Elle prit un moment pour reprendre ses
esprits, caressant son ventre la tête basse.
-
Ta mère
serait fière de toi, Osiaa’iiwakuna, lui dit doucement l’eshamane. Oh, je ne voulais pas te faire pleurer
encore.
-
Désolé,
c’est temps-ci… c’est…
-
C’est tout
à fait normale, tu attends un enfant.
-
J’hais que
l’on… que l’on me dise ça…
-
Comme
toute les autres femmes enceintes. Désires-tu que l’on regarde où en sont tes
connaissances aujourd’hui?
-
Vous allez
me poser des questions?
-
Entre
autres… j’ai surtout besoin d’aide pour préparer des tisanes aussi. Nous avons
plusieurs personnes qui ont attrapés froid dans les derniers jours. Si tu te
sens de m’aider aujourd’hui?
-
Avec
plaisir!
Atwikan’iinosha se releva,
resserrant son châle au passage avant d’aller chercher plusieurs herbes qui
pendaient du plafond. Osiaa’iiwakuna sourie doucement, se rappelant la
conversation avec Caleb la veille. Elle récupéra les herbes que lui tendait Atwikan’iinosha.
-
Tu connais
leur nom, demanda cette dernière en récupérant des petits coffrets de bois.
-
Menthe,
verveine, framboisier, genévrier, thym, mélisse et racine de gingembre, énuméra-t-elle
en les montrant l’une à l’une.
-
Que
ferais-tu?
-
Mélisse,
gingembre et thym pour sûr. Je déconseillerais le framboisier aux femmes
enceintes, pas avant les dernières semaines à tous de moins. Si il y a des maux
de gorge, genévrier et menthe, verveine pour aider s’il y a de la température.
Et vous ne m’en avez pas donner, parce que il ne doit pas être mélanger aux
ingrédients secs, mais du miel.
-
Excellent.
Et tu préconises quoi?
-
Une pincée
dans un bol d’eau jusqu’à disparition des symptômes.
-
Quoi
d’autre?
-
Boire
beaucoup d’eau, beaucoup de repos et éviter d’échanger euh… je ne sais pas
comment dire ça… salive et mucus en tout genre.
-
Pas que… de
quoi?
-
Les Filliandriens disent qu’il faut éviter la propagation. Je
ne sais pas si c’est vrai, mais je suis certaine que cela peut aider un
minimum.
-
On ne va
pas isoler nos gens pour couler du nez.
-
Non, ricana
Osiaa’iiwakuna en émiettant de la menthe. Mais
on peut certainement leur demander de ne pas éternuer ou cracher sur les
membres de leur famille.
Atwikan’iinosha hocha de la tête,
l’idée n’était pas si absurde, bien que relativement nouvelle. Elle observa la
jeune fille travailler, ses mains broyant agilement les feuilles de mélisse.
Elle ressemblait tellement à sa mère. Les mêmes taches entourant ses yeux, s’amenuisant
près de son nez. La même façon de froncer les sourcils lorsqu’elle se
concentrait. Elle la vit prendre un
moment, l’enfant en elle s’agitant, poser une main sur ventre en souriant
doucement.
-
Tu sembles
déjà rendue loin dans ta grossesse, même si tu me dis que tu es à trente
semaine.
-
Un peu
plus mais oui, ricana la jeune fille en relevant les yeux vers elle. Caleb est quelque peu… débouté. Il… il ne
sait plus quoi faire de moi.
-
Oh je
doute qu’il s’en plaigne.
-
Non… juste
pour m’agacer.
-
Me
laisserais-tu faire t’examiner?
-
Naturellement,
est-ce que…
-
Je veux
juste m’assurer que tout est correct. Après que nous finissions de faires les
tisanes.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête. Atwikan’iinosha
n’avait pas l’air inquiète, mais tout comme elle semblait trouver son ventre
très développé. Elle était pourtant certaine de la date de conception. Elle
avait prié à la mère et elle connaissait ses cycles. Elle était effrayé quelque
peu, elle voyait mal comment son ventre pouvait bien prendre encore plus
d’expansion.
-
As-tu
appris quelque chose là-bas, demanda Mirabella en brassant le mélange
d’herbes. Font-ils des choses
différemment de nous?
-
Tout, répondit
Osiaa’iiwakuna en riant doucement. Tout…
Ça m’a pris tellement de temps à apprendre à simplement exister. Ils ont
tellement de règles, tellement façon de faire. Juste leurs vêtements, c’était
tellement compliquer pour rien… et leur coiffures… Mère! Désolée!
-
Je ne suis
pas de ces eshamanes qui refusent d’entendre le nom de la Mère en vain.
-
Il ne faut
pas que j’en prenne habitude. Mais tout était tellement horriblement différent.
-
J’ai
entendu dire qu’il vive dans des maison de pierres. Ils vivent sous-terre?
-
Non
aucunement. Ils construisent ces gigantesques bâtiments en entassant des pierres qu’ils coupent en
cubes. Ils les empilent sur un ou deux étages avant d’en faires d’autres en
bois. Le château où la famille à
Caleb vit fait quatre étage de haut! C’est plus haut que certains arbres qu’ils
ont.
-
Comment
arrivent-ils à monter aux étages.
-
Oh… ils
ont des escaliers, c’est comme
petites planches ou des pierres qui permettent de monter aux différents étages.
C’est pratique… Dans notre hutte,
j’aimerais que notre lit à l’étage. Ça prendrait moins de place et je crois… je
crois que ce serait plus chaud.
-
Et ton
enfant? Il ne va pas tomber?
-
C’est pour
ça qu’il faut que je réfléchisse…
-
Et tu
faisais quoi là-bas?
-
Rien… la
plupart du temps, soupira la jeune femme en jetant les derniers morceaux de
gingembre dans le bol de bois. C’était
terriblement ennuyant… Ne le dis pas à Caleb s’il-te-plait! Il le sait déjà,
mais je ne veux pas qu’il l’entende de quelqu’un d’autre. Mais la nourriture
était bonne. Tellement de variété, tellement de chose. Je vais m’en ennuyer…
C’est bien la seule chose.
-
Sa
famille?
-
Sa mère
est adorable, elle m’a tellement aider. Elle m’a appris la langue, elle m’a
appris leur coutumes et à broder… regarde.
Elle lui montra l’oiseau qu’elle avait
brodé sur le bas de sa jupe. Elle était heureuse d’avoir pu ramener du fil et
une aiguille avec elle. Elle n’en avait pas beaucoup, mais elle pourrait au
moins faire quelques points sur la couverture de son enfant. Elle regrettait de
ne pas avoir les même matériaux pour coudre qu’à Pontefort. C’était l’une des
rares choses dont elle s’ennuyait.
-
C’est très
joli, concéda Atwikan’iinosha en caressant les fils du bout des doigts. Dois-je assumée que tu es bonne avec tes
points de sutures?
-
J’ai un
frère, rétorqua la jeune femme. Un
père qui refusait de laisser quiconque défier son autorité et un mari qui aime
prouver qu’il est à la hauteur. Sans me vanter, j’ai eu beaucoup de pratique.
-
J’aimerais
te voir faire la prochaine fois que l’on en a l’occasion, ainsi que les
bandages et l’onguent approprié. Sais-tu comment réparer des fractures?
-
Je l’ai
fait à quelques reprises pour des doigts et un poignet.
-
Comment
gérer une blessure au cou ou au dos?
-
Réduire le
plus possible les mouvements de la personne. La confiner à un repos au lit, à
plat.
-
C’est un
bon début… Accouchement?
-
Quatre
fois, la première fois j’ai assisté ma mère, les autres fois j’ai aidé une sage-femme à Pontefort. Notamment la
femme du frère de Caleb. Je les aie aider avant que nous quittions. Elles ont
été intrigués par mes connaissances.
-
Prends les
pochettes, on va préparer des portions individuelles. Chaque expérience est
importante. En particulier si tu as travaillé avec des gens qui n’avaient pas
ta confiance au premier abord.
Osiaa’iiwakuna ne répondit pas. Atwikan’iinosha
avait raison. Elle termina de répartir la tisane dans les petits sachets et les
referma minutieusement. Elle les remit à l’eshamane qui les rangea dans un sac
pour les distribuer plus tard. Atwikan’iinosha fit signe à la jeune femme de
s’allonger. Elle s’exécuta, remontant sa tunique. Atwikan’iinosha appuya
doucement sur son ventre, palpant et massant doucement. Elle marqua une pose et
retira rapidement ses mains. De la surprise reconnu Osiaa’iiwakuna. Elle se
redressa sur ses coude et dévisagea son ainée.
-
Qu’est-ce
qu’il y a? Qu’est-ce que…
-
Tu… tu en
attends deux, souffla Atwikan’iinosha en tâtant à nouveau. Des wisti’sog.
-
Wisti’sog!
Comment… Es-tu certaine?
-
Oui… oh Osiaa!
C’est merveilleux. Tu peux bien être aussi grosse… deux enfants. Manikaw’opuu est
généreuse avec toi.
-
Je… je ne
peux pas en avoir deux… je ne…
-
Tout va
bien se passer, l’apaisa Atwikan’iinosha en lui caressant les cheveux. Ils ont l’air en bonne santé, très actifs.
Tu es forte. Caleb l’est aussi.
-
Mais… je…
Osiaa’iiwakuna se redressa,
observant son ventre puis Atwikan’iinosha. Deux enfants. Elle peinait encore à
s’imaginer avec un. Elle s’assit avec l’aide de Atwikan’iinosha, replaçant sa
tunique. Elle avait besoin d’un moment pour comprendre l’ampleur de la
situation. Atwikan’iinosha se tourna vers le pot d’argile qui chauffait depuis
un moment, elle versa une tasse d’eau chaude à la jeune femme et y versa un
mélange d’herbes. Elle l’offrit à la jeune femme qui la remercia d’un signe de
tête. Camomille, menthe et genévrier, Atwikan’iinosha désirait la calmer.
-
Ne le dis
pas à Caleb, soupira Osiaa’iiwakuna en relevant les yeux vers elle. Ni à
personne d’autre.
-
Pourquoi
pas? C’est une magnifique nouvelle.
-
Parce que
je veux que ce soit une surprise. Et si quelque chose va mal, je ne veux pas
qu’il soit déçu.
-
Comme tu
veux… D’ici là, je veux que tu te reposes. Tu es enceinte jusqu’au yeux déjà.
Tu es entre de bonnes mains et tu n’as rien à craindre maintenant.
Osiaa’iiwakuna baissa la tête.
Elle n’était pas totalement d’accord. Certes elle était en sécurité dans son
nouveau samaw, avec son oncle en guise de chef, mais Macihaawew rôdait encore
les parages. Elle n’avait pas de maison à elle. Caleb était un nouvel homme au
sein du samaw. Il allait devoir faire exécuter toutes les tâches que les autres
ne désiraient pas faire. Il allait
devoir prendre plus de risque que les autres pour se prouver.
Osiaa’iiwakuna quitta rapidement
par la suite, prétextant de la fatigue. Elle avait surtout besoin d’être seule.
Elle savait que sa belle-soeur allait être sortie et qu’elle aurait la hutte à
elle seule. Elle en avait besoin, elle avait besoin d’avoir un moment pour
elle, pour digérer la nouvelle. Deux enfants. Elle qui avait fait deux fausses
couches. Elle qui n’avait pas été capable de concevoir pendant des mois. Elle
se demandait si elle devait regretter ses offrandes répétées à la Mère ou la
remercier pour cette bénédiction.
Elle se glissa sous le pan de la
porte et alla s’allonger sur son lit. Elle soupira, son souffle saccadé. Elle
se surprenait elle-même d’être si anxieuse. Elle passa ses mains sur son
ventre, tâtant et massant comme elle l’avait appris. Elle avait été si naïve,
si admirative de sa grossesse qu’elle n’avait pas porter attention au signe.
Elle avait été si absorbé par leur fuite, par leur sécurité qu’elle n’avait pas
été alerte à ce qui se passait à l’intérieur d’elle.
Elle tâta le premier bébé, puis
le second qui lui valut un coup de pied. Elle rit doucement, s’excusant de
l’avoir réveillé. Elle continua son observation. Comment avait-elle pu manquer
qu’il s’agissait de deux enfants différents? Elle qui voulait devenir eshamane,
comment avait-elle été si aveugle?
Elle ferma les yeux un instant,
ce n’était pas totalement un mensonge lorsqu’elle avait dit qu’elle était
fatiguée. Elle remonta son hameliriek sur elle, couvrant son ventre. La Mère
avait décider de lui offrir sa bénédiction, elle allait certainement lui offrir
sa protection. Elle caressa le poil de
son hameliriek doucement, suivant la
courbe de son ventre.
Elle se réveilla au contact de
lèvres sur son front. Elle ouvrit les yeux confuse, découvrant Caleb penché
au-dessus d’elle. Elle lui sourit et s’étira, elle ne s’était pas rendu compte
qu’elle s’était endormie. Il l’embrassa doucement, elle lui rendit. Elle était
heureuse de le voir, s’étonnant qu’il soit aussi tard. Elle se redressa sur ses
coudes, découvrant Tlig’gohpa qui avait déjà commencer à cuisiner tranquillement.
Elle n’avait eu aucune idée de sa présence.
-
Bien
dormi, lui demanda Caleb en l’aidant à s’asseoir.
-
Visiblement
oui, répondit-elle. Tlig, tu aurais
dû me réveiller pour que je t’aide.
-
Tu as
besoin de repos, répondit celle-ci en lui faisant signe de la main de ne
pas s’en faire. Je ne fais rien de
compliquer.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas et
se déplaça près du feu. Elle ne voulait pas que la jeune femme fasse tout pour
elle. Déjà qu’elle occupait presque la
moitié de sa maison. Elle n’avait pas besoin d’être un fardeau de plus. Tlig’gohpa
semblait quelque peu triste, gardant la tête basse. Osiaa’iiwakuna se doutait
bien de la raison, elle n’avait pas eu la confirmation tant attendue. Elle lui
prit doucement la main et lui sourit. Le moment viendrait suffisamment
rapidement.
Chapitre 3
Osiaa’iiwakuna accompagna Atwikan’iinosha
dans sa ronde. Elle avait quelques patients à visiter et tenait à ce que la
jeune femme la suive. Cette dernière en était heureuse, elle devait apprendre
les noms, apprendre leurs problèmes et se faire connaître d’eux. Son nom était
sur toutes les lèvres, naturellement. Celle qui était revenue. Celle qui avait
vu les Grandes Plaines. Celle qui avait épouser l’eirezt et qui avait vécus
avec les siens. Celle qui attendait ses jumeaux, bien que seule elle et Atwikan’iinosha
le savait. Elle devait leur montrer qui elle était réellement.
La dernière fois qu’elle avait
fait une tournée, elle était en compagnie de sa mère, la veille de l’attaque.
La raison pour laquelle d’ailleurs elle avait dû aller chercher des herbes le
lendemain. La vieille Amarante ayant besoin de plus de thym et de menthe pour
calmer son mal de gorge. Osiaa’iiwakuna avait toujours douté de la véracité de
son mal de gorge, étant certaine qu’elle désirait une tisane simplement car
elle en appréciait le goût et qu’elle peinait à trouver le thym caché dans les
montagnes.
Elles se glissèrent dans la
première hutte où une vieille dame était étendue dans son lit. Elle était
horriblement maigre réalisa Osiaa’iiwakuna, la peau de sur son visage collant à
son crâne. Ses mains agrippée à son hamelierek étaient pratiquement juste des
os. Elle savait ce qui causait cette situation. Elle savait que la dame
souffrait énormément.
Atwikan’iinosha s’agenouilla près
de la vieille dame, lui prenant une main. Elle lui parla doucement, lentement, prenant
de ses nouvelles et s’assurant qu’elle était confortable. La dame marmonna
quelque chose tout bas, trop bas pour que Osiaa’iiwakuna entende. Atwikan’iinosha
la présenta, faisant signe à Osiaa’iiwakuna d’approcher et de prendre la main
de la dame, nommé Agathe. Osiaa’iiwakuna s’exécuta rapidement, la dame avait
clairement des problèmes de visions.
-
Quelle
jolie jeune fille, dit-elle en lui serrait la main du plus qu’elle le
pouvait. Elle ressemble à sa mère. Et
elle apprends également à être une eshamane.
-
Ma mère, souffla
Osiaa’iiwakuna surprise.
Naturellement qu’Agathe devait
connaître sa mère. Elle était de ce samaw. Elle avait étudier pour être eshamane
avec Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna lui serra la main à son tour, lui assurant
qu’elle ferait tout pour être aussi douée que sa mère. La dame hocha doucement
de la tête. Atwikan’iinosha s’assura de rendre la dame confortable et mis de
l’eau à bouillir. Osiaa’iiwakuna s’assit au sol, ouvrant son sac. Ses soins
n’étaient pas compliqués. Osiaa’iiwakuna avait souvent assisté sa mère avec Amarante.
Elle ce n’était pas une tâche qu’elle aimait particulièrement, mais elle ne
pouvait pas s’y soustraire.
Atwikan’iinosha apporta l’eau
chaude et un linge. Elle s’occupa de laver la dame avec soin. Osiaa’iiwakuna la
regarda faire humblement avant de s’attarder à la tisane que l’eshamane lui
avait demandé de préparer. Elle s’exécuta rapidement, préférant nettement cette
tâche. Elle ne connaissait pas la dame, et déjà qu’elle la voyait nue, elle
n’avait aucunement l’intention d’imposer sa présence à elle encore plus.
Elles quittèrent la hutte
d’Agathe quelques minutes après. Elles avaient d’autres patients à voir. Osiaa’iiwakuna
suivit son ainée à travers le dédale de huttes esquivant les enfants qui
jouaient. Osiaa’iiwakuna sourit doucement lorsque un petit garçon s’enfargea
dans ses propres pieds et s’étala de tout son long. Il se releva sans peine,
continuant sa course vers une fillette quelque peu plus âgée. Cette dernière
était bien plus agile sur ses pieds, sautant au-dessus d’un panier d’osier
comme une simple brindille.
Atwikan’iinosha l’entraina par le
bras loin des deux enfants, vers la hutte la plus isolée près de la forêt. Osiaa’iiwakuna
savait que s’était la hutte de son oncle Normen’itaken’itaken.
-
Mon oncle, demanda Osiaa’iiwakuna en se
tournant vers Atwikan’iinosha.
-
Il s’est brûlé la main hier soir,
répondit-elle en secouant doucement la
tête. Rien d’extraordinaire, mais comme les hommes de ta famille ne sont pas
reconnu pour prendre soin d’eux… J’ai cru bon que nous lui rendions visite.
-
Je ne l’ai pas vue depuis des années, il
n’était pas là au conseil…
-
Oh… Normen’itaken’itaken ne voit plus
l’intérêt d’y aller. La vie politique ne l’a jamais vraiment intéressé en fait
je crois. Lui et Taakligit aiment bien être seuls, tranquilles dans leur coin. Tes
cousins s’occupent de ça maintenant.
-
Je n’ai jamais rencontrer sa femme.
Savent-ils que je suis ici?
-
Je ne sais pas très chère.
Atwikan’iinosha cogna contre le
montant de la porte et entra en s’annonçant, Osiaa’iiwakuna soupira et la
suivit. L’intérieur n’avait rien d’extraordinaire, mais le couple était
visiblement bien installé. Normen’itaken’itaken était assis près du feu,
caressant sa main absentement sa main bandée en regardant sa femme modeler une
assiette en argile. Elle y dessinait de fins motifs floraux avec attention.
-
Comment va la main, Normen’itaken, demanda
Atwikan’iinosha sans même salutation.
-
Si il arrêtait de jouer avec, elle irait
mieux, répondit Taakligit sans lever les yeux de son travail. Qui
est-ce?
-
Osiaa’iiwakuna, répondit la concernée. La
fille de Magwe’ha.
Normen’itaken’itaken tourna la
tête vers elle, incrédule. Il se leva et s’avança vers elle, détaillant son visage
et fit un pas de recul en découvrant son ventre. Elle lui sourit légèrement
posant une main sur son ventre.
-
Osiaa’iiwakuna, s’étonna-t-il en
approchant un peu plus. Je croyais que…
-
C’est une longue histoire, répondit
simplement la jeune femme.
-
Histoire que tu aurais su si tu étais allé au
Conseil il y a quatre jours, dit Atwikan’iinosha en lui faisant signe de
lui montrer sa main. Ta nièce a échappé aux monstres avec l’aide de son
mari.
-
Qui!
-
Caleb, répondit Osiaa’iiwakuna.
-
L’eirezt? L’eirezt d’Ohpanii’toraqm'atname?
-
Oui lui, l’interrompit Osiaa’iiwakuna
agacé qu’il utilise ce terme. Il m’a amené dans son samaw à lui, dans les
plaines. Nous y sommes rester un peu plus de deux ans avant de revenir dans les
montagnes. Le conseil nous a accepté parmi vous il y a quatre jours.
-
Et depuis quand… depuis quand êtes-vous
marié? Maddduch n’aurait jamais…
-
Non, nous nous sommes marié parmi ses gens.
-
Volontairement?
-
C’est assez Normen’itaken’itaken, si tu
voulais savoir l’histoire, tu devais aller au conseil, intervint Atwikan’iinosha
en lui faisant signe de s’asseoir. On est ici pour jeter un coup d’œil à ta
main.
-
Ma nièce est mariée à un eirezt, enceinte et
je dois…
-
Aurais-tu mieux aimé qu’elle épouse Macihaawew,
demanda Taakligit toujours aussi attentive à son art.
Violette observa sa tante. Elle
avait de long cheveux grisonnant lousse. Sa concentration et sa minutie ne
s’altéraient guère lorsqu’elle parlait. Normen’itaken’itaken grogna en prenant
place. Osiaa’iiwakuna ne pouvait qu’apprécier l’interjection de sa tante. De ce
qu’elle avait compris des dernier jours, Macihaawew ne semblait pas
particulièrement apprécié du samaw. Osiaa’iiwakuna comprenait le désarrois de
son oncle, elle le voyait constamment dans les membres du samaw. Ils étaient
tous tout aussi confus de la voir marié à un étranger. Elle savait cependant
que ce moment allait passer, que Caleb allait faire ses preuves. D’autant plus
qu’en tant qu’eshamane, elle allait aider à changer cette perception.
-
Et tu es heureuse d’être sa femme, demanda Normen’itaken’itaken
après un moment de silence.
-
Normen’itaken’itaken, soupira Atwikan’iinosha.
-
C’est une question honnête, se
défendit-il.
-
J’en suis très heureuse, répondit-elle en
observant la brûlure. Comment? Comment as-tu réussi à faire ça?
-
En se mettant la main dans le four sans
protection, répondit Taakligit platement. Pour récupérer la laideur
qu’il avait fait. Je lui ai mis un bandage mais…
-
Tu as bien fait de me demander de passer, intervint
Atwikan’iinosha en se tournant vers sa collègue. Osiaa’iiwakuna, tu sais
quoi faire?
-
Osiaa, s’étonna Normen’itaken’itaken.
-
Ta nièce désire poursuivre dans les pas de ta
sœur. Elle a besoin de se pratiquer.
Normen’itaken’itaken soupira et
tendit la main vers sa nièce. Elle la prit avec délicatesse et observa la
brulure. Elle était sévère à l’intérieur de la paume. Il avait visiblement
attraper le morceau d’argile à main nue. Elle la lâcha et ouvrit son sac,
cherchant à la pommade qu’elle y avait mis plus tôt. La plaie était heureusement
nettoyé en bonne partie. Taakligit l’avait certainement fait sous les
recommandation de Atwikan’iinosha.
-
J’ai peur qu’il y ait de la nécrose qui se
forme, dit Osiaa’iiwakuna en se tournant vers Atwikan’iinosha. J’appliquerais
de la pommade, mais je suggèrerai de faire des visites quotidienne pour
prévenir.
-
De la quoi, demanda Normen’itaken’itaken.
-
Que la peau qui a été gravement endommagée
devienne noire et meurt, expliqua Osiaa’iiwakuna plus rapidement que l’eshamane
en lui montrant la section a risque. Nous pouvons prévenir son apparition,
mais si cela se produit, nous n’aurons pas le choix de retirer ce qui est mort
afin d’éviter que cela se propage. Tu comprends?
-
Je crois, répondit-il.
-
Je n’aurais pas pu dire mieux, soutint Atwikan’iinosha.
Et oui, je suis d’accord avec toi. Nous allons devoir garde un œil sur cette
main. Je n’aime pas cette partie ici… Tu peux appliquer l’onguent. Tu vas nous
voir souvent au courant des prochains jours… Des conseils pour la suite?
-
Ne pas la mouillée tout d’abord… éviter la
chaleur et éviter tout exercices la stimulant trop. De toutes façons, je me
doute qu’avec la douleur, ce sera facile. Le baume que je suis en train
d’appliquer aidera avec la cicatrisation ainsi qu’avec la douleur, mais il ne
fera pas de miracle. Il faudra être patient.
Elle jeta un coup d’œil à Atwikan’iinosha
qui hocha doucement la tête. Elle n’avait rien à ajouter. La jeune femme
continua avec le bandage, s’assurant que l’homme était confortable avec la
pression. Elle le termina et laissa son ainée l’examiner. Cette dernière n’y
changea rien et remit un sachet de tisane à Taakligit qui lui fit signe de
poser près d’elle, toujours absorbé par son art. Atwikan’iinosha ordonna une
dernière fois à Normen’itaken’itaken de faire attention à sa main en se
relevant, avant d’aider Osiaa’iiwakuna à en faire autant.
-
Osiaa’iiwakuna, l’appela Normen’itaken’itaken
lorsqu’elle s’apprêterait à sortir.
-
Oui?
-
Ta mère serait fière de toi.
Osiaa’iiwakuna hocha doucement de
la tête. Elle ne savait pas quoi réponde. Il l’avait vue à peine quelque
minutes, comment pouvait-il en être aussi certain. Elle suivit Atwikan’iinosha
à l’extérieur, confuse. Elle suivit Atwikan’iinosha pour ses prochaines
visites, mais sa tête n’y était pas. Elle était encore perturbée par sa
rencontre avec son oncle. Atwikan’iinosha sembla comprendre son absence et ne
fit aucun commentaire, la remerciant pour ses services à la fin de la journée,
l’escortant jusqu’à la hutte de Saapamiikt. Osiaa’iiwakuna la remercia, lui
remettant son sac, mais l’eshamane lui proposa de le garder.
Osiaa’iiwakuna rentra en
soupirant, trouvant Tlig’gohpa en plein atelier de couture. Les hommes n’était
pas encore rentré à sa déception. Elle désirait parler à son mari. Elle avait
besoin de son écoute, et de ses conseils. Tlig’gohpa la salua sans relever la
tête, elle était concentrée sur son ouvrage. Elle reprisait le manteau de Saapamiikt.
Ce dernier l’avait déchiré en luttant avec Noreck au découragement de sa femme
qui deux semaines à peine auparavant l’avait réparé.
Osiaa’iiwakuna s’installa en face
d’elle, inspectant le contenue du sac.. Son attention avait entièrement été
diriger sur ce qu’Agathe et Normen’itaken’itaken lui avait dit. Depuis
l’attaque, elle avait souvent penser à sa mère, mais jamais autant que durant
ces derniers jours. Elle était enceinte de deux enfants, sans maison. Les
derniers mois avaient été chaotiques et elle était soulagée qu’ils s’en soient
sortis sains et saufs, qu’ils soient en sécurité avec le samaw, mais elle était
horriblement seule. Elle n’avait pas sa mère pour l’aider, elle n’était pas là
pour la réconforter, pour lui dire à quelle point elle était fière d’elle, pour
lui dire que tout allait bien aller. Elle avait besoin d’entendre ses choses.
Elle avait besoin d’être prises dans ses bras et de se faire réassurer.
Caleb passa sous le pan de la
porte et salua les deux jeunes femmes. Osiaa’iiwakuna releva la tête vers lui, essuyant
sa joue. Elle n’avait pas remarqué qu’elle pleurait jusqu’à ce qu’il entre.
-
Tout va bien, Kuna, lui demanda-t-il en
venant s’agenouiller près d’elle. Kuna, dis-moi.
-
Je m’ennuie…
de ma mère, articula-t-elle difficilement.
-
Oh, s’adoucissa-t-il en la serrant
contre lui.
-
Elle ne sera pas là lorsque les… lorsque je
vais accoucher, explosa-t-elle en sanglots. Qui est-ce qui … qui restera
à mes côtés pour m’aider? Je n’ai pas personne.
-
Tu m’as moi, lui dit-il en essayant de la
calmer.
-
C’est pas pareille! J’ai besoin de quelqu’un
qui a déjà vécu ça . J’ai besoin… j’ai besoin de… de ma mère. Tout le monde ici
n’arrête pas de me dire à quel point je lui ressemble… je ne… je ne sais même
pas… je ne sais même pas si je lui ressemble. Je ne suis même plus… je ne suis
même plus certaine à quoi elle ressemble. Ça fait trois ans, Caleb… trois ans…
Je ne sais même pas si elle est encore en vie! J’ai besoin d’elle.
-
Tu n’as pas besoin d’elle, Kuna, lui
dit-il doucement en lui caressant les cheveux. Tu es forte. Tu es capable de
bien plus que ce que tu penses. Tout vas bien aller.
-
On a pas de maison Caleb, répliqua-t-elle
en se tournant rapidement vers lui. On a rien à nous.
-
Kuna… faut que tu me laisse le temps de nous
construire ça. J’ai commencé à…
-
Je n’ai pas le temps de te laisser le temps.
-
Je te promets. Je vais nous avoir quelque
chose d’habitable… Toi et notre enfant allez être en sécurité.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas,
continuant de pleurer contre le torse de son mari. Il la serra contre lui. Il
comprenait sa détresse, il comprenait son angoisse, mais il ne comprenait pas
pourquoi aujourd’hui tous remontaient à la surface. Il jeta un coup d’œil à Tlig’gohpa
qui avait pris une pause dans son travail. Elle était visiblement intriguée du
débordement d’émotion de sa belle-sœur. Elle repoussa le manteau et se dirigea
vers eux. Elle caressa le dos de Osiaa’iiwakuna doucement en lui affirmant
qu’elle ne serait pas seule.
Osiaa’iiwakuna hocha la tête
doucement, essuyant ses joues. Elle ne voulait pas que Caleb la relâche, pas
encore. Elle avait besoin d’être dans ses bras encore un moment. Elle le sentit
échangé un regard avec Tlig’gohpa, certainement désireux d’avoir un peu plus
d’information au sujet de cette crise de larmes.
-
Je pensais que tu passais la journée avec Atwikan’iinosha,
lui dit-il en la repoussant doucement. Ça n’a pas bien été?
-
Oui, soupira Osiaa’iiwakuna en essuyant
ses yeux. Enfin… tout le monde… tout le monde dit que je ressemble à ma mère,
mais….
-
Tu lui ressembles. Beaucoup.
-
Mais… mais je ne, marmonna-t-elle en
recommençant à pleurer.
Elle n’était pas capable
d’articuler ses émotions. Elle n’était pas capable d’exprimer que s’être fait
comparer à sa mère toute la journée avait été horriblement difficile. Elle se
contenta de secouer la tête, caressant son ventre au passages. Ses bébés
étaient actifs, elle les sentaient s’agiter en ce moment. Caleb remarqua le
geste et posa également sa main sur son ventre, souriant doucement.
-
Il est bien en forme, dit-il en lui souriant.
-
Toute la journée, répondit-elle avec un léger
soupire. Je ne sais pas pourquoi aujourd’hui… pour me donner encore plus de
peine avec ce que je devais faire.
-
Je suis sur que tu as été très bien, plus
même. Tu es une excellente eshamane.
-
Je ne le suis pas encore…
-
Tu es une excellente apprentie eshamane, se
reprit-il en riant doucement.
Elle hocha de la tête. Il lui
essuya la joue en la faisant sourire doucement. Elle repoussa le sac qui était
encore sur ses genoux, et prit celui de son mari. Il avait trouvé un lapin
qu’il avait déjà dépecé. Elle prit un moment à observer la bête. C’était un bon
lapin adulte, assez gros pour eux quatre pour la soirée. Elle le remercia et
entama le repas. Cela lui donnait une raison de penser à autre chose. Tlig’gohpa
l’aida, préparant des diverses racines et les quelques baies qu’ils leur
restaient.
-
As-tu vu Saapamiikt, demanda Tlig’gohpa à
l’adresse de Caleb.
-
Pas depuis ce matin, répondit celui-ci en
prenant l’outre afin d’aller la remplir. Besoin d’autre chose, que de l’eau?
Et je pense qu’il devait parler à Nopokemi’aatna… mais je ne suis pas certain.
-
Nopokemi’aatna, s’étonna-t-elle. Il ne
m’a pas parler de rien. À moins que ce soit pour la rotation?
Caleb haussa les épaules et se
glissa sous le battant de la porte. Tlig’gohpa se tourna vers sa belle-sœur.
Ses yeux étaient encore rouges et gonflés. La jeune femme hésita à essayer de
la réconforter, elle semblait avoir besoin d’être laissée en paix pour le
moment. Elle l’aida en silence, préférant que Osiaa’iiwakuna amorce la
conversation. Elle n’était pas quelqu’un qui était particulièrement confortable
dans les silences. Elle avait grandi avec trois frères et sœurs, elle aimait
l’activité, le mouvement et bien qu’elle trouvait qu’il manquait d’intimité
avec Saapamiikt depuis leur arrivé, elle aimait le va et vient.
Caleb revint rapidement, trouvant
les jeunes femmes dans le même silence qu’il les avaient laissé. Il passa l’eau
à Tlig’gohpa. Il retourna prendre place près de sa femme en lui imposant sa
présence. Il savait que lorsqu’elle était triste ou anxieuse, elle avait besoin
de le sentir près d’elle. Il lui caressa doucement le dos, la regardant
décortiqué le lapin cru et le mettre à rôtir en morceaux sur la pierre. Elle le
faisait avec tant d’aisance, malgré les années passées à Pontefort.
Saapamiikt revint peu avant le
coucher du soleil, après qu’ils eurent souper. Il s’excusa rapidement auprès de
sa femme, l’embrassant doucement en venant prendre place près du feu. Elle lui
reprocha son retard, lui demandant de l’aviser la prochaine fois et lui força
son assiette entre les mains. Il s’excusa à nouveau, le lui promettant, mais
expliqua rapidement qu’il était allé discuter avec Nopokemi’aatna pour la
vigie.
-
Je lui ai dit que j’étais disponible pour la
prochaine ronde, dit-il en savourant le lapin.
-
La prochaine, demanda Tlig’gohpa
perplexe. Celle qui commence à la pleine lune? Pourquoi?
-
Parce que si je n’y vais pas à celle-ci, ça…
ça va nuire pour la suite des choses, si tu vois ce que je veux dire.
-
Je… quoi? Oh!
Osiaa’iiwakuna n’avait pas manqué
la conversation. Visiblement si Tlig’gohpa sentait de la pression pour produire
un enfant, Saapamiikt n’aidait en rien. Elle se doutait que de la voir dans cet
état ne faisait qu’encourager son désir. Elle jeta un coup d’œil à Caleb qui ne
semblait pas comprendre la discussion, puisqu’il enchaina.
-
Je croyais que je devais faire la prochaine
ronde, intervint-il.
-
De quoi tu devais faire la prochaine ronde, s’étonna
Osiaa’iiwakuna en se tournant vers lui. Je suis enceinte de huit lune et tu
pensais te sauver dans le bois!
-
Je pensais y aller avant que tu accouches
oui. Préfères-tu que je partes lorsque tu auras accouché? Saapamiikt, j’avais
pris l’arrangement avec Nopokemi.
-
Je sais, mais ce ne serait pas ta vigie, dit-il
entre deux bouchées. Celle a Nurzt.
-
Et elles resteraient seules? Kuna a besoin…
-
Ne me prends pas pour excuse!
-
Je ne veux pas que tu restes seule ici avec Macihaawew.
Je n’aie pas confiance en lui. Et je sais que tu veux ta hutte le plus rapidement
possible. Je sais, mais je ne crois pas qu’il y aie un meilleur moment.
-
Et tu penses être revenu pour…
-
Je pense que de toutes façons, je ne serai
pas avec toi à ce moment. Tu vas être avec Atwikan’iinosha et les ainées, elles
vont certainement pouvoir t’épauler le temps que je revienne. Et j’aime mieux
te savoir en sécurité, au chaud.
-
Donc tu es en train de me dire que tu ne construiras
pas notre hutte!
-
Non je suis en train de dire, que même si
elle est construite, elle ne sera pas assez avancée pour avoir un nouveau-né.
J’ai besoin de temps pour faire les choses proprement et tu as besoin de calme
et te préparer la tête reposer et…
-
Je serais plus reposée et calme si j’avais ma
propre maison, répliqua-t-elle sèchement en filliandrien. Je ne veux pas avoir
mon enfant chez mon frère!
-
Et je ne veux pas que l’on se précipite et que
tu gèles ou notre enfant. Et Saapamiikt ne s’en plaint pas…
-
Je m’en plains, riposta-t-elle. Et s’ils ne s’en
plaignent pas, c’est parce que c’est contraire à nos principes. Je suis sa
famille, il ne peut pas me jeter dehors.
-
Kuna, je ne peux pas te faire plaisir et faire
plaisir à ton oncle en même temps en ce moment. Et comme on vient de se faire accepter
au sein de son samaw, je ne pouvais pas dire non à faire une ronde dans les
prochains mois. En échange, il va me trouver de l’aide pour la hutte. Je ne
sais comment faire autrement.
Osiaa’iiwakuna soupira et se
renfrogna. Elle se leva et se dirigea vers leur lit, refusant de poursuivre la
conversation. Elle n’en avait pas la force. Elle avait eu une longue et
difficile journée elle n’avait pas besoin d’ajouter une confrontation avec
Caleb à la liste. Elle entendit Caleb soupirer et les buches bouger. Tlig’gohpa
et Saapamiikt argumentaient toujours à voix basse. Elle sentit Caleb venir
s’installer près d’elle, mais il ne se glissa pas sous l’hameliriek. Il avait pris
l’habitude de faire ainsi lorsqu’ils se disputaient.
Toutefois, maintenant qu’ils
étaient quelque peu éloignés du feu, Osiaa’iiwakuna frissonnait. Même son
hameliriek n’était pas assez chaud en cette nuit froide. Elle était trop fière
cependant pour demander à Caleb de se rapprocher. Ce dernier la sentie grelotter. Il se glissa sous l’épaisse fourrure, la
serrant contre lui. Elle glissa ses doigts entre les siens, ramenant sa main
sur son ventre. Malgré toutes ses angoisses, elle ne pouvait rien demander de
plus de Caleb que d’être près d’elle lorsqu’elle avait froid. Il lui murmura
doucement qu’il l’aimait en filliandrien l’embrassant dans le cou. Osiaa’iiwakuna
n’en doutait pas.
Chapitre 3
Caleb descendit le long de la
corniche, cherchant les traces d’un cerf ou d’une autre proie. Il n’avait pas
été chanceux dans les derniers jours. Toutes les bêtes de la région semblaient
s’être volatilisées. Il se glissa silencieusement entre deux rochers, faisant
attention que son arc ne cogne pas contre eux. L’absence de proie de bonne
dimension commençait à l’inquiété comme il quittait dans quelque jours. Osiaa’iiwakuna
devait pouvoir se sustenter en attendant son retour. Il était d’autant plus
anxieux que Saapamiikt allait également être absent.
Passant près d’un ruisseau, il
s’arrêta boire un instant, savourant l’eau cristalline et fraiche. Elle n’était
pas encore glaciale, l’hiver ne faisait que commencer. Les arbres possédaient
encore quelques feuilles orangées et la neige ne recouvrait pas encore les
conifères. Bientôt, le ruisseau ne serait plus qu’une ligne sinueuse de glace
et la forêt s’endormirait. Les bruissement du vent dans les arbres se tairait
jusqu’au printemps, laissant place à un mutisme impeccable ou à de violentes
rafales au sifflement aigues lors des tempêtes. Les crépitements et clapotis de
la pluie avaient déjà fait place au flocon silencieux, tombant lâchement en
dansant au gré du vent jusqu’au sol.
Il soupira de soulagement
lorsqu’il trouva finalement la piste d’un cerf. Ce n’était pas un gros animal,
de ce qu’il lisait au sol, à peine un an certainement. Il suivit la piste
rapidement. Elle était fraiche, il était passé par là à peine quelques heures
auparavant. Il s’assurait également de prendre des repères visuel, n’était pas
encore accoutumé à cette forêt. La dernière chose qu’il voulait était de se
perdre pour un cerf.
Il trouva finalement la bête qui broutait
tranquillement dans la clairière. Il était jeune comme Caleb avait lu dans ses
traces, mais bien assez gros pour que Osiaa’iiwakuna puisse s’alimenter
convenablement, en plus de Tlig’gohpa au besoin pour la prochaine lune. Il
n’allait pas non plus prendre le risque de le laisser partir, la chance n’était
pas de son côté depuis quelques jours.
Il banda son arc, relâcha et à sa
propre surprise, atteint la bête à travers l’œil. Il n’avait jamais
particulièrement eu un bon visou. La bête s’écroula au sol dans un bruit mat. Morte
sur le coup, sans souffrance, sans même avoir eu le temps d’être surprise. Il
s’en approcha, inspectant sa prise. Osiaa’iiwakuna allait être heureuse. Elle
allait pouvoir avoir l’esprit tranquille et lui aussi. Il ne lui avait jamais
ramener un aussi gros butin, réalisa-t-il. Un cerf avait toujours été considéré
plus inconvénient lors de leur exode.
Il passa le cerf au-dessus de ses
épaules et reprit le chemin du village. Maintenant qu’il n’avait plus besoin de
crapahuter discrètement, il avançait bien plus vite, reprenant ses propres pas
pour revenir. La fine neige lui offrait la meilleure des cartes. Il s’étonna
rapidement de voir à quel point il s’était aventuré loin du village. Le temps
s’était évaporer dans sa traque.
Il regagna finalement le village,
le trajet de retour lui ayant semblé interminable. Il croisa Nopokemi’aatna qui
fut le félicita pour sa proie. Certes
par habitude, n’importe qui d’autre aurait eu les mêmes félicitations, mais
Caleb était heureux d’avoir le même traitement que les autres. Pendant des
années il avait fait de son mieux pour se faire accepter. Comme peu d’entre-eux
l’avaient vue se démener pour comprendre les bases de leur société son
intégration passait mieux au sein du samaw de Nopokemi’aatna.
Il arriva à la hutte et laissa
choir la bête dans un bruit mat au sol. Il appela Osiaa’iiwakuna, mais elle ne
se trouvait pas à l’intérieur. Il soupira, quelque peu déçu de ne pas pouvoir
se vanter quelque peu. Il se doutait qu’elle devait accompagnée Atwikan’iinosha.
Décidé à la trouver, il poussa le cerf à l’intérieur, le mettant à l’abris du vent
et des animaux, ainsi que des autres. Il avait déjà entendu des rumeurs
concernant des vols de butins, bien qu’il ne les croyait pas vraiment. Les pawakenakie’ii
n’avaient pas l’habitude de voler.
Il arpenta les ruelles entre les
huttes, cherchant à entendre sa femme. Il croisa Saapamiikt qui lui indiqua la
hutte de son oncle. Caleb le remercia et s’y rendit. Il attendit patiemment à
l’extérieur, prenant un gorgée d’eau de son outre. Atwikan’iinosha sortie en
premier, le salua. Osiaa’iiwakuna fut surprise de voir son mari de retour de sa
chasse aussi rapidement et l’enlaça, plaquant sa tête contre son torse.
-
J’ai un cerf pour toi, lui annonça-t-il
triomphant.
-
Un cerf, s’étonna-t-elle en se reculant
quelque peu. Tu ne m’as jamais ramener de cerfs. Il est gros?
-
Assez pour que toi et Tlig vous puissiez en
échanger avec d’autres gens pour ce dont tu aurais besoin. Je l’ai laissé à la
hutte.
-
L’as-tu saigné?
-
Naturellement, pourquoi?
-
Hum… j’aurais utilisé son sang, mais ce n’est
pas grave. Une autre fois.
-
Es-tu libre, demanda-t-il en jetant un
coup d’œil à Atwikan’iinosha qui patientait non loin. Est-ce qu’elle encore
à besoin de toi?
-
Pour un moment encore. Je te rejoins ensuite
d’accord?
Caleb l’embrassa doucement. Il la
regarda quitter avec l’eshamane et soupira doucement. À peine étaient-elles hors
de vue que Normen’itaken’itaken se tira de sous le pan de la porte, inspectant
les environs.
-
Elles sont parties, demanda-t-il en se
tournant vers Caleb.
-
Parties vers là-bas, répondit Caleb en
désignant l’endroit où Osiaa’iiwakuna avait disparu d’un signe de tête.
-
Je ne supporte plus de les voir… enfin…
-
Osiaa peut avoir son penchant autoritaire,
confirma Caleb en riant doucement.. Brulure?
-
Hum, grommela l’homme en frottant le
bandage.
-
Nous n’avons pas eu l’occasion de nous
présenter. Caleb.
-
Normen’itaken’itaken. Je suis l’oncle d’Osiaa.
-
Je sais… Elle m’en a glisser mot.
-
La tradition voudrait que je te remercie
d’avoir pris soin d’elle… compte tenu des circonstances…
-
Je comprends que c’est quelque peu…
inattendu.
-
Pour dire le moins. J’imagine que comme mon
frère vous a autorisé à rester, une hutte est dans les plan.
-
Dès mon retour de vigie, assura Caleb en
soupirant légèrement. Nous n’avons pas suffisamment de matériel pour le
moment de toute façon et dans la condition de Osiaa… j’ai jugé mieux qu’elle
soit au chaud et en sécurité pendant mon absence.
-
Une décision raisonnable.
Caleb hocha de la tête. Il ne
savait pas quoi dire, tout n’était que banalités d’usure. Il salua l’homme, ne
désirant pas étirer cette conversation et se dirigea vers le centre du village.
Il n’eut que quelques pas à faire que la voix de Osiaa’iiwakuna lui parvint. Il
ne comprenait pas vraiment ce qu’elle lui disait, mais elle était en colère. Il
pressa le pas. Sa femme n’avait pas l’habitude de lever le ton sauf sous
provocation.
Il les trouva rapidement, Atwikan’iinosha
et Osiaa’iiwakuna en présence d’Macihaawew. Il maintenait Osiaa’iiwakuna par le
bras, l’empêchant de se sauver. Elle lui ordonna de la lâcher, mais in
n’obtempéra pas jusqu’à ce qu’Atwikan’iinosha intervienne. Caleb pressa le pas
et vient le rejoindre, se plaçant entre les deux femmes et l’homme. Ce dernier
le regarda avec dédain, rage. Osiaa’iiwakuna étira son bras vers Caleb et
essaya de le faire reculer. Là n’était pas le moment. Caleb lui jeta un bref
coup d’œil.
-
Va avec Atwikan’iinosha, lui dit-il en
Filliandrien. Maintenant.
-
Caleb… ne… Attend que les autres arrivent.
-
Kuna, va avec Atwikan’iinosha. Ne t’occupes pas
de moi.
-
Qu’est-ce que tu dis, beugla Macihaawew
encore plus furieux qu’ils discutent sans qu’il comprenne.
Wihkiskwa, appela Atwikan’iinosha en se tournant vers une jeune femme
passant près. Va chercher Nopokemi’aatna et les autres. Vite. Maintenant!
-
Atwikan’iinosha, vas-y, lui dit Osiaa’iiwakuna.
Tu sais toujours où tout le monde est. Va les chercher!
-
Hors de question, je reste avec vous. Recule.
-
Écoute, Atwikan’iinosha!
-
Caleb, l’implora Osiaa’iiwakuna en
essayant de se rapprocher de lui malgré la main de l’eshamane sur son bras.
-
Reste avec Atwikan’iinosha, rugit-il sévèrement
sans se retourner. Recule!
Osiaa’iiwakuna figea un instant,
il n’avait jamais été aussi sèche avec elle. Atwikan’iinosha la tira par le
bras documents, la faisant reculer avec elle. Macihaawew fit un pas vers elle,
mais Caleb se plaça instantanément sur son chemin. Il n’allait pas le laisser
la toucher. Macihaawew grogna et essaya de frapper Caleb qui esquiva
habilement. Atwikan’iinosha fit reculer Osiaa’iiwakuna un peu plus. La
situation était explosive et la jeune femme beaucoup trop enceinte pour être
coincée entre deux lutteurs.
Osiaa’iiwakuna se tourna vers son
ainée. Elle était inquiète. Caleb n’avait pas lutté depuis des mois, sauf avec
son frère et il s’agissait plus de passes d’échauffement. À Pontefort, il avait
beau avoir entrainé des soldats, ils étaient loin de la forme que les hommes du
samaw avaient. Macihaawew n’avait jamais particulièrement été rapide et agile,
mais il était massif, beaucoup plus imposant que lui. Elle craignait ce que le
moindre coup de poing, le moindre placage pouvait causer chez Caleb.
Nopokemi’aatna arriva rapidement
en compagnie de Meiren’aatok et de Makoswii. Osiaa’iiwakuna laissa échappée un
soupire anxieux. Makoswii était visiblement également hors de ses gonds. Nopokemi’aatna
vint près de Osiaa’iiwakuna la faisant reculer un peu plus. Elle obtempéra, ne
voulant pas que son inquiétude transparaisse. Elle ne devait pas leur donner
raison de penser qu’elle croyait que Caleb était plus faible que Macihaawew.
Pas après qu’ils aient tous deux affirmé qu’il l’avait emporter sur lui.
-
Tu l’as mis enceinte, eirezt, lança Macihaawew
à Caleb. Salopard, elle n’était pas à toi.
-
Elle n’était pas à toi non plus, rétorqua
Caleb.
-
Tu l’as volée!
-
Volée! Elle n’est pas un objet, gros con. Je
ne l’ai pas enlevé non plus.
-
Elle n’est pas tienne!
Macihaawew s’élança, mais Caleb
fut plus rapide esquivant le coup et lui en assainissant un en retour qui
fendit l’arcade sourcilière. Les
premières gouttes de sang se rependirent sur la neige fraiche. Osiaa’iiwakuna
soupira de soulagement. C’était un bon présage. Macihaawew grogna et se
retourna vivement, portant une main à son visage. Il essuya son sourcil
visiblement surpris qu’il saignait de la sorte.
Il contrattaqua rapidement, mais
Caleb le prit d’avance et le plaqua vivement au sol. Il lui assena deux coup de
poing et le relâcha. Il n’allait pas être accusé de triche, il allait le battre
en bonne et due forme. Il allait prouver qu’il était digne de sa femme. Il jeta
un bref coup d’œil à celle-ci qui hocha doucement de la tête en signe
d’encouragement. Macihaawew fonça vers lui sans grande surprise. Caleb
l’enfargea et il s’allongea de tout son long au sol dans un rire étouffé de la
foule qui s’était assemblée.
Osiaa’iiwakuna ne riait pas.
L’attention de la foule n’allait qu’accentué la colère d’Macihaawew. Elle
l’avait déjà vue agir ainsi, foncé aveuglement sur son adversaire, donner des
coups dans le vent. Elle avait vue également comment son adversaire avait fini.
Il avait l’air fou au départ, mais rapidement sa fureur devenait une boule de
puissance et de rage. Elle espérait simplement que Caleb se souvenait comme Devorch
avait fini.
Caleb le plaqua vivement au sol à
nouveau. Il recula rapidement. Il avait de la chance pour le moment. Macihaawew
avait déjà deux profondes coupures aux arcades sourcilières et une lèvre
fendue, mais il ne démordrait pas pour aussi peu. Comme de fait, il s’élança
vers Caleb qui ne réussit pas éviter, recevant le poing de son adversaire dans
les côtes. Le coup était bien plus puissant qu’il l’avait anticipé, lui coupant
le souffle et le faisant chanceler. Il n’avait pas reçu une telle décharge
depuis plus de deux ans. Sa surprise le ralenti, offrant la chance à Macihaawew
de frapper à nouveau, cette fois à la tête.
Osiaa’iiwakuna retint un
gémissement. Elle n’aimait pas la situation. Elle n’avait jamais eu à endurer
cette situation encore. À Pontefort, il était de loin le meilleur. Il avait battu
son frère déjà, mais il était grandement affaibli lors de leur match. En ce
moment, Macihaawew était au maximum de sa force et au maximum de sa rage. Caleb
n’avait plus l’habitude d’esquiver les coups, ni le réflexe de croire qu’ils pouvaient
lui être dommageable. Il réussit à esquiver le coup suivant, assène un en
retour qui fit chanceler Macihaawew. Caleb recula rapidement, préférant mettre
un peu plus de distance entre lui et son adversaire. Macihaawew se retint de
charger un moment, crachant du sang au sol.
Osiaa’iiwakuna était heureuse que
Caleb ne soit pas dans le même état. Elle était anxieuse tout de même. Le
moindre faux pas, la moindre inattention et il pourrait se retrouver au sol. Macihaawew
n’était pas un lutteur aussi galant que Caleb, il n’hésiterait pas à frapper
encore et encore. À de nombreuse reprises, les ainées avaient dû intervenir
pour le séparer de son opposant.
Caleb fut le premier des deux à
s’élancer. Il feinta habilement, portant son adversaire à esquiver vers la
gauche. Profitant de son débalancement, Caleb le frappa vivement au visage, le
projetant au sol pour la troisième fois. Il fut cependant entrainer dans la
chute, Macihaawew s’étant accroché à son manteau. Il roula habilement loin de son
adversaire et se releva d’un bond. Il préférait être sur ses pieds où il était
plus rapide et plus agile.
Toutefois, le pawakenakie’ii
l’enfargea le fit tombé violement sur le dos, lui coupant le souffle. Il essaya
de rouler à nouveau loin de son opposant, mais ce dernier gagna sur lui, lui
assena trois coup à la tête. Caleb vit des étoiles. Il parvint cependant à
éviter le quatrième, repoussant Macihaawew au sol. Il prit le dessus, laissant
tomber ses gants blancs. Il plaqua vivement son adversaire, un craquement sec
lui faisant comprendre qu’il lui avait brisé quelque chose.
Il le frappa, encore et encore, le maintenant
sous lui du mieux qu’il le pouvait. Il cessa lorsqu’il vit Macihaawew avoir de
la difficulté à garder contact avec la réalité. Il se releva essuya son arcade sourcilière
du revers de la main.
Macihaawew peinait à se
redresser, si bien que Nopokemi’aatna s’interposa, faisant reculer Caleb. Ce
dernier jeta un coup d’œil à Osiaa’iiwakuna. Elle était soulagée. Elle se
rapprocha de son mari, mais il lui fit signe d’attendre. Il ne voulait pas
qu’elle s’approche de Macihaawew, pas encore. Nopokemi’aatna fit s’agenouiller Macihaawew
comme le voulait la tradition et proclama Caleb vainqueur sous les
applaudissements et les encouragements de bedeaux.
Caleb laissa échapper un soupir
de soulagement et se rapprocha de sa femme qui s’élança vers lui. Elle ne
pouvait plus contenir ses émotions et maintenir un semblant de décontraction.
Elle se lova dans ses bras, retenant ses larmes de peine et de misère. Elle
avait eu si peur. Caleb l’embrassa doucement, tâchant de ne pas répandre son
sang sur elle. Elle lui effleura l’entre-jambe, lui murmurant à quel point elle
était fière de lui. Il lui retourna l’affection, conscient qu’ils étaient épié
de tous. Osiaa’iiwakuna lui sourit.
Toutefois, Caleb la poussa
vivement loin de lui. Elle heurta le sol avec force, sa respiration coupée.
Sous le choc, elle porta instinctivement une main à son ventre. Sa confusion
était totale. Elle entendit Atwikan’iinosha lancer des ordres, Nopokemi’aatna
en faire autant, mais elle ne comprenait pas ce qu’ils disaient. Elle entendait
la commotion autour d’elle, mais sa tête tournait. Elle avait dû la heurter au
sol. Elle tâcha de se relever, mais une douleur intense transperça son poignet
gauche. Elle vit Taakligit arrivée en courant vers elle. Sa
tante s’agenouilla au sol et l’aida à se redresser.
-
Osiaa, demanda-t-elle doucement en
l’aidant à s’asseoir. Tu vas bien?
-
Je crois, répondit-elle en portant à
nouveau une main sur son ventre. Caleb? Il… Je ne…
Elle se tourna vers lui. Son cœur
arrêta de battre un moment. Seul le manche du poignard dépassait du cou de son
mari retenu au sol par Nopokemi’aatna et Meiren’aatok. Toute la douleur et
toute la confusion s’évaporèrent de la
conscience de la jeune femme qui se précipita vers son mari. Elle s’agenouilla
près de lui, appliquant ses mains autour de la plaie et supplia sa tante
d’aller lui chercher sa trousse qu’elle avait laissé au sol quelque mètres plus
loin.
-
Kuna, réussit Caleb à articuler essayant de se
libérer de l’emprise de Meiren’aatok.
-
Ne bouge pas, lui ordonna-t-elle entre deux
sanglots. Ne bouge surtout pas!
-
Kuna, je…
-
Tu me diras plus tard, refusa-t-elle d’entendre.
Il perdait beaucoup trop de sang.
La lame avait dû endommager la carotide. Taakligit posa son sac près d’elle. Osiaa’iiwakuna
lui demanda de prendre le relais le temps qu’elle trouve ce dont elle avait
besoin. Elle devait faire en sorte qu’ils le déplacent à leur couche. Elle ne
pouvait cautériser la plaie ainsi à l’extérieur. Elle n’avait rien en fer à
proximité. Le couteau de chasse de Caleb était avec le cerf. Elle pansa rapidement
la plaie, la dague toujours en place et la sécurisa.
Chapitre 4
Osiaa’iiwakuna ignora son oncle.
Assise sur sa couche près de son mari, elle se contentait de coudre
tranquillement. Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’attaque de Macihaawew
contre elle. Quatre jours sans que Caleb n’ouvre les yeux. Il reposait
paisiblement, son souffle calme et le teint blême. Osiaa’iiwakuna n’avait pas
besoin d’entendre les rumeurs. Elle savait très bien que pour les Pawakenakie’ii
, un homme qui ne reprenait pas conscience après deux jours était considéré
mort. Or elle avait vécu dans les plaines. Elle avait entendu les histoires
de ces hommes qui revenait à la vie
après des mois de sommeil.
Nopokemi’aatna soupira, peu
impressionné par le mutisme de la jeune femme. Il lui conseilla de réfléchir durant
la nuit, lui assurant que peu importe sa décision il lui garantirait sa
protection à elle et à son enfant. Osiaa’iiwakuna resta impassible encore une
fois. Nopokemi’aatna quitta en la laissant seule avec ses pensées et son mari
inerte.
Elle n’avait pas besoin de
réfléchir. Caleb allait se réveiller, elle le savait. Il avait simplement
besoin de d’un peu plus de temps. Elle le sentait au plus profond d’elle-même. Il
ne l’avait pas poussé à traverser les vallées et les montagnes pour mourir
quelques semaines plus tard. Il était plus fort que ça. Il l’avait toujours
protégé, c’était maintenant à son tour. Elle ne laisserait aucun homme
l’approcher. Il n’irait pas rejoindre la lune et les étoiles aussi longtemps qu’elle
pourrait veiller sur lui.
Délaissant son ouvrage un moment,
elle se pencha sur lui. Elle lui caressa doucement les cheveux et déposa un
baiser sur ses lèvres. Elle avait fait un travail remarquable pour le soigner.
Elle avait réussi à impressionnée Atwikan’iinosha en recousant la carotide
rapidement avec du fil de miel et en cautérisant la plaie. Elle était fière du
travail qu’elle avait fait. Elle l’embrassa à nouveau, lui murmurant qu’elle ne
laisserait personne lui faire du mal et les séparer. Elle était persuadée qu’il
pouvait l’entendre. Elle croyait également qu’il était bien plus fort et
résilient que ses compatriotes. Elle se redressa péniblement, posant une main
sur son ventre. Atwikan’iinosha n’avait rien dit à Nopokemi’aatna à propos des jumeaux
réalisa-t-elle. Elle en était soulagée. Son oncle avait beau lui promettre que
des hommes forts et vaillants dans son samaw ne serait pas repoussé par une
veuve et son enfant, des jumeaux étaient une autre histoire. Elle savait que
certains hommes avaient un grand cœur, mais elle soupira et se rendit compte
qu’elle n’en avait jamais connu. Autant dans les plaines que dans les
montagnes, elle avait vu des hommes prendre des veuve et leur enfant sous leur
ailes. Cependant elle avait toujours trouvé que l’enfant du premier mariage
était délaissé au profit de la progéniture actuelle.
Elle ne voulait pas que ces
enfants subissent le même sort. Heureusement, en tant qu’eshamane, même
apprentie, elle avait moyen d’obtenir de la nourriture en échange de ses
services. Elle serait respectée, ses enfants également. Si elles étaient des
filles, elles suivraient possiblement ses traces. si la Mère lui offraient des
garçons, Saapamiikt et Nopokemi’aatna en feraient des hommes forts et elle
s’assurerait de bien les éduquer. Mais tout cela n’était que pure spéculation,
Caleb s’éveillerait bientôt.
Elle reprit sa couture en
soupirant doucement. Le cerf que Caleb lui avait trouvé avait été suffisamment
gros pour que sa peau lui soit utile. Elle avait pu confectionner un porte-bébé
suffisamment grand pour ses deux à venir. Elle sourit en voyant les points
qu’elle avait fait un peu plus tôt. Jamais n’avait-elle été aussi appliquée.
Elle allait broder les symboles de la Mère dessus. Elle les connaissaient bien,
sa propre couverture enfant en était couvert. Sa propre mère n’aurait jamais
accepté que ses enfants dorment dans sans protection. Elle avait encore les
fils de couleurs vives de Pontefort qui allait rendre les autres mères
jalouses.
Elle perdit le fil du temps et
s’étonna de voir Tlig’gohpa revenir, les cheveux couvert de neige. Certainement
cette dernière avait due s’accumulée sur la hutte, la coupant des bruits
extérieurs. Elle n’en s’en plaignait pas. Elle ne voulait pas voir personne. Tlig’gohpa
resta silencieuse. Depuis que Caleb était sans connaissance, elle était
distante. Elle n’était pas à l’aise avec les malades, ce n’était pas la
première fois qu’elle la agir de la sorte. Elle comprenait également sa
réticence. Elle n’avait pas besoin de plus d’explication.
Elles mangèrent en silence, près
du feu et se séparèrent aussi tôt. Osiaa’iiwakuna retourna s’allonger près de
Caleb. Elle lui prit la main, la posant sur son ventre distendu. Elle était certaine
qu’il pouvait sentir et entendre ce qui se passait autour d’elle. Il ne restait
que quelque jours, moins d’une lune. Ses enfants étaient actifs, bougeant sans
cesse. Elle se demandait comment elle allait bien pouvoir dormir, mais la
fatigue eu raison d’elle.
Elle s’éveilla lorsque les
branches déchargèrent une bonne quantité de neige sur le côté de la hutte. Il y
avait longtemps qu’elle avait entendu se bruit mat et étouffée. Elle se blottie
un peu plus contre Caleb. Il était bien plus chaud que la première nuit, sans
être fièvreux. Il reprenait des forces. Elle lui caressa doucement le torse,
s’endormant paisiblement.
Nopokemi’aatna revint la voir
chaque jour, insistant qu’elle considère son offre, mais chaque fois, elle
l’ignora. Elle avait déjà suffisamment à penser sans spéculer sur cette
proposition. Comme tous les jours, Nopokemi’aatna soupira et sortit. Cette journée-là
cependant, il recueillit l’aide de Atwikan’iinosha.
-
Osiaa, dit doucement Nopokemi’aatna en
tâchant de la faire lever les yeux de sa couture. Tu sais que je ne veux pas
que tu sentes avoir de la pression, mais…
-
Mais c’est raté, rétorqua la jeune femme
sans lever les yeux vers. Et si tu crois que d’avoir Atwikan’iinosha à tes
côtés va changer quelque choses…
-
Osiaa, il faut que tu penses raisonnablement,
intervint Atwikan’iinosha en venant s’asseoir près d’elle. Ça fait huit jours… Il n’est toujours pas
revenu à lui…
-
Et tant qu’il respirera je resterai à ses
côtés, riposta Osiaa’iiwakuna en la regardant sévèrement. Je lui ai
promis. À lui, devant son dieu, devant sa famille et à la Mère.
Atwikan’iinosha eut de la
difficulté à soutenir son regard. La jeune femme ressemblait tellement à sa
mère, tellement à sa grand-mère. Elle soupira et baissa des yeux en premier.
-
Je ne vais pas l’abandonner, poursuivit
la jeune femme avec fermeté. Et je ne vais pas commencer à penser à me
remarier, surtout pas en ce moment. Je sais que je l’ai bien soigné. Je sais
qu’il va se réveiller. Il a juste besoin de temps. Je le connais. Vous ignorez
à quel point il est fort.
-
On veut juste que tu considères. Je sais que
c’est un moment difficile pour toi.
-
Difficile n’est pas le mot que j’utiliserais.
Caleb m’a ramener dans les montagnes pour que je sois en sécurité. Rien de cela
ne serait arriver si nous étions restés. Je n’aurais jamais dû… J’ai gravi ces
montagnes et gorges pour revenir ici. Tout cela parce que Caleb pensait que
j’allais être plus en sécurité parmi vous… Je suis enceinte de huit lunes, sans
maison, je vis dans le rangement de mon frère. Je ne comprends pas pourquoi je
dois subir tout cela. Rien de tout ce qui se passe ici ne fait de sens pour
moi. Macihaawew a essayé de tuer mon mari après avoir perdu son combat en bonne
et due forme. Et maintenant, vous êtes là, en train de me dire à chaque jour de
tout laisser tomber. Non! On dirait presque que vous avez orchestrer toute
l’histoire. Je ne vais pas abandonner Caleb. Ne revenez plus jamais me voir
pour me dire cela. Jamais! Je vous pris de sortir maintenant.
Osiaa’iiwakuna retourna à sa
couture, résigner à ignorer la présence des deux autres. Atwikan’iinosha
soupira et posa une main sur le biceps de Nopokemi’aatna, lui suggérant
d’obtempérer. Elle se souciait de la santé de la jeune femme. Elle n’était pas
sorti depuis des jours. L’eshamane avait encore quelque peu de difficulté à
concevoir le lien qui unissaient les deux jeunes gens, mais préférait ne pas le
tester à l’instant. Nopokemi’aatna grogna quelque peu, mais accepta la requête
de Atwikan’iinosha. Désormais seule avec Osiaa’iiwakuna, elle espérait pouvoir
avoir une discussion plus censé.
-
Osiaa’iiwakuna, soupira-t-elle en
s’approchant et en s’agenouillant devant elle. Je sais que c’est difficile
en ce moment. Je comprends que tu l’aimes. Je le vois très bien. Cependant, Nopokemi’aatna
a raison. Tu as besoin de…
-
Non. Je n’ai pas besoin d’un autre homme. Si
je ne peux pas…. Si… si Caleb meure. Je ne veux pas… je ne peux…
Elle s’arrêta un moment, toutes
les émotions qu’elle avait retenues devant Nopokemi’aatna ressortant. Elle
repoussa son ouvrage et se cacha le visage dans ses mains. Atwikan’iinosha la
prit contre elle. Elle était bien consciente que la jeune femme n’avait
pratiquement plus de famille. Elle n’avait pas besoin de perdre son amant.
-
Il ne sait pas, réussit-elle à articuler
en reniflant péniblement. Pour les jumeaux, personne ne sait, personne ne
sait! Ils ne comprennent pas. J’ai besoin de Caleb. J’ai besoin de lui.
-
Je sais, ma belle. Je comprends, mais il faut
aussi que tu sois consciente qu’il est grièvement blessé. Tu as fait des miracles,
mais parfois on ne peut pas faire plus. La Mère a ses…
-
La Mère ne peut pas me le retirer maintenant.
Pas avec tout ce que l’on a traverser ensemble. Il a dit que nous serions plus
en sécurité ici en quittant Pontefort! Et là… je ne comprend même pas comment
c’est arrivé, comment ça l’a pu arriver. Nous étions censé avoir un moment de répit
et que j’aille mon enfant… mes enfants! … que je les ailles tranquillement.
Mais là…
-
Je comprends, et tu as fait de ton mieux, il
ne peut pas rester comme ça pour toujours.
-
Je ne vais pas…
-
Non, non… et personne ne le ferras.
Simplement, pense à tes enfants. Ils auront besoin d’une famille.
-
Ils auront besoin de leur père.
Atwikan’iinosha soupira
doucement. Elle ne savait pas quoi dire. Elle resta à ses côtés un moment, lui
brossant doucement les cheveux des doigts. Elle resta encore un moment avec la
jeune femme, la consolant doucement. Elle ne lui parla plus de mariage et de
future. Osiaa’iiwakuna était tout aussi bornée et têtue que son père. Elle
aurait aimé lui faire entendre raison, mais ne voulait pas créer plus de
détresse encore. Osiaa’iiwakuna avait besoin de repos et de se sentir en
sécurité. Elle quitta au coucher du soleil, lorsque Tlig’gohpa revint.
Atwikan’iinosha lui demanda de
garder un œil sur la future mère, craignant sa détresse pouvant déclencher ses
contractions plus tôt que prévue. La jeune femme le lui promit, et la remercia.
Tlig’gohpa était soulagé d’avoir pu passer la journée à l’extérieur, l’ambiance
n’étant guère légère sous la hutte. Elle vint prendre place près du feu,
observant Osiaa’iiwakuna manger son bol de soupe absentement. Elle hésita un
moment à tenter d’entrer en conversation, mais se résigna. Elle n’avait rien a
dire. Rien à dire qui méritait de détourner Osiaa’iiwakuna de ses pensées.
Cette dernière se hissa vers sa
couche une fois son bol terminer. Elle se blottie contre son mari, lui repoussant
l’une de ses mèches blondes. Elle aurait aimé qu’il se réveille là, qu’il ouvre
les yeux. Leur bleu lui maquait terriblement. Elle lui caressa doucement une
joue, il reprennait des couleurs. Les autres ne le voyaient pas. Il était déjà
bien pâle contrairement au pawakenakie’ii, mais elle le voyait. Il cicatrisait
bien. La plaie était pratiquement entièrement refermée. La cautérisation avait
grandement aidé. Elle était heureuse d’avoir pu voir un homme le faire à
Pontefort. Elle se doutait qu’elle ne l’avait pas entièrement fait de de la
bonne façon comme la plaie était encore ouverte par endroit contrairement à ce
qu’elle avait vue. Néanmoins, sans cela Caleb ne serait pas étendu à ses côtés.
Chapitre 5
Osiaa’iiwakuna appliqua
délicatement l’onguent, s’assurant de bien le faire pénétrer dans la peau.
Caleb restait immobile. Elle l’autorisait à sortir pour la première fois depuis
que Macihaawew l’avait laissé pour mort. Il n’allait pas rejeter son affection
et ses attentions. Elle termina son pensement et l’embrassa doucement, faisant
doucement rire son mari. Elle n’avait jamais été aussi protective.
-
Embrasses-tu toujours tes patients, lui dit-il
en lui effleurant l’un de ses seins.
-
Tu vas être prudent, se contenta-t-elle de
répondre sans prêter oreille à sa blague. Tu n’es pas encore au sommet de ta
forme.
-
Promis, soupira-t-il. C’est seulement discuter
avec le conseil. Je ne vais pas là pour affronter qui que ce soit.
-
Tu vas perdre de toute façon.
-
Merci du vote de confiance, s’indigna-t-il.
-
Il ne s’agit pas de ma confiance en toi,
soupira-t-elle avant de continuer en tlisu’pawakenakie. Je connais ces
hommes. Ils n’hésiteront pas à remettre en doute tes capacités si tu leur
laisse voir la moindre faille. Il faut que tu es l’air en pleine possession de
te moyens. S’il y en a un qui doute, promet lui un match à la prochaine lune.
Prends-moi comme excuse s’il le faut. Dis-leur que… que tu préfères attendre la
venue de ton enfant… attendre ton retour de vigie. Expliques-leur que tu as des
obligations à honorer d’abord.
-
Kuna, je ne suis pas celui qui est dans le
tort.
-
Non, mais tu es celui qui a passer une
demi-lune sans-connaissance et qui a frôler la mort. Tu sais très bien qu’ils ne verront pas cela d’un bon œil et tu sais
que… tu es… tu seras toujours un eirezt pour beaucoup d’entre eux.
-
Je vais être correct. Ne t’en fais pas.
Osiaa’iiwakuna ne répliqua pas, l’aidant
tant bien que mal à se relever. Il la serra doucement contre lui, lui
embrassant les cheveux. Elle l’embrassa doucement à son tour et le poussa
doucement vers la porte. Elle souhaitait seulement qu’il ait raison, que tout
se passe bien. Elle l’accompagne jusqu’à la grande place. Elle n’aimait pas
qu’il aille au conseil dans cet état. Elle les aurait fait patienter encore
deux ou trois jours de plus, seulement pour qu’il reprenne un peu plus de
couleurs. Elle soupira en le voyant disparaitre sous la tenture et préféra
occuper son esprit en se dirigeant vers la résidence de Atwikan’iinosha. Là au
moins, elle aurait suffisamment à faire pour ne pas y penser.
Caleb ne fut pas surpris de
trouver Meiren’aatok et Nopokemi’aatna déjà présent à l’intérieur de de la
hutte. Les deux hommes semblaient en grand débat et s’interrompirent en le
voyant entrer. Nopokemi’aatna fit signe à Caleb de prendre place et il
obtempéra, non sans crainte de ne pas pouvoir se relever. Il avait jouer le jeu
devant Osiaa’iiwakuna, mais devait garder le masque. Elle avait raison, mais il
ne pouvait pas repousser sa présence au conseil plus longtemps. Il devait à tous
de moins être capable d’écouter.
-
Elle te laisse sortir, s’étonna Meiren’aatok
en lui offrant un bol de cidre. Je croyais qu’elle allait te garder à
l’intérieur pour toujours.
-
Ta femme est la plus bornée et la plus féroce
qui m’aie été donner de voir, soupira Nopokemi’aatna. J’ai rarement vue
une femme aussi… aussi méfiante…
-
Méfiante! Elle aurait été une ourse que nous
serions mort.
-
Je ne peux pas la blâmer, continua Nopokemi’aatna
sans prêter attention à l’intervention de Meiren’aatok. Cependant, elle
aurait pu se montrer quelque peu plus réceptive. Nous ne voulions que son bien,
tu comprends. Nous tous heureux de te voir sur tes deux pieds, mais il fallait
tout de même que nous pensions au pire. Osiaa’iiwakuna est encore très jeune et
a un brillant avenir. Elle est la fille d’un grand homme. Quoi qu’il en soit,
comme je le disais, nous sommes tous heureux que tu sois de retour. Et s’il
était possible à l’avenir que Osiaa’iiwakuna soit plus…
-
Docile, termina Caleb agacé. Non, je
ne pense pas malheureusement. Vous m’excuserez, mais je ne compte pas reprocher
à ma femme un comportement dont je n’ai ni eu conscience. Vous l’avez dit vous-même.
Kuna est la fille de Madduch qui n’était pas réputé pour avoir un charactère
docile. Si elle a cru bon de vous tenir tête, et d’être comme vous le dites
féroce, j’assume qu’elle avait ses raisons.
-
Dans mon samaw, poursuivit Nopokemi’aatna
en perdant sa bonne humeur. Je veux que les femmes suivent les enseignements
et les vertus de la mère.
-
Protéger sa famille en est un, répliqua
Caleb. Tout comme penser et soigner les blessé.
-
Elle doit se montrer obéissante envers les
ainés et les hommes de sa famille. Elle leur doit le respect. Je vous aie
accueillit ici par respect pour ma sort. Vous faites partie de mon samaw uniquement parce qu’elle est ma nièce. Tu lui
rappelleras que c’est un privilège révocable si elle ne fait pas preuve de
respect.
Caleb garda le silence. Il
n’avait pas eu connaissance d’une quelconque altercation entre Osiaa’iiwakuna
et l’un des ainés, encore moins avec Nopokemi’aatna. Il se contenta d’hocher la
tête. Il savait qu’elle avait tendance à montrer des dents rapidement
lorsqu’elle se sentait menacée. Mais que Nopokemi’aatna y ait vue une insulte
il en fallait beaucoup.
-
De plus, poursuivit le chef en passant
une main sur son visage. Aviez-vous penser à la suite?
-
La suite?
-
S’il advenait qu’il t’arrive quoi que ce
soit.
-
Est-ce une mise en garde?
-
Ne t’y met pas également, le prévint Nopokemi’aatna.
Je n’ai prononcé aucune menace, inutile de te mettre sur tes gardes.
-
Veuillez m’excuser, mais avec ce qui nous aie
arriver dans les derniers mois, je crois justifié que ma femme et moi-même
soyons méfiants.
-
Personne au sein de mon samaw ne vous veut du
mal…
-
Vraiment! J’aurais juré autrement! Je croyais
que c’était pour cette raison que je devais rencontrer le conseil aujourd’hui.
Pour discuter de ce qui s’est passé avec Macihaawew et non pour transmettre des
reproche à ma femme.
-
Dès que les autres arrivent, nous en
discuterons. Je le dis maintenant pour que mes paroles soient franches. Je vous
aie offert à toi et à Osiaa’iiwakuna la protection de mon samaw qui… qui n’a
pas été comme je m’y attendais. Cette situation n’aurait jamais dû se produire
et elle me met en colère. Contre Macihaawew en grande partie, contre son père
qui a manqué à son éducation, mais également malgré tout contre toi et ta femme.
Vous m’avez fait voir que j’étais insouciant. D’autres m’avaient déjà
mentionner la volatilité de son tempérament, mais je l’avais balayé de la main.
Tout comme je n’aie pas chercher à approfondir les accusations d’Osiaa’iiwakuna.
-
Possiblement l’une des raisons de sa
méfiance, mentionna rapidement Caleb.
-
Quoi qu’il en soit, dès que les autres seront
là, nous n’aurons d’autre choix que de prendre un décision.
-
Osiaa a déjà pris la sienne, et moi aussi.
Nous ne resterons pas si Eirnorch reste impuni. Elle veut partir s’il est pour
rester.
-
Elle est en sécurité ici, peu importe si…
-
Elle n’en a pas l’impression. Et pour ma
part, je préfère la savoir heureuse et tranquille, mon enfant en sécurité.
Nopokemi’aatna voulut répondre,
mais des hommes entrèrent discutant de leur voix forte et se chamaillant pour
prendre place. L’ambiance sous les bois d’orignaux venait de changer
drastiquement. Caleb reprit du cidre jetant un coup d’œil à Meiren’aatok. Il
était étrangement silencieux depuis le début. Son habituel sarcasme mit en veilleuse.
Nopokemi’aatna appela les hommes au calme, tâchant de se souvenir combien
d’entre eux étaient absents et qui revenaient d’un long séjour.
-
Messieurs, s’il-vous-plait, que nous n’y passions
pas la nuit, commença-t-il en tapant le sol d’une main pour avoir leur
attention. Nous sommes en séance. Ce n’est pas par plaisir que je désirais
que nous nous rencontrions…
-
On sait tous pourquoi nous sommes ici, intervint
Rarez. On a tous vu ou su ce qui s’est passé. Il est chanceux qui est encore
en vie.
Il y eu un murmure d’approbation
et plusieurs hommes tapèrent le sol d’une main en signe de solidarité. Caleb en
était soulagé. Il constata alors que Makoswii n’était pas présent non plus. Il
ne s’en étonna pas.
-
Si ça l’avait été moi, poursuivit Torez. Je
ne me serait jamais relever. Ma femme m’aurait laissé là. Elle n’arrive même
pas à réparer mon manteau.
-
Et moi dont, je suis sûr qu’elle m’aurait
achever, enchaina Soreich.
-
Messieurs, avant que les dames ne vous
entendent…
-
Oh allé, Nopokemi, le garçon était en train
de se vider de son sang et le revoila revenu des morts. Laisse-nous célébrer un
peu.
-
D’autant plus que j’ai entendu dire qu’elle
t’a envoyé promener, lança Viderez. Toi, le si pondéré Nopokemi’aatna.
-
Ma nièce m’a fait savoir son mécontentement.
-
C’est sûr que se faire dire que son mari ne
se réveillera pas, ce n’est pas ce qu’une femme enceinte veut entendre, lâcha
Meiren’aatok entrainé par les autres.
-
Merci, Meiren’aatok, soupira Nopokemi’aatna.
Je n’ai pas besoin de tes commentaires. Nous ne sommes pas ici pour commenter
de la discussion que j’ai eu avec ma nièce.
Nous devons prendre une décision concernant Macihaawew.
-
Je ne vois pas ce qu’il y a discuter, s’impatienta
Viderez. La plupart d’entre nous étions présents.
-
Et pour ma part, je ne doute pas de ce qui
s’est passé, ajouta Torez. Je refuse que mes filles s’approchent de lui.
Pas depuis les histoires avec Saa’itsi.
-
Qui est Saa’itsi, demanda Caleb.
Il eut un moment de silence. Un
malaise s’installa dans la hutte. Caleb haussa les sourcils, il attendait une
réponse. Il ne les pressa pas. Torez baissa la tête un moment, jouant avec
l’ourlet de sa veste. Meiren’aatok se gratta l’arrière de la tête, se tournant
vers Nopokemi’aatna. Ce dernier soupira lourdement.
-
J’aurais préféré ne pas aborder le sujet,
dit-il finalement. Ce qui lui est arrivée n’est pas … n’est pas clair.
-
Ce l’est pour moi, lâcha sèchement Mortak’aatinen
en tapant le sol du plat de la main. Il a tué ma fille.
Caleb se retint d’exprimer son
étonnement. Il n’était pas étonné de l’accusation, mais bien plus qu’il ne l’aie
jamais entendu. Certainement Nopokemi’aatna avait demandé à son clan de garder
l’affaire sous silence. Il comprenait maintenant pourquoi l’homme avait été
silencieux durant toutes les assemblées. Il était désillusionné, son chef
l’avait laissé tomber. Il s’étonna même de le voir y assister encore.
-
Nous n’avons pas de preuve que c’est lui qui,
commença Nopokemi’aatna calmement.
-
Qu’il l’aie poussé ou qu’elle se soit lancée
en bas ça ne change rien! Si nous l’avions écouter elle serait encore en vie!
-
On ne peut pas changer ce qui est arriver,
Mortak’aatinen, tâcha de le calmer Nopokemi’aatna. Je ne peux pas te rendre
ta fille.
-
Tu peux le faire payer! J’accuse Macihaawew
d’avoir tué ma fille depuis des mois et rien! Ta nièce l’accuse d’avoir voulu
la violer, même pas de l’avoir fait et soudainement tu ne remets rien en doute.
-
C’est parce que ta fille a été trop naïve
pour le suivre, lâcha Torez.
-
Ma fille avait douze printemps! Bien sûr
qu’elle était naïve! Elle a vue la chance d’être dans une bonne famille et de
pouvoir avoir mieux que ce que j’ai pu offrir à sa mère.
-
Mortak’aatinen ne confond…
-
Je ne confond rien du tout! Combien de fois je l’ai entendu le vanter à sa
mère. Lui dire à quel point elle était chanceuse qu’il lui prête attention.
Attention mon cul!
-
Mortak’aatinen, intervint Nopokemi’aatna
un peu plus fort. Je comprends que tes blessures ne soient pas encore
cicatrisées. Saa’itsi était une magnifique jeune fille et nous regrettons tous…
-
Ne termine pas cette phrase, le prévint
le père endeuillé. Ce ne sont que des belles paroles. Si tu le croyais
vraiment, il y a longtemps qu’il ne serait plus là.
Il y eu un nouveau murmure
d’approbation et une salve de tapes au sol. Caleb se retint d’y participer. Il
ne connaissait pas assez l’histoire pour pouvoir avoir une opinion. Il jeta un
coup d’œil à Nopokemi’aatna. Il n’était pas dans une bonne position. Son
autorité et sa capacité à prendre des décisions étaient ternis. Il était remis
en question par des hommes de son âge et plus vieux. Nopokemi’aatna soupira et
leva une main tâchant d’apaiser l’assemblée.
-
Makoswii n’est pas présent comme vous pouvez
le constater. J’ai jugé que sa présence l’hors du décès d’Saa’itsi avait été
néfaste à notre prise de décision. Je ne crois pas qu’un père puisse
arbitrairement punir son fils dans des situations comme celles-ci. Pour le
moment, Macihaawew est en garde à vue dans ma hutte par mon fils et mon frère.
Je vous demande ce que vous désirez faire à la lumière des derniers jours.
-
La même chose qu’il a fait à ma fille et qu’il
a bien failli faire à Caleb, dit Mortak’aatinen d’un ton blaisé.
-
On était pas un feu en en allumant un
deuxième, soupira Nopokemi’aatna.
-
Du temps de ton grand-père, on l’aurait frit,
intervint le vieux Seren.
-
Trevez n’a jamais été un excellent chef non
plus, lui rappela lentement le vieux Kavez.
-
Je suis d’accord avec Mortak’aatinen,
soutint Torez. Si ça n’avait pas été de Osiaa’iiwakuna, Caleb ne serait plus
là.
-
Reste qu’il n’est pas mort, dit Broen. Je
suis désolé, mais on ne châtie pas sur des suppositions.
-
Qu’est-ce que tu proposes?
-
Œil pour oil, dent pour dent.
-
Et comment on applique ça, rit doucement Meiren’aatok.
On le laisse pour mort et on voit si quelqu’un vient à sa rescousse. C’est
pas comme s’il lui avait coupé une main ou casser les dents.
-
Il m’en a cassé une, mentionna Caleb.
-
Et toi, que propose tu, lui demanda Nopokemi’aatna.
Tu es bien silencieux.
-
Je suis silencieux parce que je ne crois pas
que ce soit à moi de choisir. Vous avez dit tantôt qu’un père ne peut pas juger
son fils. Je ne crois pas qu’une victime puisse juger son assaillant. D’où je
viens, pour le peu que je sache, Macihaawew aurait été jeté dans une cage,
condamné à y passer le restant de ses jours. Je sais aussi que s’il avait été trouvé
coupable de meurtre, on l’aurait pendu. Ce n’est pas une belle mort, ce n’est
pas une mort que personne ne devrait voir.
-
Et donc?
-
Je ne peux pas me prononcer. Je sais
cependant ce que ma femme veut. Elle aurait eu à vivre avec les conséquences
plus que n’importe qui ici. Elle le veut loin, très loin. Elle ne veut plus
jamais poser les yeux sur lui.
-
L’exile, soupira Mortak’aatinen. Et
s’il revient?
-
Pendez-le, brulez-le, faites ce que vous
voulez avec lui.
Un léger sourire passa sur le
visage de Mortak’aatinen. Caleb comprenait bien pourquoi. Avec l’hiver qui
s’annonçait rude, sans soutient et isolé, Macihaawew n’aurait que peu de chance
de survivre seul. L’idée de l’exile sembla faire son chemin au sein de du
groupe, déclenchant une suite de conversation agité jusqu’à ce que Meiren’aatok
parle.
-
Et s’il trouve un autre samaw. On fait juste
se débarrasser d’un problème et le transféré à d’autres.
-
Marquons-le, dit simplement Caleb en
pensant au tatouage des prisonniers à Pontefort. Laissons-lui une marque qui
indiquera aux autres qu’il n’est pas digne de confiance.
Il y eu une nouvelle salve
d’approbation puis une série de débat sur la dite marque. Caleb priait qu’ils
finissent leur argumentation rapidement. Il était épuisé, bien plus qu’il ne
l’avait cru. Osiaa’iiwakuna avait eu raison, il n’était pas encore suffisamment
remis pour se permettre de rester éveillé des heures. Il cligna des yeux à
plusieurs reprises tâchant d’en faire partir la fatigue, mais rien n’y fit. Heureusement
pour lui, Nopokemi’aatna n’avait pas l’intention d’étirer le conseil. Il
remercia les hommes, leur assurant qu’Macihaawew allait quitté d’ici deux
jours, le temps qu’il mette Makoswii au courant. Il soupira en se relevant,
leur demanda que jusque-là ils gardent le silence.
Caleb hocha de la tête et
patienta que la plupart des autres aient quitté avant d’essayer de se relever.
Il réussit à se mettre debout et vacilla. On vint à son secours, l’agrippant
par le bras. Mortak’aatinen le retenait fermement, lui laissant un moment pour
retrouver son équilibre.
-
Merci, lui dit Caleb en se stabilisant. Je
me suis relevé un peu trop vite.
-
Tu es chanceux de pouvoir respirer, lui
dit Mortak’aatinen en le relâchant lentement.
-
Ce qu’on me dit, répondit-il en
s’aventurant à faire un pas en avant. Je suis désolé pour votre fille.
-
Pourquoi? Tu ne l’a pas connu.
-
Non, mais… c’est ce que l’on dit d’où je
viens.
Mortak’aatinen hocha de la tête
et quitta sans rien ajouter. Caleb le suivit à l’extérieur. L’air frais lui fit
du bien. Il appréciait le silence renouveler. Il en avait assez d’entendre
parler de Macihaawew. Il se dirigea vers la hutte et s’étendit dans le lit. Osiaa’iiwakuna
à sa grande déception n’était pas là, certainement encore avec Atwikan’iinosha.
Il soupira ne sachant guère où elle avait ranger sa tisane. Sa blessure était
douloureuse, il aurait aimé pouvoir l’endormir. Le pan de la porte s’ouvrit et Tlig’gohpa
entra. Caleb ne put contenir sa déception.
-
Je ne suis pas celle que tu voulais, constata
la jeune femme. Tu sais pour Macihaawew?
-
Sais quoi?
-
Ils veulent le bannir.
-
Une chance que Nopokemi nous a demandé de
garder cela secret, maugréa Caleb.
-
C’est Makoswii. Il est en train de… défier son
Oksitaasamaw. Personne ne peut défier leur chef de clan ainsi. Il faut que tu y
ailles!
-
Je ne suis pas en mesure d’aller nul part en
ce moment. Et Nopokemi’aatna a assez de renfort sans que je fasse acte de
présence.
-
Il l’accuse de favoritisme parce que… parce
que Osiaa est sa nièce. Mais ça ne fait pas de sens… parce que ce n’est pas le
seul…
-
Saa’itsi.
-
Oui!
-
Tu sais ce qui s’est passé avec elle?
Tlig’gohpa resta muette. Elle
baissa les yeux et déposa son panier remplis de pommes lentement. Elle
cherchait à éviter la conversation. Elle soupira lentement, triant
machinalement les fruits, avant de proposer d’aller chercher Osiaa’iiwakuna
avec un sourire forcé. Caleb soupira à son tour. Naturellement, pensa-t-il.
Jamais elle n’allait parler d’une telle chose. Ce n’était pas une conversation
qu’une jeune femme devait avoir selon leur enseignement.
Il s’allongea sur son lit et
massa délicatement son cou. Il ignorait s’il faisait plus de tort que de bien, en
ce moment, mais cela lui faisait du bien. Osiaa’iiwakuna allait certainement
lui reprocher d’y avoir toucher, mais il ne pouvait s’en empêcher.
Osiaa’iiwakuna entra rapidement,
se précipitant vers lui. Il lui prit la main et la lui embrassa. Elle se défit
de son emprise et lui posa une main sur le front, puis observa son pansement.
-
Comment te sens-tu, lui demanda-t-elle
inquiète. Tu sembles un peu pâle. As-tu mal? Es-tu fatigué? As-tu été
capable d’assister à tout le conseil?
-
J’ai assisté à tout le conseil, lui
répondit-il calmement. Mais je suis épuisé. Je ne suis même pas sûr que je
peux me lever.
-
Je t’avais dit de prendre soin de ne pas en
faire trop. Tu ne sors pas de ce lit jusqu’à nouvel ordre, c’est compris?
-
En ce moment il n’y a aucune chance que je le
quitte. Qu’est-ce que tu as dit à Nopokemi’aatna.
-
Qu’est-ce que je lui ai dit quand?
-
Quand il est passé il y a quelques jours.
-
T’a-t-il dit ce qu’il m’a dit,
répliqua-t-elle sur la défensive. T’a-t-il dit qu’il m’a conseiller de te…
de te laisser descendre la pente et de considérer mes options. À plusieurs
reprises d’ailleurs… Comme si j’allais te laisser mourir devant mes yeux. Tu es
le père de mon enfant! Je suis enceinte de trente-six semaines et il pense que
je vais considérer changer d’époux.
-
Kuna, lui dit doucement Caleb en tâchant
de la calmer. Je ne vais pas te chicaner pour m’avoir défendu. Et
certainement pas pour vouloir me garder près de toi. Mais visiblement tu as laissé
une impression, parce que les autres en parlent également.
Osiaa’iiwakuna releva les yeux et
le regarda. Elle était incrédule. Elle ne se souvenait pas d’avoir été
insolente, ni d’avoir été si vocale que les autres hommes au sein du samaw ait
su ses propos. Certainement pas au point que Nopokemi’aatna sente le besoin
d’en toucher mots à son mari. Elle se tourna vers son sac et en tira une
collection d’herbes, préférant ne pas poursuivre la conversation. Caleb avait
besoin d’un onguent pour aider sa plaie et elle préférait régler la situation
rapidement.
Elle mélangea la substance en un
pâte nauséabonde qui répugna Caleb lorsqu’elle le lui appliqua en grande
quantité. La substance brûla un moment, générant une chaleur étrange, mais Osiaa’iiwakuna
lui assura que tout était normal et en terminant un nouveau bandage. Elle
l’embrassa doucement, pressant son corps contre le sien. Il lui caressa
doucement le ventre, tâchant de sentir son enfant à l’intérieur. Elle lui prit
la main et la glissa quelque peu plus bas pour lui faire sentir la tête. Il
sourit bêtement et tâta délicatement.
-
Il ne reste plus beaucoup de temps, dit-il
relevant les yeux.
-
Environs une demi-lune, répondit-elle. Et
par chance, je n’aurais pas besoin de te couver en plus de lui.
-
Hum… tout dépends de toi, répliqua-t-il
narquoisement. Et de tes talents d’eshamane.
-
Mes talents sont ceux qui t’ont gardé en vie,
très cher. Tu es très mal placé pour les critiquer. Et tu ne m’as toujours pas
parler de ce le conseil a décider de faire avec Macihaawew.
-
Oh… aux dernières nouvelles, Makoswii a décidé
de défier ton oncle. Il n’a pas apprécié que nous décidions d’exiler son fils.
-
L’exile? Il a voulu te tuer, et ils veulent
seulement qu’il aille prendre une marche! Je ne comprends pas la logique... Et
si Makoswii décide de confronter mon oncle, s’il gagne, qu’est-ce qu’il arrive
de nous. Je me peux pas rester ici si c’est Makoswii le chef, Caleb. C’est
beaucoup trop dangereux pour moi, pour…
-
Kuna, du calme, croit moi, je ne vais pas te
laisser rester ici non plus si le vent ne tourne pas en notre faveur. Et oui
l’exile a été voté. Même par Mortak’aatinen.
-
Personne ne veut me dire ce qui s’est passé
avec Saa’itsi, soupira Osiaa’iiwakuna en se blottissant un peu plus contre
lui.
-
À moi non plus.
Osiaa’iiwakuna soupira et
s’allongea péniblement. Il n’y avait plus de position confortable. Elle avait
réussi a garder le secret des jumeaux jusqu’à présent, mais si son ventre
continuait à prendre de l’expansion, elle était certaine qu’il allait exploser.
Caleb la rapprocha de lui et la serra contre son torse, grognant quelque peu
lorsqu’elle s’appuya contre sa côte fêler. Elle s’excusa platement et s’endormi
presque aussi tôt.
Osiaa’iiwakuna suivit Caleb avec
réticence jusqu’à l’orée du village. Une bonne partie du samaw y était déjà
assemblé. Un léger murmure parcourait la foule. Un tel châtiment n’était pas
courant. Les regards allaient et venaient entre le couple et Macihaawew. Caleb
ne leur porta attention. Il avait toujours été le centre d’attention parmi les
pawakenakie’ii. Il approcha Osiaa’iiwakuna de lui. Il préférait qu’elle reste
prêt de lui au cas où Makoswii tenterait quoi que ce soit contre elle. Ils se
rapprochèrent de Nopokemi’aatna, qui les salua d’un signe de tête.
Au loin, Macihaawew appela Osiaa’iiwakuna
et la supplia de les faire reconsidérer, mais elle l’ignora. Elle n’allait
certainement pas lui prêter attention. Elle passa un bras un bras sous celui de
Caleb et se rapprocha un peu plus. Elle n’avait pas confiance en les liens qui
le retenait. Les pawenakie’ii n’avaient pas l’habitude de restreindre un autre
homme. Osiaa’iiwakuna fut heureuse de l’arrivé de son oncle Normen’itaken. Si
Macihaawew tentait quoique ce soit, elle était protégé de tous côté.
Elle jeta un regard sévère au
détenu. Elle n’aimait pas particulièrement qu’il y ait une sorte de cérémonie
pour son exile. Il ne méritait pas une telle célébration. Il aurait dû
disparaitre en silence, ni vue ni connu, oublié. Caleb la serra un peu plus
contre lui, s’assurant que de Macihaawew voit bien leur proximité. Il avait eu
raison de son élitisme et de ses menaces. Il était l’ereizt qui avait réussi à
détrôner le fils de Makoswii, le peiti fils de Toren’itakii. Macihaawew grimaça
en le voyant si près d’elle. Il regarda Nopokemi’aatna qui ne bougea point. L’oksitaasamaw
ignora la proximité des jeunes gens ce qui enragea encore plus le futur
expatrié.
-
Et eux, lui cria-t-il. Tu laisses ta
nièce être avec…
-
Ma nièce n’est d’aucun de tes problèmes, répliqua
vivement Nopokemi’aatna. Tu en as déjà fait assez pour elle.
Macihaawew grogna et se tourna
vers le reste du samaw qui arrivait peu à peu. Meiren’aatok vint rejoindre
Nopokemi’aatna, lui expliquant rapidement la problématique avec Makoswii. Ce
dernier avait dû être mis à l’écart. Il n’aurait pas la chance de dire aurevoir
à son fils. Son insolence et sa désobéissance ayant forcé Nopokemi’aatna dans
ses derniers retranchements.
Osiaa’iiwakuna ignorait combien
de temps encore ils devrait attendre pour que la cérémonie ne commence, mais
elle sentait tous les regards sur elle. Elle n’avait rien à cacher. Macihaawew
avait cherché à la violer, l’avait mise en danger et l’avait blessée. Elle
avait fait des chauchemars concernant l’Isttsikakkssin pendant des mois et
sursautait encore lorsqu’un bruit se faisait entendre derrière elle en pleine
forêt. Elle avait trouvé un sens de sécurité et de confort auprès de Caleb.
Leur premiers ébats avaient été très pragmatique, mais elle ne regrettait rien.
Elle avait été la plus grande manipulatrice dans leur relation.
Son mari resserra son étreinte
sur elle. Il la sentait nerveuse. Il l’était aussi. Avec un peu de chance,
Macihaawew aurait la dignité d’accepter son châtiment, mais il en doutait. Il
n’allait certainement pas quitter tranquillement. Caleb commençait à se
demander s’il n’était pas mieux de raccompagné Osiaa’iiwakuna jusqu’à la hutte.
Il ne voulait pas qu’elle se retrouve à nouveau entre lui et Macihaawew.
-
On serait mieux de rentrer, lui
murmurra-t-il tout bas.
-
Quoi? Non je reste, protesta-t-elle sans
surprise.
-
Il faut qu’elle reste, intervint
Normen’itaken. Elle aurait été veuve et elle l’accuse de viol. Et tu dois
rester également, sans elle tu serais mort. Vous avez demandé l’exile, vous
devez assisté la sentence.
-
J’ai demandé qu’il soit puni, Osiaa voulait
l’exile.
-
Il ne méritait pas de Tii’pawarisswew, marmonna
Osiaa’iiwakunaen posant une main sur son ventre. Il ne mérite pas d’être
honoré de la sorte, et nous n’aurions eu d’autre choix, si nous avions fait
autrement.
Caleb n’Avait jamais réfléchit à
cela. Naturellement les autres avaient été hésitant. Il dévisagea un moment sa
femme qui le lui retourna. Elle haussa un sourcil et reporta son attention sur
l’agitation devant elle. Macihaawew insultait tous ceux qui passait devant lui.
Il martelait et répétait encore et encore qu’il était dans ses droits, que tous
allaient vite se rendre compte que Caleb allait leur porter malheur qui il le
lui avait. Il insistait qu’Osiaa’iiwakuna était à présent maudite pour avoir
partager la couche avec un éreizt. La jeune femme retint un hoquet de mépris
lorsqu’il déclara que l’enfant allait être un démon.
Elle n’y croyait pas. Ses enfants
allaient être spéciaux, uniques, mais pas maudits. Caleb lui caressa doucement
le flanc alors que toutes les têtes se tournèrent vers eux. Osiaa’iiwakuna les
défia du regard. Elle n’allait pas laisser Macihaawew installer la peur et le
doute dans son clan. Elle se défit de l’emprise de son mari et s’avança vers
l’exilé. Caleb voulut la retenir, mais Normen’itaken lui fit signe d’attendre.
Ils y avaient suffisamment de témoins, mais églament Nopokemi’aatna qui
s’approcha avec elle.
-
C’est toi qui m’a maudit, Macihaawew,
dit-elle lentement et fort pour que tous l’entende. C’est ti qui a trahi ton
clan. Tu aurais dû me protéger, tu aurais dû faire en sorte que je sois en
sécurité et au contraire. Tu as essayer de me violer, tu as failli me faire
tuer, et tu m’as blessé. Je porte et porterai toujours la cicatrice pour me
rappeler ta trahison. Tu as essayé de tuer mon époux, tu l’as lâchement attaqué
et blessé avec une arme comme un animal. Tu as déshonoré ce samaw, la Mère et
toi-même.
-
Sale conne, rugit Macihaawew. Tu n’est
qu’une..
-
Assez, rugit à son tour Nopokami’aatna. Macihaawew,
à compter d’aujourd’hui tu es banni de ce clan, banni à jamais. Tu ne pourras
plus remettre les pieds dans ce samaw, ni rôder dans la région. Si tu es aperçu
dans les environs, tu seras chassé tel un animal. Ton nom sera effacé de notre
mémoire et maudit à jamais. Tu seras marqué par le renard, le fourbe et le
menteur. De cet façon, tous sauront que qui tu es réellement.
Macihaawew protesta, tâchant de
se défaire de ses liens. Osiaa’iiwakuna recula de quelques pas, laissant les
hommes intervenir. Atwikan’iinosha vient la rejoindre et la prit par les
épaules. Elle comprennait le besoin de la jeune femme d’assister de près au
bannissement. Cependant, elle l’implora de retourner auprès de Caleb et
Normen’itaken. Osiaa’iiwakuna voulut protester, mais le regard sévère de son
ainée la ravisa.
Macihaawew était hors de lui. Non
seulement Osiaa’iiwakuna l’avait insulté et humilié devant tout le samaw, mais
en plus elle se faisait renvoyer dans les bras de l’ereizt. Il avait les veines
du cou qui avait doublées de volumes tant il essayait dese défaire de ses
liens. Mortak’aatinen, Meiren’aatok, Nopokemi’aatna et son fils se tenaient
près à intervenir s’il s’évadait.
Caleb qui n’avait pas encore vu
le cousin de sa femme fut impressionné par Makto’iikanen. Il était de loin le
plus grand et le plus massif des pawenakie’ii qu’il avait vu de sa vie. Il
était visiblement plus jeune que lui, mais déjà il le dépassait aisément d’une
tête. Il était d’autant plus certain que le jeune homme pouvait soulever un
orignal à lui seul. Macihaawew n’avait aucune chance de s’enfuir avec le
colosse qui le hardait. Makto’iikanen pourrait simplement le prendre par la
peau du cou et le clouer au sol.
Les hommes se rapprochèrent du
forcené. Nopokemi’aatna sortit un couteau à la lame en os cérémoniel de son
manteau. Il força la tête de Macihaawew vers l’arrière et y tailla le symbole
du renard sur son front. Tous les autres clans allait ainsi savoir qu’ils ne
pouvaient lui faire confiance. La scène n’était pas pour les faibles de coeur.
Son sang lui coulait jusqu’au sol, tachant la neige de rouge. Sa chaire à vif
fut ensuite couverte d’un poudre concoctée par Atwikan’iinosha. Osiaa’iiwakuna
savait qu’elle était une décoction anti-coagulante. Elle allait garder la plaie
ouverte durant des jours. Il allait être dans d’attroce souffrance tout ce
temps pour finir avec une horrible cicatrice.
Les
hommes relâchèrent Macihaawew qui tomba au sol en portant ses mains à son front
dans un cri de rage. Instinctivement, Osiaa’iiwakuna se rapprocha de Caleb, se
faufilant entre lui et son oncle. Elle savait qu’aucun des deux n’était en
mesure de se battre avec Macihaawew, mais avec un peu de chance, son colosse de
cousin pourrait le retenir d’une main. Le parjure se releva péniblement jurant
et maudissant ses bourreaux. Il recula
d’un pas, aveuglé par le sang qui lui coulait dans les yeux. Il voulut
s’approcher, mais Makto’iikanen le repoussa d’une main, le jetant au sang au
sol sans effort. Il avait eu comme ordre de ne pas le laisser s’approcher, ni
des membres du clan et encore moins de sa cousine.
Macihaawew se releva péniblement
en colère. Il ne pouvait croire qu’il se faisait rejeté de la sorte. Il était
l’un des meilleurs chasseurs et l’un des guerriers les plus habiles. Il était
exilé pour avoir voulu se débarrasser d’un étranger, un paria. Makto’itaken le
pressa vers la forêt, le menaçant de lui fracasser le crâne. Caleb n’avait
aucunement de difficulté à le croire. Ses mains étaient de la gigantesques. Dès
que l’exilé faisait un pas de l’avant, il le repoussait vivement, le faisant
tomber à plusieurs reprises.
Macihaawew continua ses
protestations et ses maudissements. Osiaa’iiwakuna
en eu assez, ils étaient maintenant rendu à la limite de la forêt et
Makto’itaken n’allait certainement pas le laisser revenir. Elle fit signe à
Caleb et s’Excusa auprès de son oncle. Ce dernier cependant les suivit, ainsi
qu’une bonne partie du samaw. L’humiliation était à son comble, tous tournaient
le dos à l’exilé. Bientôt, ses cris ne seraient plus qu’un bruit distant. Le
clan allait tranquillement reprendre ses occupations habituels.
Ils furent rapidement rejoints
par Tokaa’natorii, la femme de Nopokemii’aatna, qui les invita à venir souper.
Osiaa’iiwakuna accepta avec plaisir. Elle n’avait jamais eu l’occasion de faire
connaissance. Elle ne savait que les potins partagées entre Atwikan’iinosha et
Taakglit à son égard. Les propos n’étaient pas particulièrmeent joyeux et
élogieux, elle était curieuse de découvrir pourquoi. Elle savait que
Tokaa’natorii était la deuxième épouse de Nopokemi’aatna, mais elle se doutait
qu’il y avait plus à l’histoire. Elle lui assura qu’ils y seraient au coucher
du soleil, la remerciant de l’invitation.
Osiaa’iiwakuna avait besoin de
repos. Elle avait passé la matinée debout et en était épuisée. Si elle devait
passer la soirée chez son oncle, elle devait faire une sieste. Caleb aussi
avait besoin de se reposer, il ne voulait pas l’admettre, mais elle le savait.
Il s’était bien remis de ses blessures, mais il avait encore besoin de refaire
son sang. D’autant plus elle ne voulait pas qu’il s’épuise pour rien, il devait
construire leur hutte. Normalement il aurait participé plus activement au
bannissement , mais Nopokemi’aatna lui avait demandé de restger en retrait. Il
avait préféré qu’il ne soit pas directement impliqué et Caleb n’avait pas
protester. Il ne se sentait pas en état de lutter contre lui encore.
Se glissant sous la hutte,
Osiaa’iiwakuna s’élança vers le lit, se roulant en boule. Elle caressa son
ventre. Pour la première fois depuis longtemps il lui semblait qu’un poids
venait d’être lever de ses épaules. Caleb s’allongea près d’elle l’embrassant
dans le cou.
-
Heureuse, demanda-t-il tout bas.
-
Soulagée, répondit-elle en soupirant Enfin…
-
Il a eu ce qu’il méritait, lui assura Caleb.
-
Non… mais mieux vaut ainsi. Au moins il ne sera
plus proche. Tu ne sais pas à quel point ça me rendait anxieuse avec les.. le
bébé. Là au moins…
-
Au moins maintenant s’il apparait j’ai le droit
de le tuer à vue.
Osiaa’iiwakuna se tournas vers
lui. C’était la première fois qu’elle l’entendait parler de la sorte. Elle
était quelque peu déstabilisée. Elle aurait normalement aimé qu’il soit si
assuré, mais soudainement elle était perturbée. Il lui caressa doucement la
joue, repoussant l’une de ses tresses vers l’arrière. Elle baissa les yeux et
se laissa blottir contre lui. Elle réalisa qu’elle ne l’avait jamais entendu
parler de la sorte. Jamais avec une telle sévérité.
Soudainement elle était partagée
entre un sentiment de sécurité et une étrange peur envers lui. Elle qui l’avait
toujours poussé à être plus affirmé, maintenant elle était en était perplexe.
Il lui caressa doucement les cheveux et lui embrassa le front.
-
Ça va, demanda-t-il en la sentant rigide.
-
Oui c’est juste… tu compte vraiment le tuer
s’il revient?
-
Comme n’importe qui d’autre dans le samaw,
assura-t-il en la serrant contre lui. Il ne peut pas remettre les pieds au
village.
-
Mais tu as… tu… laisse faire.
-
Kuna?
-
C’est que… tu parles de tuer quelqu’un.
-
Qui a lui même essayer de me tuer et qui a
faillit te tuer aussi, dois-je te rappeler.
-
Mais… la Mère n’aime pas… je suis confuse… et
pas juste à propos de toi. Tout l’aspect de le tuer s’il revient. Je n’aime pas.
Et je sais. Je sais qu’il a faillit te tuer… que si ce n’était pas de moi tu
serais mort. Je sais ce qu’il m’a fait… mais je ne peux pas m’imaginer que tu
le tues.
-
Kuna, tu sais que je ne dis pas ça par
plaisir. Simplement, ça serait un soulagement…
-
Un soulagement, s’exclama Osiaa’iiwakuna
en se redressant sur un coude. Caleb?
-
Tu sais ce que je veux dire… Kuna je veux
simplement être sûr que vous êtes en sécurité, toi et notre enfant.
-
En perpétrant l’irréparable?
-
Je ne suis pas un enfant de la Mère, Kuna.
-
Et si elle décide de se venger sur moi?
-
Endors-toi mon amour. Il n’y a rien de cela
qui se passe aujourd’hui. Je ne veux pas le tuer, et je ne veux pas que tu
t’inquiètes pour ça. Tu as eu raison de demander son bannissement et je suis le
premier à être heureux qu’il n’aie pas de Tii’pawarisawew. Je te promets que je
ne vais pas le pourchasser.
Osiaa’iiwakuna se laissa retomber
avec un long soupire. Elle n’allait pas arriver à exprimer son malaise. Elle
n’arriverait même pas à se l’expliquer. Caleb la blottie contre lui, lui
caressant doucement le dos et l’embrassa doucement. Elle avait besoin de cette
affection. Mpeme si elle n’était pas d’accord avec ses propos. Elle passa une
main sur son ventre. Ses jumeaux étaient actifs. Elle allait avoir du mal à
trouver le sommeil.
Comme de fait, elle eut à peine
l’impression de tomber endormi qu’elle
fut éveiller par Atwikan’iinosha qui l’appelait doucement. Elle se redressa s’extirpant
des bras de Caleb qui dormait à poing fermé.
-
Que se passe-t-il, demanda-t-elle
confuse. Une urgence?
-
Vient avec moi, lui dit-elle simplement
en lui faisant signe de la suivre. Allez!
-
Maintenant? Je faisais une sieste. C’est pas important?
Je dois aller souper chez Nopokemi’aatna… j’ai besoin de me reposer.
-
Viens avec moi, allez. Justement avant que tu
ailles chez ton oncle. Prend ton hameleriek.
Osiaa’iiwakuna grogna et
s’extirpa du lit. Elle ne pouvait croire que la journée où elle avait
réellement besoin de se reposer, elle devait suivre Atwikan’iinosha. Elle
s’enveloppa dans son hameleriek et recouvrit Caleb qui dormait toujours. Elle
suivit sa mentore à l’extérieure s’étonnant de trouver Makto’itaken qui
patientait.
-
Que faisons-nous, demanda la jeune femme.
-
Nous allons faire le dernier rituel avant la
naissance. Nous allons à la source sacrée.
-
La quoi? Et Makto, il vient avec nous?
-
Je ne veux pas prendre le risque que
Macihaawew nous surprenne. Taakglit, Tlig’gohpa et Normen y sont déjà.
-
Je ne suis pas certaine de comprendre, dit
Osiaa’iiwakuna en la suivant lentement. Caleb?
-
Il n’a pas à venir, c’est uniquement pour
toi. Il peut rester. Nous allons être en sécurité avec Makto et Normen.
-
Et on doit faire ça aujourd’hui.
-
Tu est sur le point d’accoucher, nous n’avons
pas le luxe d’attendre encore longtemps. Ne t’inquiète pas, ce sera uniquement
moi et ta tante. Les hommes resteront à distance d’ouie.
-
Caleb n’aimera pas que je sois partie me
promener dans les bois.
-
Laisse-moi m’occuper de lui.
Osiaa’iiwakuna soupira. Elle
n’avait visiblement pas le choix. Atwikan’iinosha l’entrainait par le poignet,
gentiment, mais décidé à ne pas la laisser s’évader. Elle soupira se
légèrement, espérant pouvoir se reposer par après. Elle aurait préféré être
avertie de leur petite escapade.
-
Où allons-nous, demanda-t-elle après un
long moment en s’enfonçant dans la forêt.
Je ne devrais pas être ici. Atwik… il faut que je rentre. Caleb ne
sait pas où je suis… Il va paniquer s’il se réveille et que je ne suis pas là.
-
On est presque rendu, Osiaa, la rassura
l’eshamane. Tu n’as rien à craindre. Makto est ici.
-
Sans offense… je préférerais être à la
maison, au milieu du atnameh. Macihaawew a été exilé ce matin, il est encore
dans les environs.
-
Arrête un peu, nous y sommes. Et c’est
important que nous faisions ce rituel. Makto, tu nous attends ici?
Le colosse hocha de la tête. Il
s’assit sur un tronc, leur rappelant de l’appeler si un problème survenait.
Atwikan’iinosha passa un bras sous celui d’Osiaa’iiwakuna et l’entraina sous un
tunnel de branches tressée. La jeune femme admira les vignes, le tunnel devait
être magnifique en été. Il déboucha sur une petite clairière où un étant était
entourée de saules pleureurs. Malgré l’hiver, leurs feuilles étaient encore
vertes. Assise près de l’étang, Taakglit allumaient des bâtons fumigène, alors
que Tlig’gohpa les secouait doucement dans l’air faisant flotter une fine brume
d’épinette, de sauge et de rose dans toute la clairière.
-
Où est Normen, demanda Atwikan’iinosha en
s’approchant.
-
Un peu plus loin par là-bas, désigna
Taakglit en éteignant son charbon dans l’eau. On est tranquille jusqu’à ce
que je l’appele. Osiaa tu es prête?
-
Je ne sais même pas ce que je fais ici, avoue
la jeune femme curieuse en s’approchant du bassin. L’eau est chaude? Comment?
-
C’est la source sacrée, expliqua
Atwikan’iinosha en caressant l’eau de la main. Son eau est pure et donne la
vie.
-
Je dois en boire, devina Osiaa’iiwakuna
en s’assoyant sur un rocher.
-
Oh non très chère. Tu dois t’y baigner.
-
On se gèle!
-
L’eau est bonne et tu vas voir, lui assura
Taakglit. Tiens bois ça.
-
C’est quoi?
-
Tu ne nous fait aucunement confiance, ricana
sa tante. C’est le rituel. Les femmes de ta famille et l’eshamane pour bénir
ton accouchement.
-
Et Tokka’naati, demanda Osiaa’iiwakuna. Elle
ne devrait pas être ici.
-
Elle a suffisamment à faire de son côté, pesta
Atwikan’iinosha en s’agenouillant près d’elle et ouvrant son sac.
Osiaa’iiwakuna ne releva pas la
remarque. Elle n’avait jamais entendu l’eshamane prester de la sorte.
L’eshamane sortit plusieurs accessoire et contennant de sa besace, les plaçant
avec soin sur une peau de loup au sol. Osiaa’iiwakuna était curieuse, elle
n’avait jamais entendu parler du rituel que les deux femmes tenaient à lui
faire suivre. Taakglit s’approcha d’elle et commença à défaire sa coiffure,
dénouant ses tresses avec soins. Comprennant qu’elle ne s’y soustrairait pas
elle l’aida.
-
Déshabille-toi, Osiaa, lui demanda
l’eshamane une fois ses cheveux défait.
-
Quoi?
-
Déshabille-toi. Allez, tu étais tant pressée
de retourner dans ton lit.
-
On est en plein milieu de l’hiver… je ne vais
pas aller dans l’eau.
-
Osiaa, regarde autour de toi. Tout est vert
ici. Tu as remarqué que ce n’est pas aussi froid ici. Tu entre dans l’eau, nous
faisons le rituel. Tu en sors, je donne les teintures et sérums. Tu te
rhabilles et tu retournes te coucher. Avec le rituel on est certaines que ton
accouchement se passera bien. Tlig’gohpa va t’aider à entrer dans l’eau. Allez.
Osiaa’iiwakuna soupira et retira
son hameleriek, puis ses vêtements. Elle frissonna quelque peu, mais concéda
que Atwikan’iinosha avait raison, l’air était relativement chaud hormis le
vent. Tlig’gohpa s’approcha et l’aida à descendre dans l’étang. L’eau était
agréablement tiède et le fond couvert d’algue douce, mais qui le rendait
glissant. Tlig’gopah l’aida à s’assoir sur un pierre plate au fond, l’eau la
couvrant jusqu’aux épaules. La jeune femme retourna prendre un bol de bois
sculpté que lui tendait Atwilan’iinosha.
-
Que la Manikaw’opii t’accompagne dans tes
souffrances, chantonna doucement l’eshamane. Qu’elle t’accorde son aide
lorsque tu mettra au monde l’un des ses enfants. Que l’eau de cette source
purifie ton corps.
Tlig’gopha versa doucement de
l’eau sur la tête de la future mère la faisant frissonner. Elle reprit
l’opération à deux reprises avant que Atwikan’iinosha ne reprenne.
-
Qu’avec cette eau, ton corps soit purifier.
Qu’il soit prêt à accueillir ton enfant et que Manikaw’opii te prête son
courage. Que l’eau de cette source enlève toutes perversions et malédictions.
Tlig’gopah reversa de l’eau sur
la tête d’Osiaa’iiwakuna par trois fois. Cette dernière comprenait maintenant
pourquoi l’eshamane avait attendu aussi longtemps pour faire le rituel. Elle avait attendu que Macihaawew soit exilé.
Elle aurait dû refaire le rituel autrement. Osiaa’iiwakuna repoussa l’eau qui
lui coulait dans les yeux. Elle jeta un coup d’œil à sa tante et
Atwikan’iinosha qui s’étaient installées au sol près de l’étang. Elle y avait
étendu une grande fourrure blanche. Tlig’gohpa l’aida à se relever et à sortir
de l’eau, s’assurant qu’elle ne glisse pas sur les algues. Osiaa’iiwakuna prit
place sur la fourrure, s’étonnant de sa douceur. Maintenant hors de l’eau, elle
grelotait. Taakglit la couvrit d’une serviette en peau de cerf et essorra
doucement ses cheveux. Atwikan’iinosha s’approcha avec un premier bol rempli
d’une substance graisseuse.
-
C’est une crème purifiante, lui
mentionna-t-elle en en appliquant sur le ventre d’Osiaa’iiwakuna et de passer
le bol aux autres dames. Et bénéfique pour toi. Je vais t’en laisser et il
faudra que tu t’en recouvre chaque soir avant l’accouchement. Caleb pourra
t’aider, Tlig aussi. Nous commençons un rituel important pour toi, pour que tu
te prépares physiquement et mentalement à ton accouchement. Après la crème,
nous prenons cette teinture. Lavande, camomille et framboisier pour apaiser
l’esprit. À partir d’aujourd’hui, tu devras avoir l’esprit en paix. Plus de
soucis ni de tracas. Ce sera au femmes de ta famille de s’occuper de tes
tracas. Taakglit et Tlig’gohpa seront là pour toi, et ce jusqu’à la fin du
deuxième lune.
-
Du deuxième lune.
-
Lorsque ton enfant aura deux lunes. Jusque-là,
elles seront toujours près de toi. Tu auras toute l’Aide don’t tu auras besoin
et la mienne. Taakglit a accepté d’être ta mère spirituelle.
-
Mais… je
ne… je ne t’ai jamais demandé, s’étonna Osiaa’iiwakuna confuse en se
tournant vers sa tante. Tu n’as pas à…
-
Tu n’as pas à me le demander, ma belle,
lui assura Taakglit en lui caressant le visage. Je me suis proposée. Tu es
revenue parmi nous alors que nous te croyions disparue comme ta mère. J’étais
très proche d’elle lorsque nous étions enfant. Il me fait plaisir d’être ta
manikawsikwis.
Osiaa’iiwakuna baissa la tête,
tâchant de cacher ses larmes. Elle était émue. Elle n’aurait jamais cru être
aussi admise au sein de sa famille, pas avec Caleb. Taakglit la serra doucement
contre elle, essayant doucement une larme de son pouce. Elle était heureuse de
la réaction de nièce.
-
Itksa’ohta, sanglota Osiaa’iiwakuna se
défaisant de son emprise. Je ne sais… Je ne sais pas quoi dire.
-
Tu n’as rien à dire, ma belle.
-
Et tu n’es pas seule, lui assura
Tlig’gohpa. Je ne te laisserai pas partir de chez moi tant et aussi
longtemps avec la construction de ta hutte. Caleb a bien à faire.
Osiaa’iiwakuna rit doucement et
essuya ses yeux du revers de la main. Taakglit repoussa une mèche de cheveux et
leur fit signe de reporter son attention sur l’eshamane. Celle-ci attendit
patiemment que ses sanglots se calme avant de poursuivre. Cette dernière avait
un nouveau bol entre ses mains rempli d’une substance rougeâtre. Elle patienta
un moment que la jeune femme cesse de sangloter avant de poursuivre.
-
Ceci est une teinture qui restera un bon moment
visible, au moins une bonne semaine. Et si tu n’as pas accoucher avant qu’il
disparaisse, nous allons te les refaire.
Elle commença à tracer les
symboles de maternité et de protection sur le ventre de la future mère en un
motif symétrique. Osiaa’iiwakuna les connaissait bien, ceux de l’ourse et de la
louve, force et famille. Les pawakenakie’ii affichaient toujours avec fierté
leur ventre distendu ni leur poitrine. Elle avait rapidement appris qu’à Pontefort
qu’ils étaient bien plus pudique, homme comme femme. Elle n’avait jamais
personnellement compris pourquoi, mais n’avait pas chercher à comprendre.
-
Avec ses sigles tu aurais les esprits de
l’Ourse et de la Louve qui veilleront sur toi et on enfant, poursuivit
Atwikan’iinosha en terminant sur son ventre et poursuivant sur sa poitrine.
La salamandre est un esprit spécial pour toi. Tu nous es est revenu comme une
salamandre au printemps. Elle veillera sur ta santé.
Atwikan’iinosha glissa ses doigts
sur les seins d’Osiaa’iiwakuna en y traçant d’autres motifs dédiés à sa
prospérité et à ce qu’elle produise du lait en abondance pour ses enfants.
Osiaa’iiwakuna la regarda s’exécuter avec attention. Dans quelques années ce
serait elle qui dessinerait ces motifs sur les futures femmes mères.
Arrivée
Osiaa’iiwakuna posa une main sur son ventre et s’arrêta de
marcher. La jeune femme souffla, sa douleur s’était arrêter. Elle releva la
tête vers Atwikan’iinosha qui s’était également arrêter, patientant doucement.
-
Le moment approche, dit-elle doucement. Besoin
d’un instant?
-
Non ça va c’est passé, assura la future
mère en reprenant son souffle.
-
Première fois?
-
Deux ou troisième, depuis deux jours
environs…
-
Rien d’alarmant encore alors, viens, le plus
vite nous sommes là, le plus tôt tu peux t’asseoir.
Osiaa’iiwakuna sourit bêtement et
la suivit. Elle était heureuse cependant que leur journée soit majoritairement
consacré à la préparation d’onguent et de bandage. Les longues nuits d’hiver
arrivaient à grand pas, l’heure des cueillettes était passée. Leur réserve
devraient tenir jusqu’au printemps.
Osiaa’iiwakuna se réfugia sous la hutte avec soulagement. Le
vent était horriblement froid à l’extérieur. Elle s’empressa d’allumer le feu,
frissonnant vivement. Atwik’iinosha lui fit signe de s’asseoir et qu’elle
allait prendre soin du reste. Osiaa’iiwakuna retira son manteau, mais s’enroula
dans une grosse fourrure épaisse. Elle regrettait d’avoir laissé son hamereliek
derrière.
-
Sait-tu comment faire des anmotikaw'wektimakii,
demanda Atwikan’iinosha en suspendant un chaudron au-dessus du feu.
-
Des fils de miel, s’étonna Osiaa’iiwakuna
en relevant rapidement la tête vers elle. Non… ma mère a toujours dit que
j’étais trop jeune…
-
Hum… je pense que ce n’est plus le cas maintenant.
Veux-tu apprendre?
-
Certainement!
L’ainée rit doucement à l’enthousiasme de la jeune femme.
Elle lui remit trois gros pot de miel cristalisé, lui demandant de le faire
fondre. Osiaa’iiwakuna s’empressa d’exécuter. Elle était enchanté de se faire
initier à cet art. Atwikan’iinosha retira son manteau, l’accrochant sur son
crochet habituel et fouilla parmis les herbes séchées afin d’en tirer les
feuilles de sauge.
-
Connais-tu la base? Ou ta mère t’a-t-elle
complètement garder dans l’ignorance.
-
Je sais que c’est du miel et de la sauge,
mais comment tisser le fil… ça je l’ignore.
-
C’est assez la base. Je vais m’occuper de
moudre la sauge, occupe-toi de brasser le miel, assure-toi qu’il ne brule pas.
Il faut qu’il redeviennent liquide sans plus. Une bonne partie du secret réside
dans l’âge du miel. Il faut que le miel est d’abord cristallisé. En le
réchauffant il change de consistance et devient plus élastique… Ne le fait pas bouillir! Dans aucun cas.
C’est particulièrement important. S’il bouille, nous devront recommencer à zero
et nous n’avons pas beaucoup de miel cet année.
-
J’y ferais gare, assura Osiaa’iiwakuna. Et
lorsqu’il est fondu je fais quoi.
-
Tu le brasse constamment. Et on y ajoutera la
farine de sauge.
-
C’est tout?
-
C’est l’étape facile.
Osiaa’iiwakuna hocha doucement de la tête. E